Au Caire, répression sans précédent pour l’anniversaire de la Révolution

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Le 25 janvier prochain sera le 5e anniversaire de la Révolution égyptienne. Un anniversaire que bien peu célébreront : espaces culturels fermés, opposition politique laminée, centre-ville quadrillé, activistes traqués… 5 ans après le soulèvement populaire qui a mis fin au régime de Moubarak, l’ambiance n’est pas à la fête, malgré les appels de certains groupes et individus à redescendre dans la rue.

Depuis un mois les autorités égyptiennes ont lancé une campagne de répression sans précédent envers toute forme de contestation du régime. De nombreux imams (sur recommandation du Ministère des Affaires religieuses) précisent ainsi dans leurs prêches du vendredi que la participation à des manifestations le 25 janvier prochain est contre l’islam, et que s’il devait y avoir des morts dans des affrontements avec des forces de sécurité, ceux-ci ne sauraient être considérés comme des martyrs. Le président Sissi lui-même multiplie les interventions télévisées dans lesquelles il met en garde tous ceux qui visent à « propager le chaos » et « répandre l’insécurité et le désordre » dans le pays.

Mais au-delà des discours, c’est une véritable opération policière et administrative d’une ampleur inégalée qui secoue la capitale égyptienne, particulièrement le centre-ville, fief de la scène alternative et contestataire.

Depuis fin décembre, de nombreux espaces culturels ont ainsi reçu la visite inopinée d’officiers de différents services gouvernementaux : si le studio Emad Eddin, principal soutien du festival D-CAF, a échappé à la fermeture administrative, ce n’est pas le cas de Townhouse, le « hub » de la culture alternative au centre-ville du Caire depuis 16 ans, ni de la maison d’édition Merit, qui publie certains livres qui dérangent les pouvoirs en place (sur le plan politique comme religieux). Dans les deux cas, les raisons de la fermeture sont floues, de même qu’une éventuelle date de réouverture.

Selon une source officielle des services de sécurité, plus de 5 000 appartements auraient également été récemment « inspectés », en prévision du 25 janvier. Impossible de vérifier ces chiffres, mais il est certain que de nombreux raids ont été réalisés ces derniers jours dans plusieurs appartements de personnes identifiées comme activistes, entraînant la saisie des ordinateurs, téléphones et disques durs, et l’arrestation de plusieurs personnes. Parmi celles-ci, le docteur Taher Mokhtar et ses deux colocataires, accusés de « possession de publications anti-régime », et dont la détention vient d’être prolongée de 15 jours, ce qui permet aux autorités de les maintenir enfermés d’ici au 25 janvier. Cette arrestation a suscité une vague de soutien sur les réseaux sociaux égyptiens. Le hash-tag #J’ai participé à la Révolution du 25 janvier était le plus populaire sur le réseau twitter local ces derniers jours. En l’utilisant, des milliers d’égyptiens manifestent le fait qu’ils ont contribué au soulèvement populaire d’il y a 5 ans, et que cela ne saurait être une excuse pour les arrêter et emprisonner. On parle aussi de 47 étrangers qui auraient été arrêtés ou expulsés du territoire pour non-validité de leur visa, alors que les règlements en matière de visa tournent à l’absurde ces derniers mois.

La colère gronde également du côté des familles de détenus, alors que les témoignages de tortures, abus policiers et mauvais traitements en détention se multiplient, et que les ONG de défense des droits de l’homme se voient interdire d’accès aux lieux de détention. Il y a quelques mois, la mort par torture d’un jeune de la région de Louxor avait déjà enflammé la population locale, qui avait multiplié les manifestations de colère face à des pratiques caractéristiques de l’ancien régime mais toujours omniprésentes.

Si la majorité des Egyptiens ont soutenu la politique intolérante du général-devenu-président Sissi contre les Frères musulmans, beaucoup critiquent aujourd’hui sa politique actuelle, marquée par une « guerre contre le terrorisme » qui tourne à la dictature militaire, où toute opposition est muselée, et une politique économique marquée par les projets de prestige mais aux retombées bien faibles pour les couches populaires…

Le centre-ville du Caire était hier soir bien à cette image. Alors que Sissi devait effectuer une visite dans le quartier, celui-ci a été intégralement nettoyé : terrasses de café enlevées, parkings vidés, circulation interrompue, omniprésence de tous les corps de sécurité que connaît le pays dans les rues (des ambulances aux forces anti-émeute en passant par les services de la circulation et tous les différents corps de police…), hélicoptère en survol…

Un aperçu de ce que prépare le régime pour le 25 janvier ?

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