Rescapés de la Méditerranée ou du désert ! Jetés en prison ou à la rue à Lyon !

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Le Parquet de Lyon va de plus en plus vite et loin dans la répression des mineurs isolés étrangers…

Arrivé à Lyon le 16 mars, Oumar a été jeté en prison 10 jours après. Au moment la télé nous montrait l’horreur des conditions d’arrivée des migrants en Italie, il sortait de la prison de Villefranche après y avoir passé presque un mois. Avant, il avait connu les rackets, la vente d’un passeur à l’autre de ses compagnons de voyage, l’enfermement plusieurs mois en Libye, la traversée avec 368 autres passages sur une pirogue qui est tombée en panne, le sauvetage in extremis pour lui, mais pas pour son frère mort noyé dans le bateau d’après avec tous les passagers.

La France serait-elle plus douce ? Conduit 3 fois la nuit par des policiers dans un foyer d’accueil à Lyon avec son acte de naissance lui donnant 16 ans, il en est chaque fois renvoyé le lendemain matin. La 4e fois, c’est à la PAF qu’il est emmené. Accusé de mentir sur son âge parce qu’il présente 2 papiers dont l’un comporte une erreur sur le jour de naissance mais pas sur l’année, il est soumis aux tests osseux qui lui donnent 25, 30, ou 35 ans. Mis en garde à vue, il est condamné pour escroquerie à un mois de prison. La dite escroquerie porterait sur 1700 euros qu’il est condamné à rembourser pour 3 nuits de foyer !!!

Aucun de ses droits n’a été signifié à Oumar, ni celui de refuser les tests osseux, ni celui de faire appel du jugement. Aucun document écrit ne lui a jamais été fourni, ni la décision du parquet de refuser sa prise en charge, ni le résultat des tests osseux, ni le jugement du tribunal correctionnel.
Maintenant, il n’a plus aucun document d’identité. Ceux qu’il avait ont été gardés par la PAF. Il est sorti de prison pour aller dormir dehors sans papiers et sans un sous.

Parallèlement aux comparutions immédiates et aux condamnations qui continuent puisque 3 jeunes de nos connaissances sont actuellement encore en prison, des mineurs isolés provisoirement pris en charge sont sortis des dispositifs de protection de l’ASE, par la décision du Parquet ou de juges des enfants prise sur la base d’une 1re suspicion sur leur minorité émise par la MEOMIE. D’autres sont rejetés dès leur premier contact à l’accueil de la MEOMIE.

Pour l’un c’est une juge des enfants qui a estimé que les résultats des tests osseux lui donnant plus de 26 ans permettaient de mettre son acte de naissance en doute… Pour l’autre, mineur de 17 ans jeté à la rue après quelques semaines d’hôtel, pourtant en possession d’une carte d’identité malienne, c’est une autre juge des enfants qui, tout en ordonnant un nouveau placement temporaire, ordonne une expertise osseuse alors que le Haut Conseil de la santé publique dit dans son avis du 23 janvier 2014 : « La détermination d’un âge osseux ne permet pas de déterminer l’âge exact du jeune lorsqu’il est proche de la majorité légale », et alors que l’article 47 du Code civil ordonne la reconnaissance des actes civils étrangers, sauf cas exceptionnels avec preuves à l’appui. Pour beaucoup, c’est le Parquet qui classe sans suites ou refuse de délivrer des ordonnances de placement provisoire et renvoie les jeunes à la rue…

Enfin, la Cour d’appel des mineurs de Lyon vient de donner raison aux 2 juges pour enfants qui ont fait jeter Mamoudou et Banthiéni de leur hôtel il y a 3 mois !

Les enquêtes policières accusant Mamoudou et Banthiéni de frauder sur leur âge et donc d’escroquerie, alors que leurs passeport et carte d’identité ont été reconnus authentiques par le bureau de la fraude documentaire de la PAF, ont suffi pour les rendre tous les 2 SDF à 16 et 17 ans, sans même attendre les appels encore en cours des 2 jugements du tribunal correctionnel !

La bataille pour le droit à la protection des mineurs isolés étrangers est de plus en plus dure, à Lyon comme partout ailleurs. Nous nous heurtons à la politique généralisée du soupçon à l’encontre des migrants, composante essentielle de la politique de l’immigration que le gouvernement Hollande veut encore durcir dans ses prochaines réformes de l’asile et du CESEDA. Nous nous heurtons aux procédures d’évaluation des mineurs isolés étrangers inscrites dans la circulaire Taubira et en cours d’inscription dans la loi. Nous nous heurtons au mépris de la présomption de minorité et de la présomption d’authenticité des actes d’état civil étrangers. Nous nous heurtons à la pratique systématique et généralisée des tests osseux. Obligés, notamment par de nombreux avis d’experts et par nos campagnes de protestation de reconnaître que les tests osseux ne sont scientifiquement pas fiables, le gouvernement et les députés qui majoritairement le soutiennent recommandent que les tests ne soient utilisés qu’en dernier recours, alors qu’ils savent tous qu’ils sont la pièce maîtresse de la plupart des accusations en l’absence de toute expertise des pièces d’identité. Ils le font en demandant que la marge d’erreur soit indiquée… Façon tout à fait hypocrite de reconnaître qu’on ne peut pas se fier aux tests, tout en livrant les jeunes migrants à l’arbitraire des décisions d’une fausse justice basée sur de fausses preuves !

Dans plusieurs villes, à Paris, à Nantes, à Orléans, des luttes se mènent pour les droits des mineurs isolés étrangers avec l’appui de beaucoup d’associations. A Paris, en solidarité et en guise de protestation, des tentes les abritent en face des structures d’accueil qui les rejettent. A Paris encore, des enseignants ont manifesté devant le rectorat pour leur scolarisation ou devant la mairie pour leur hébergement. A Nantes, un rassemblement devant le CHU a été organisé.

Nous voulons l’interdiction pure et simple des tests osseux pour évaluer l’âge des personnes, que ce soit à la demande des conseils généraux, des métropoles, des parquets ou des juges ! Nous voulons en plus la reconnaissance des actes d’état civil étrangers. S’il y a doute ou manque de documents, nous voulons que les structures de protection des jeunes les accompagnent dans le rétablissement de leur état civil, en dehors de toute procédure à visée répressive !

Nous voulons pour tous, mineurs comme majeurs, isolés ou familles, la reconnaissance du droit au logement, à l’éducation, au travail ! Et spécialement pour les mineurs de toute nationalité qui ont leur avenir et le monde de demain à construire !

P.-S.

RESF/Collectif RESF Jeunes Majeurs 69/ 31 mai 2015

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