La boucherie de 14-18 : le creuset des totalitarismes

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Mardi 11 novembre à 15 h, débat à la librairie libertaire La Gryffe.

Ce débat est organisé dans le cadre du festival libertaire « Novembre, on s’installe partout », et animé par l’Organisation Communiste Libertaire-Lyon avec un des coordonnateurs du Hors Série « 14-18 » du journal Courant Alternatif.

Les commémorations de la « Grande Guerre » occultent toujours le souvenir du carnage et de ses causes en préférant exalter le martyre des soldats et en sacralisant leurs combats. Elles fabriquent le mythe de la guerre nationale, la mémoire des combats est déformée, le culte du soldat est quasi religieux et s’incarne dans les monuments aux morts et les cérémonies. La République, et avec elle le pouvoir en place (quelle que soit son étiquette politique), profite de ces moments pour s’autocélébrer, sans se soucier de véracité historique. On sait combien ces messes laïques sont capables de se transformer en révisionnisme ; on se souvient encore comment le bicentenaire de 1789, sous la direction intellectuelle d’un historien réactionnaire (François Furet) et dont les festivités furent conduites par le publicitaire des Galeries Lafayette (Jean-Paul Goude), a été l’occasion d’enterrer le concept même de révolution.

Il est donc important de revenir sur cette période pour comprendre que leur démarche, qui a pour objectif de produire du consensus national, découle d’une vision politique des classes dominantes. Car si tout le monde admet théoriquement que la Première Guerre mondiale fut bien la matrice du XXe siècle, on oublie volontiers que l’Europe fut, pendant quelques années, le champ de multiples soulèvements dont la défaite a ouvert grandes les portes du totalitarisme. La seconde Internationale l’avait promis : si le monde capitaliste était assez fou pour déclarer la guerre, il sombrerait dans la révolution. Le socialiste allemand August Bebel annonçait en 1911 au Reichstag : « Je suis convaincu que cette grande guerre mondiale sera suivie d’une révolution mondiale. Vous récolterez ce que vous avez semé. Le crépuscule des dieux approche pour le régime bourgeois. » La prédiction a paru, un court instant, pouvoir se réaliser. Entre 1917 et 1921, l’Europe fut secouée par des soulèvements d’importance : des révolutions jetèrent bas les Empires russe, allemand, austro-hongrois.

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Mais, hélas, c’était trop tard, la défaite avait été forgée dès ce funeste 4 août 1914 ! La conscience et la détermination prolétariennes ne furent pas suffisamment aiguisées pour jeter par-dessus bord les conséquences de la reddition que fut l’Union sacrée réalisée dans chaque camp. Et, comme deux précautions valent mieux qu’une, les révolutionnaires affaiblis tombèrent ensuite sous les balles de leurs ennemis de toujours et d’aujourd’hui encore : les pouvoirs constitués, quelle que soit leur couleur. Les opposants au système capitalistes réduits, laminés par la guerre puis par la répression, plus rien n’empêchait la classe dominante d’asseoir sa puissance sans souci aucun de la forme qu’elle pouvait prendre. Fascisme, stalinisme, Etat keynésien, peu lui importait, pourvu que l’ordre soit maintenu et que les affaires continuent, même en cas de crise. Le siècle était bien installé dans la barbarie. Il se réclamait des « Lumières », il s’est enfoncé dans les ténèbres des fascismes brun et rouge, autant de joyeusetés opposées sur le papier, mais qui se sont souvent alliées lorsqu’il s’est agi de mettre hors jeu les victimes révoltées par la barbarie capitaliste.

La guerre de 1914 nous a tous forgés, même celles et ceux qui en ignorent tout. Pour nous, elle a marqué le déclin d’un mouvement révolutionnaire que l’Espagne de 1936 a tenté, mais en vain, de faire survivre ; là encore, ils s’y sont tous mis, unis par leur union sacrée contre la classe ouvrière.
Les leçons à tirer sont énormes et multiples, mais la principale est sans doute que la lutte contre cette union sacrée est la priorité des priorités. Une politique d’union sacrée qui s’insinue encore aujourd’hui par tous les pores de la politique et des luttes, qui gangrène des têtes autrement plus critiques et méfiantes, mais qui finissent par accepter une vision du monde réduite au bien contre le mal (et vice-versa selon le camp qu’on est sommé de choisir). Il serait indécent de ne pas se rappeler les conséquences de cette mise à l’écart de toute analyse de classe qui déboucha sur les totalitarismes du XXe siècle.

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