Mais quel top 10 ? Celui qui loge de plus en plus mal ou même pas du tout ses étudiants ?
Commentaire d’Igor Babou [1] à la suite de cet article
C’est bien dommage de ne donner la parole qu’aux responsables du PRES, et non aux chercheurs et aux enseignants-chercheurs, ou encore aux doctorants. Car vous y trouveriez bien des gens pour qui cette rhétorique idéologique de « l’excellence » et du « top ten » (un radio crochet universitaire basé sur l’applaudimètre de Shanghai) n’a aucun sens si ce n’est celui de vider de toute substance intellectuelle, politique et scientifique le travail de la recherche au profit d’une bureaucratie et d’un centralisme aussi inefficaces que contraire aux valeurs démocratiques que nous sommes encore nombreux à défendre à l’université.
Attention donc, dans les commentaires, aux amalgames : les tutelles des établissements de la recherche et de l’enseignement supérieur ne nous représentent pas, et n’ont plus la confiance des personnels de l’université. La crise de 2009 a bien montré à quel point ceux qui font la recherche et qui enseignent n’acceptaient plus les injonctions idéologiques à se « regrouper » et à être « excellents » : car quand il n’y a plus qu’une seule catégorie d’évaluation (l’excellence ou rien), cela signifie qu’il n’y a plus rien à penser et qu’on confond la science avec le marché de l’innovation. Et cela signifie qu’en plus, on rend hommage à la dictature chinoise dont on a bien vu avec quelle haine elle traitait ses intellectuels et ses étudiants, par exemple à Tien An Men : c’est ça, l’idéal pour lequel on devrait s’enthousiasmer ? C’est pourtant cela que signifie, profondément, la quête du Top Ten : une quête d’une servilité la plus totale à l’égard des puissances économiques et politiques.
De plus, il y a eu un rapport de l’OCDE (et nos propres travaux peuvent également en témoigner) qui a démontré que ce sont les petits laboratoires de recherche qui sont les plus efficaces, et non les grosses équipes. De toute manière, une grosse équipe se scinde presque toujours en sous-équipes pour pouvoir mieux travailler, et ce fantasme d’une université unique à Lyon ne fera pas oublier qu’il y a plusieurs institutions, plusieurs bâtiments et campus éloignés géographiquement, ainsi que des cultures universitaires bien diverses derrières l’acronyme bureaucratique « PRES de Lyon » : tant mieux, la culture, la recherche et la pensée ne s’expriment librement que dans la diversité !
Seuls les idéologues utilisent des catégories générales, uniformes et n’acceptant aucune hétérogénéité ni aucune marge de progression dans le temps ou en termes de qualité : les tutelles actuelles de l’université française sont sur cette ligne obsessionnelle de l’excellence car la plupart du temps leurs responsables (présidents d’universités, directeurs de grandes écoles, managers de la recherche, etc.) ne font plus de recherche depuis des dizaines d’années, et se sont réfugiées dans une bureaucratie et une brutalité méprisante à l’égard des chercheurs et enseignants qu’ils croient devoir « diriger » comme on mènerait une armée au combat.
Pourtant, toute l’histoire des sciences montre qu’ils ont tort.
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