Le triste récit d’une bannale expulsion

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Ceci est une histoire qui devient malheureusement banale pour
certains ou certaines, mais qui ne doit plus se reproduire pour qui que ce
soit. C’est l’histoire d’une expulsion.
Je rappelle que ce récit ne concerne que mon ressenti et non celui de
Marlène et Jo qui doivent surement avoir un autre vécu de cette histoire.

Mercredi 19 décembre 2008

Je ne vous rappelle pas qu’en ce moment en France il ne fait pas très bon
vivre, si bien qu’en redescendant sur Lyon depuis Bruxelles avec deux
potes (Marlène et Jo), un mauvais épisode de trois jours
commença.

Sur l’autoroute de Charleville-Meziere (frontière Belge) une voiture de
lardus (flics) nous attendait.
« Monsieur veuillez nous suivre jusqu’au commissariat »
Avec Marlène et Jo, nous nous sommes alors retrouvé-e-s au poste car le
passeport de Jo n’était plus valable. Jo est californien, il
n’a le droit de rester que trois mois sur le territoire, ce délais était dépassé.
Tout deux dans un bureau accompagnés de trois flics, j’essayais d’expliquer
à Jo de ne rien signer, de demander un avocat, un médecin et un
interprète car celui ci allait être placé en garde à vue.
N’ayant pas aimé les explications que je fournissais à mon ami, les flics m’ont viré de la pièce par la force, accompagné d’insultes racistes (je suis d’origine algérienne). J’ai donc rejoint Marlène dans le hall.

Pendant ce temps, j’ai réussi à téléphoner à Lucas et je lui ai
demandé de joindre RESF, et de chercher des avocats spécialisés dans les questions d’immigrations dans le nord . Finalement c’est Paul qui s’en
est chargé. Cimer à Lucas et à Paul.
Après ce coup de fil, les lardus sont venus me chercher pour m’entendre.
Le chef d’inculpation était le suivant : Aide au séjour de personne en
situation irrégulière.
Pendant mon interrogatoire, je n’ai pas parlé pour ne pas mettre mon ami dans la merde, et de toute façon je ne savais pas
qu’il était en situation irrégulière.
Après cette audition, ils m’ont aussitôt placé en garde à vue.
Ayant fait déjà plusieurs garde à vues, j’essayais de rassurer mon ami en
sachant très bien qu’il allait être expulsé du territoire Français.
Avant de rentrer en garde à vue j’avais pris le soin de laisser mon portable à Marlène pour qu’elle puisse s’organiser avec Paul, et effectivement nous avons été contents de voir que les réseaux marchent, puisque une heure après mon coup de fil à Lucas, Anne, une dame de la CIMADE, est arrivée et a hébergé Marlène.

Au milieu de la nuit un flic vient me réveiller avec violence et me
demande de me lever et me dit : " Avec un nom comme le tien je pensais
que c’était toi qu’il fallait expulser ça aurait été mieux pour mon
pays
"
Après ces quelques mots bien nationalistes je me suis pris deux claques
dans la tête puis il repartit.
Le lendemain à 6h00, la police me réveille pour une perquisition de mon
camion. Menotté devant mon véhicule je sentais ma gorge se nouer quand ils ont tout saccagé à l’intérieur en prenant le soin de photographier tout les documents à connotation militante (surprenant non ?).
Je suis sorti à 11h du matin, 18h après le début de ma garde à vue.
Quand je suis sorti, Marlène m’attendait et je me suis mis à pleurer dans ses
bras, fatigué d’une nuit où nous nous sommes retrouvés au centre des
politiques bien baveuses, racistes et inhumaines que sont les lois sur
l’immigration. Je pleurais en pensant à mon pote que je n’allais plus
revoir de sitôt et à toutes les personnes qui sont et qui vont être
expulsées dans un pays peut-être en guerre à l’inverse du territoire US.

Deux heures plus tard notre pote Jo fut amené au centre de rétention
de Lille où nous avons pu le voir le lendemain. Trois jours plus tard il
quittait la France de force !
Avec Marlène nous pensons à Jo et à toutes les personnes expulsées pour une raison ou une autre !

NO BORDER NO NATION STOP DEPORTATION !

Note : Les prénoms ont été modifiés

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  • Le 2 janvier 2009 à 13:34

    Je suis un-e des 5. Un-e des 5 « copain-e-s » de Bruxelles, qui aurait perdu 72 précieuses heures de sa VIE.

    72 heures « perdues » à aider un ami, quelqu’un qui m’est cher…à qui je tiens ;

    72 heures au cours desquelles, pour la premières fois, je suis rentré-e à l’intérieur d’une des multiples prisons de l’Etat, que l’on appelle « centre de rétention » ;

    72 heures pendant lesquelles j’ai pu sentir et palper l’horreur qui se cache derrière les enfilades de murs, barrières et barbelés, d’un centre fermé ;

    72 heures passées à pique-niquer, discuter et rigoler avec notre ami, dans une minuscule « salle de visite » aseptisée, tables et chaises clouées au sol…où tout est bien figé ;

    72 heures pendant lesquelles on a écouté ses récits au sujet de la « non-vie » bien réglée, dissimulée derrière ces murs, de la bouffe gerbante, des personnes enfermées qui font les cent pas, qui tournent en rond, relisent 10 fois le même bouquin (pour autant qu’ils en aient un), sont lobotomisés à coups de télévision, constamment allumée, sans un crayon pour écrire ou dessiner… ;

    72 heures à parcourir les rues de Lille, à la recherche d’associations qui pouvaient soi-disant l’aider ;

    72 heures à se renseigner sur les conditions d’enfermement et les alternatives à son expulsion ;

    72 heures à se dire qu’il n’y a pas d’alternatives, qu’il y a juste à tout cramer ;

    72 heures à envisager une évasion, à se dire qu’il est possible, tout au moins, de faire passer toutes sortes d’objets à l’intérieur, lors des visites… ;

    72 heures d’intenses câlins, toujours au milieu de cette même et unique salle pourrie

    72 heures passées avec les amis, à vivre ça ensemble, à se dire qu’on n’est pas seuls dans ce monde infâme ;

    Et juste pour cette seconde, lorsque notre ami nous a vu rentrer ensemble dans la salle de visite, cet instant pendant lequel son visage s’est éclairé, les yeux souriants ; la salle aseptisée s’est effacée, l’espace d’un instant, sous nos cris…de joie de se voir…d’amour qui nous lie…de haine pour ce monde ;

    Ai-je perdu une partie de ma vie ?

  • Le 30 décembre 2008 à 21:02

    Il est évident que pour un ressortissant californien l’histoire est moins banale que pour d’autre dont le pays d’origine est peut être moins accceuillant.
    Toutefois elle n’en est pas moins injuste, ni moins absurde. Je tiens à préciser que d’une part les ressortissants américains n’ont pas besoin de visas pour venir en Europe, d’autre part le cout moyen d’une expulsion est de 20 970 euros.
    Voila cette histoire aura donc couter très cher au contribuable francais, aura surement pas mal traaumatisé Jo qui n’a que 18 ans, aura fait perdre 72 heures de la vie de Marlene et l’auteur, ainsi que 72 heure de la vie des cinq copains qui se sont déplacés de bruxelles jusqu’au centre de retention, nous aura tous conforté dans l’idée que la France est un pays de keufs racistes.

    Tout ça pour quoi ?

    Pour grossir les quotats ?

    Pour nous mettre du beaume au coeur la prochaine fois qu’on est dans une émeute ?

    Quelle grande absurdité !!!!

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