Quand Lyon 2 profite d’un évènement tragique pour durcir sa politique sécuritaire

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Suite à la tuerie au siège de Charlie Hebdo et aux événements qui s’ensuivirent, faisant 20 morts ; face à « l’unité nationale » décrétée, il est important de se positionner.

Une fois l’émotion passée, il est de notre devoir collectif de comprendre les conséquences politiques de cet évènement. Dans les jours qui suivirent, le ministre de la Défense a annoncé le déploiement sur les « lieux sensibles » du territoire national de 10 500 militaires supplémentaires pour mener une « opération intérieure », faisant écho aux (27) « opérations extérieures » menées par l’État français (terme euphémisé destiné à désigner les théâtres de guerre dans lesquels est déployée de manière plus ou moins permanente l’armée française).

Dans le sillage d’une communication politique alimentant la surenchère sécuritaire et identitaire, surfant sur la vague émotive provoquée par l’attentat, l’extrême droite française multiplie les passages à l’acte racistes. Chaque jour amène son flot d’explosions ou d’incendies de mosquée, d’agressions de « musulman-e-s » ou supposé-e-s comme tel-le-s, de menaces de morts et de tags racistes : les actes « antimusulmans » recensés ces deux dernières semaines atteignent le nombre total comptabilisé pour l’année 2014 !

Ainsi, ce climat politique, instrumentalisé de toute pièce par la classe dirigeante, n’est qu’un prétexte pour mettre en place des mesures liberticides et sécuritaires renforçant toujours plus le contrôle de la population et prévenant ainsi toute contestation sociale.

La conséquence politique immédiate, la soi-disant « unité nationale », illustrée par les marches massives du dimanche 11 janvier, où tous les leaders conservateurs et réactionnaires (de « gauche » comme d’extrême droite) sont venus défiler, accompagnés de dirigeants de pays étrangers où la liberté de la presse est toute relative. La classe possédante et ses relais (nationaux comme internationaux) se sont superbement affichés pour aller chercher le consentement de la classe qu’ils dominent, en occultant soigneusement leur propre violence économique et sociale. Y a-t-il en effet une quelconque « unité nationale » possible avec ceux qui cassent les droits sociaux et le code du travail, appliquent des politiques de rigueur, répriment les mouvements sociaux et expulsent toujours plus de sans-papiers ?

Cependant, si ces derniers jours ont vu la « libération » (!) de la parole et du passage à l’acte racistes, le racisme institutionnel est à l’œuvre depuis bien plus longtemps.

Rappelons à Lyon II la pantalonnade autour du contrôle au faciès fin septembre d’un étudiant qui avait le malheur de porter une djellaba sur le campus des Quais.

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De façon bien plus insidieuse, systémique, le racisme se manifeste dans la structure même de la société dont l’université n’est pas exclue. Ainsi, l’organisation de la production s’inscrit dans une logique de sur-exploitation d’une main-d’œuvre considérée comme « immigrée » (c’est à dire non-blanche), souvent dans l’incapacité matérielle de refuser de mauvaises conditions de travail. En effet, les tâches les plus pénibles, les moins valorisantes et les plus mal payées sont réalisées par des travailleurs majoritairement "issus de l’immigration" , et féminins pour prendre l’exemple des agents d’entretien.

Depuis les attentats de Paris, sous prétexte du renforcement du plan Vigipirate, le président de l’université Jean-Luc Mayaud a décrété un contrôle strict des identités de toute personne voulant entrer sur le campus des Quais. Pour ce faire, seuls certains accès sont ouverts, chaque étudiant-e devant présenter sa carte étudiante et montrer le contenu de son sac aux agents de sécurité incendie, épaulés dans cette mission par des agents salariés d’une entreprise de sécurité privée. Ainsi Jean-Luc Mayaud parvient à débloquer rapidement des fonds pour renforcer sa « sécurité », mais pas pour payer les chargés de TD On peut par ailleurs le noter, la « menace terroriste » semble plus importante pour la vitrine du « campus des Quais », que sur Bron, où sont pourtant présent-e-s la plus grande majorité des étudiant-e-s et personnels. Face à la « menace terroriste », tous les publics ne méritent pas d’être « protégés » ? Nous n’en sommes plus à une absurdité près.

En plus d’entretenir un climat de haine de l’autre, de peur et de suspicion permanente, ces contrôles de cartes conduisent à isoler un peu plus encore l’université du reste de la société et contrarient de fait l’activité syndicale qui cherche justement à l’ouvrir en tissant des liens et convergences avec l’ensemble des étudiants et des travailleurs. La présidence consacre ainsi sa vision de l’université comme lieu de passage où l’étudiant consomme ses cours (et son sandwich à la pause) contre nos volontés d’en faire un lieu de vie, un lieu d’organisation, de construction de nos capacités de mobilisation ouvert à tous ceux et toutes celles qui s’opposent à la dégradation des conditions de travail, d’études et, plus globalement, de vie.

Cette décision s’ajoute à la longue liste de mesures attentatoires aux libertés démocratiques les plus élémentaires mises en place par la direction de l’université. Nous savions déjà la liberté d’association largement remise en cause par le durcissement des critères d’agrément des associations et d’attribution des subventions, par le contrôle accru de leurs activités, par la suppression de certains lieux collectifs de réunion (suppression de locaux associatifs) ce qui a pour effet direct de veiller matériellement à ce qu’elles ne puissent réellement s’opposer aux politiques de liquidation capitaliste du service public de l’enseignement supérieur ; on peut aussi citer la suppression, de locaux, de panneaux d’expression libre, l’arrachage systématique d’affiches syndicales, etc. À présent c’est la liberté de circulation même qui est menacée à Lyon II !

Sous couvert de « sécurité » et de « protection de la liberté d’expression », l’État et le président de l’université décrètent des mesures visant à contrôler toujours plus la population et les étudiant-e-s et, au-delà de ça, à étouffer toute contestation sociale dans l’œuf.

Quel crédit peut-on apporter à un homme qui organise des minutes de silence dans son établissement en commémoration des victimes de l’attentat et pour la liberté d’expression et qui, parallèlement à cela, n’hésite pas à faire condamner et exclure des étudiant-e-s syndicalistes ayant participé à un mouvement étudiant contre la dernière réforme structurelle de l’Université ?

À Lyon II comme partout, la liberté d’expression est à deux vitesses !

Nous ne les laisserons pas nous enchaîner, pour sauvegarder notre liberté d’action associative et syndicale !
Non aux contrôles à l’entrée des facs !

Libertés de circulation, d’étudier et d’expression !

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