« Dix livres à lire dans une vie, c’est pas la mort pour être forts et jamais seuls... »
Telle est la confidence d’un ami soixante-huitard qui n’a pas retourné sa veste.
Ces lectures ont fait irruption dans ma vie déclenchant des ondes de plaisirs, une ouverture, une compréhension et une lucidité sur la société et sur le monde.
Et c’est en toute simplicité que j’ai envie de partager.
A.Quarz
Proposition d’un extrait de "L’Unique et sa propriété" de Max Stirner.
« Au chapitre de la société, il convient aussi de parler du "parti" dont on chantait récemment la louange.
Le parti fleurit dans l’État. "Parti, parti, qui ne doit pas prendre parti ?"
Mais l’individu est isolé et n’est pas membre du parti.
Il s’unit librement et se sépare de nouveau librement.
Le parti n’est rien qu’un État dans l’État et, dans cette ruche plus petite, la "paix" doit régner comme dans la grande.
Ce sont précisément ceux qui crient le plus fort qu’il doit y avoir une opposition dans l’État, qui grondent le plus lorsqu’il y a un manque d’unité dans le parti.
C’est une preuve qu’ils ne veulent aussi qu’un État.
Ce n’est pas contre l’État mais contre l’individu que viennent échouer et se briser tous les partis.
On entend sans cesse exhorter à demeurer fidèle au parti, et les hommes de parti ne méprisent rien tant qu’un transfuge.
On doit avec son parti affronter tout, en éprouver entièrement les principes et les défendre.
A vrai dire, la situation n’est pas aussi mauvaise que dans une société fermée dont tous les membres sont enchaînés aux lois et statuts.
Mais le parti cesse d’être une association dans l’instant même où il rend obligatoires certains principes et veut les savoir assurés contre les attaques, c’est à cet instant précis que naît le parti.
Il est déjà comme parti une société née, il est une association morte, une idée devenue fixe.
En tant que partie de l’absolutisme, il ne peut vouloir que ses membres doutent de l’immuable vérité du principe ; car ils ne pourraient nourrir ce doute que s’ils étaient assez égoïstes pour vouloir être encore quelque chose hors de leur parti, c’est-à-dire impartiaux.
Ils ne peuvent être impartiaux comme hommes de parti, mais comme égoïstes.
Si tu es protestant et appartient au parti protestant, tu ne peux que censurer le protestantisme, en tout cas le « purifier », non le rejeter ; si tu es chrétien tu es classé parmi les hommes dans le parti chrétien, comme membre de ce parti tu ne peux en sortir, à moins que ton égoïsme, c’est-à-dire ton impartialité, t’y pousse.
Quels efforts ont fait les chrétiens jusqu’à Hegel et les communistes pour renforcer leur parti !
Ils demeuraient convaincus que le christianisme devait contenir la vérité éternelle et qu’il fallait seulement l’en extraire, puis l’établir solidement et la justifier.
Bref, le parti ne supporte pas l’impartialité et en lui apparaît bientôt l’égoïsme.
Mais que m’importe le parti ? J’en trouverai suffisamment qui s’uniront à moi, sans prêter serment à mon drapeau.
Dans tout parti qui tient à soi et à son existence, les membres sont assujettis ou mieux, privés de vie propre, d’égoïsme, dans la mesure où ils servent ses désirs.
L’indépendance du parti suppose la dépendance de ses membres.
Un parti ne peut jamais, de quelque nature qu’il soit, se passer d’une profession de foi. Car ses adhérents doivent croire au principe du parti ; ce principe ne peut être contesté par eux et mis en question, il doit être pour chaque membre la chose certaine, indubitable ; c’est-a-dire, que l’on doit appartenir au parti corps et âme, autrement on n’est pas véritablement homme de parti, mais égoïste plus ou moins.
Aie un doute sur le christianisme, tu n’es déjà plus un vrai chrétien, tu as eu "l’imprudence" de questionner sur ce sujet, de citer le christianisme au tribunal de ton égoïsme, tu as pêché contre le christianisme, la cause de ton parti ( car il n’est pas la cause d’un autre parti, les juifs par exemple ) ;
mais je te félicite, si tu ne te laisses pas effrayer : ton impudence t’aidera à affirmer ton individualité.
Aussi un égoïste ne pourrait jamais adhérer à un autre parti ?
Si pourtant, sauf qu’il ne peut pas se laisser prendre et accaparer par le parti.
Le parti n’est toujours pour lui qu’une partie, il est de la partie, il y prend part. »
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