La Guerre des ondes

D’un côté, il y a la radio faite pour satisfaire chacun de nos désirs formulés dans la langue de la domination marchande et de l’exploitation : s’informer en écoutant distraitement la petite chronique des suicides au travail, des vagues de licenciement, des réformes qui nous fragilisent toujours plus, des « bavures » policières qui ne sont exceptionnelles qu’en vertu de l’amnésie généralisée, etc. ; se cultiver grâce à des intellectuels et des universitaires qui, à défaut de tirer les conséquences pratiques de la pensée, nous la livrent sous une forme impropre au moindre usage : dans le meilleur des cas, nous voilà bien renseignés mais toujours aussi isolés et impuissants ; se divertir avec un Ruquier ou des Grosses Têtes qui n’ont plus que l’odeur de leur merde pour nous faire sourire : ça pique les yeux mais on en a tellement besoin dans les embouteillages ou à la fin d’une journée de travail ! Tout ça sans parler de la programmation musicale…

Et puis de l’autre côté, il y a toujours eu des radios au service du désir de renverser tout ça, d’inventer d’autres façons de vivre ensemble et d’expérimenter pleinement une vie confisquée par l’école, les boulots précaires ou les longues carrières d’esclaves en CDI, les crédits sur 20 ans, les expériences familiales ou amoureuses ratées, les flics, l’HP, la prison, le sexisme, le racisme, etc. Depuis l’élan révolutionnaire qui a soulevé de nombreuses régions du monde à la fin des années 60 jusqu’à la lutte en cours contre l’implantation d’un aéroport à Notre-Dame des Landes, en passant par l’insurrection zapatiste au Mexique, de nombreuses radios ont émergé pour réellement COMMUNIQUER : ça veut dire forger ensemble une définition et une perception commune des choses pour les partager et agir dessus. Non plus s’informer mais se tenir au plus près de l’événement pour en saisir toutes les possibilités. Non plus se cultiver mais aborder chaque secteur de la pensée pour y trouver des lignes de force et identifier les opérations de l’ennemi sur les mots et les raisonnements que nous utilisons tous les jours : pourquoi, par exemple, l’amitié a-t-elle disparu des questions politiques alors qu’elle porte avec elle la possibilité de se partager et donc d’habiter autrement le monde ? Non plus se divertir mais chercher un monde commun plus désirable que celui-ci dans la musique, la littérature, l’humour, etc.

Ici, à Rouen, deux émissions hébergées par HDR (99.1 ou http://hdr.radio.fr) s’inscrivent dans cette perspective :

Au-delà des murs (lien « Au-Delà des murs » en haut à gauche de l’écran pour avoir le texte de présentation), une fois par mois : En poursuivant ce que nous faisions déjà l’année dernière, nous relaierons l’actualité de la prison (grèves de la faim, émeutes, réformes, etc). Nous analyserons chacun de ses aspects (psychiatrie, sexualité, travail, etc.) pour comprendre comment elle gouverne, non seulement les détenus, mais également le reste de la population en produisant un certain nombre de savoirs et en conditionnant le droit et la justice. Enfin, et c’est peut-être le plus important, nous ferons tout pour entrer en contact avec les détenus et leurs proches ; il s’agit de mettre en place un réseau de solidarité à Rouen autour de la maison d’arrêt Bonne Nouvelle.

La Rue meurt, une fois par mois : L’initiative est nouvelle, nous comptons mettre en place une plateforme de discussion autour de toutes les luttes en cours, et notamment à Rouen. Dans la mesure du possible, nous inviterons et ferons intervenir les acteurs de ces luttes. Autrement, nous y aborderons également des sujets plus historiques et théoriques, nécessaires pour aiguiser notre perception de l’ordre présent et des points par lesquels nous pouvons l’attaquer.

Quelques parasites sur les ondes

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