Le lundi 14 novembre, dans la salle des comparutions immédiates, entre deux audiences, le cliquetis des menottes qui s’ouvrent ou se ferment rythme le défilé des talons hauts des avocates.
A l’extérieur de la salle d’audience, une dizaine de jeunes hommes venus soutenir leur copain et/ou leur cousin inculpé discutent.
Rebellyon se fait inviter dans la discussion ; Abdel, Lamine et Yacine parlent.
« Tu vois le juge, il fait la justice dans le tribunal, là. Et ben il fait pas la justice dehors : Chirac il a volé quatre millions il est en liberté, moi si je vole un bonbon, c’est direct la prison. »
« Il est bien payé lui, le juge, il a un bon salaire, le soir il rentre chez lui, il retrouve sa femme ; il part au ski deux semaines aux Menuires avec ses enfants, tu vois. Bon bah nous quand on part en vacances, c’est 3 jours au camping...c’est la justice ça ? »
« " Nous, on a des boulots mal payés" »
« " On veut pas tout pour nous, mais plus pour nous " »
Tout le monde boit un café, Rebellyon s’en fait payer un.« Merci. C’est ce que vous me dites qui a déclenché les émeutes » ?
« Oui et c’est Sarko, il veut nous nettoyer au karcher ! Ca veut dire quoi ça ? Qu’on est de la saleté ? qu’on est sale ? »
« Qui c’est qu’ a fait la France ? les routes ? les autoroutes ? les immeubles ? »
« Toi t’es blanc, pas moi. Le racisme c’est tous les jours dans le regard des gens ; toi si tu marches dans la rue, on te regarde pas. Les gens ils ont peur de nous »
« A l’assemblée, y’a pas de noir, y’a que des blancs ! »
« A l’entreprise aussi, y’a que le piston pour travailler ; moi j’ai trouvé un emploi de cariste parce que mon cousin il travaillait déjà dans la boïte. Mais je gagne pas assez pour ma femme et moi, et bientôt trois ! »
« Pourquoi tu crois que le jeunes ils tombent la cagoule [1] à 16 ans ? Y’a pas d’avenir. »
« Nous on a pas la parole, on peut rien dire quand Sarko il veut nous nettoyer au karcher ; y’a pas de relai, y’à que la justice. »
« Et dans les religieux, vous trouvez pas du soutien ? »
« Moi je suis croyant. Les religieux il s’occupent de la religion, c’est tout. »
« Le couvre-feu, tout çà, ça énerve. Quand les copains ils prennent 3 mois ferme pour rien, ça énerve encore plus. »
« A la prison y’a des rats gros comme ça (il me montre son avant bras) dans les cellules, c’est la misère la prison. »
« Avec le couvre feu, on peut plus sortir de chez nous, on peut plus sortir du quartier, on est...parqués ! Ca énerve ! »
« En plus la police ils donnent pas le bon exemple, ils boivent, ils mentent, ils font des choses pas légales.. »
Les délibérations ont lieu, tout le monde rentre dans la salle.
Le juge condamne leur copain et/ou cousin à 3 mois de prison ferme pour l’incendie supposé d’une poubelle ; ils quittent tous brusquement la salle d’audience, dégoûtés.
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