« Fini de rire » et la sorcière

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Ce jeudi 6 septembre après midi devant le 4ème chambre de la cour d’appel de Lyon, le juge Finidori et ses assesseurs, avec une avocate générale excessive, rejugeaient à nouveau Audrey et Cizary, pour l’incendie du local UMP en mai dernier à Villeurbanne.

Retour sur le déroulé de l’audience.

- Rappel des précédents épisodes : en pleine révolte post élections de mai dernier, Audrey et Cizary incendient le local UMP de Villeurbanne à l’aide de cocktail molotov le 8 mai au soir. Trahis par la vidéosurveillance d’une synagogue voisine et dénoncé par un voisin du local, ils seront arrêtés dès le lendemain. En comparution immédiate, ils demandent un report pour pouvoir préparer leur défense. Ils sont alors placés en détention préventive jusqu’au procès qui a eu lieu le 14 juin dernier. À l’issue de ce premier jugement, ils sont condamnés à un an de prison, dont 8 mois avec sursis (donc 4 fermes), à une interdiction des droit civiques pendant un an et à une amende de 17 000 euros. Mais le parquet a fait appel dès la lendemain estimant la sentence pas assez sévère.

C’était donc chez le juge de cour d’appel Finidori (surnommé “Fini de rire”) qu’ Audrey et Cézary ont dû une nouvelle fois se plier au mauvais jeu de la justice. Dans le public, la présence policière n’est pas excessive, on a quand même le droit aux RG habituels. Une des assesseuses rapporte les faits et demande quelques précisions à Audrey et Cizary pour savoir qui avait préparé les cocktails, à quelle heure etc.

- C’est Finidori qui finalement s’engage dans une discussion plus politique avec cette remarque : « après l’élection il y au eu des incidents, nous sommes au courant de part notre expérience professionnelle (sic) que 10 policiers ont été blessés dimanche soir, pourquoi en rajouter ? ». On pourrait opposer aux 10 policiers blessés, les dizaines de manifestants réprimés violemment avec balles de flashball et grenades lacrymo dans la gueule... La perche tendue, les inculpés répondent qu’ils étaient présents aux manifestations de dimanche soir et de lundi soir et que la violence des forces de l’ordre ces soirs là ne les a pas incités à se calmer.

“Fini de rire” demande alors qu’en cas de victoire de « l’autre candidat, qu’auriez vous pensé si des gens aux idées comme les vôtres (sic) mais symétriquement opposées avaient fait la même chose ? » Le juge en va jusqu’à poser des questions de philo de comptoir : « est-ce légitime de protester contre des élections légitimes ? ». « En politique, on a toujours des déceptions, un coup on gagne, un coup on perd, c’est comme dans un match de foot ». C’est peut-être contre cette idée que les deux inculpés voulaient entre autres lutter, que justement la politique, ce n’est pas un match de foot, où le plus dopé gagne, qu’il y a plus de 22 vies en jeux... Mais évidemment il s’agit face à ce juge d’éviter le pire et d’abréger au mieux la torture de l’enfermement, et donc de s’écraser. Les inculpés ne défendront pas leur point de vue politique. Finidori terminera son cours de morale en bafouillant un « l’action c’est bien mais avec la réflexion avant »... Merci Grégoire !

La scène qui suit est celle de la procureure (il me semble qu’il faut dire avocate générale quand il s’agit de la cour d’appel mais le rôle est le même). Rappelez vous votre pire prof, à la voix stridente de sorcière qui part dans les aiguës à chaque envolée et qui s’interrompt entre deux mots, qui se répète, pour mieux s’écouter. C’est ce genre de phénomène qui accuse aujourd’hui. C’est vrai qu’elle est bien rentrée dans son rôle de sévérité que lui a distribué la justice mais elle surjoue, on dirait Jean Lefèvre mais elle va s’avérer être une complice parfaite pour “Fini de Rire.” Sa réquisition dure vingt cinq minutes ; placée sur une estrade, elle surplombe les accusés assis à qui elle fait les gros yeux.

Elle commence par reprendre les faits d ’une jolie manière « le 8 mai à 21h10, deux jeunes (...) au sein de la République française, à un moment majeur de la vie démocratique française (...) vont déranger l’État de droit ». Elle oppose ces deux jeunes aux gentils pompiers, qui éteignent des feux « plus ou moins criminels, plus ou moins naturels » qui font rage dans le sud de l’Europe. Celui qui n’a pas bien entendu pourrait croire qu’Audrey et Cézari sont accusés d’être à l’origine des graves incendies qui ont meurtri la Grèce ces dernières semaines ! Mais il ne rêve pas, la comparaison est là !

Elle continue : « quand on utilise la violence, violence insoutenable pour notre État de droit, pour contester la démocratie, on s’inspire des terroristes ».... Et quant au fait qu’ Audrey soit profondément engagée dans la défense des mal logés et des personnes défavorisées en général, elle veut lui rappeler que « l’humanité commence par le respect de l’homme (et la femme ?), l’humanité commence par le respect primordial des lois (sauf celles qui concernent le droit au logement ?), l’humanité commence par le respect des idées exprimées par le peuple français ! ». Pour elle, il est dommage que « l’être humain [devienne] un vrai mouton noir car la violence est noire ».

Elle s’en prend ensuite à Cizary. Et comme à chaque passage devant la justice depuis le début de cette histoire, on s’interroge : pourquoi cette personnes de nationalité polonaise s’intéresse-t-il à la politique française ? Il a déjà répondu à Finidori qu’il est avant tout citoyen européen, qu’il se réclame même d’un certaine internationale socialiste. On rajoutera que l’harmonisation des politiques européennes permet aux citoyens de lutter d’une même voix contre le pouvoir qui les opprime, qu’il s’appelle Sarkozy ou Kaczynski.

Mais pour notre sorcière, la première valeur de l’Union Européenne, « une valeur naturelle (...), c’est la non violence ». N’en déplaise à tous ceux qui ont subi les répressions sécuritaires d’Athènes à Copenhague en passant par Heiligendam et Paris, sans parler des armées européennes qui tuent aux quatre coins de la planète (en Irak, En cote d’Ivoire, en Afganistan..). Mais ce qui a vraiment « fait froid dans le dos, en tant que magistrate » à la proc’, c’est l’utilisation par Cizary dans une de ces déclarations du mot « cible ». «  N’y a t-il plus d’humain ? » s’interroge-t-elle. Pour le coup la cible n’était pas humaine mais symbolique, un local de l’UMP. Et quant à son dégoût du mot cible, on espère qu’elle va aussi le faire savoir à tous les publicitaires du monde qui ne se cachent pas de parler de cible et non d’humain.

Mais l’avocate générale, même si elle s’interroge « s’il n’y a pas quelque chose derrière ces jeunes » puisqu’on a retrouvé dans leur habitation un « atelier clandestin de hashich » (un pied de beu...) « a senti que la détention avait provoqué une réflexion saine, un électrochoc », c’est pour ça qu’elle demande que la peine initiale soit doublée. En effet elle réclame 2 ans ferme dont 6 avec sursis plus des travaux d’intérêt généraux « car c’est l’intérêt général qui a été touché, c’est la démocratie, c’est l’État de droit ».

- La parole est à la défense. L’avocate d’Audrey rappellera que la jeune fille a jusque là un parcours exemplaire d’altruisme et de dévouement (engagement dans un militantisme légal, aurpès du ministère de la crise du logement), le tout dans la précarité (500 euros de salaire pour un boulot d’assistante d’éducation dans une école), qu’elle a découvert ce que c’était que les conditions de détention, qu’elle a obtenu une liberté conditionnelle et qu’elle travaille pour Habitat et Humanisme, toujours pour aider les personnes en difficulté. Elle a aussi souligné qu’ Audrey a assumé son acte et pris conscience de la gravité dès les premières heures de la garde à vue, qu’elle a écrit au responsable du local, qu’elle a commencé à indemniser l’UMP (qui réclame 17 000 € de dommages et intérêt), qu’elle a assuré qu’elle ne recommencerait pas. Bref l’avocate a rappelé qu’Audrey s’était pliée au sale jeu de la justice, à savoir le repentance, l’indemnisation, le travail, et que la renvoyer en prison aurait des effets néfastes à la fois sur elle mais aussi sur les personnes avec qui elle travaille.

L’avocat de Cizary lui rappellera qu’il est issue d’une famille qui a toujours lutté notamment son père contre le soviétisme en Pologne. Qu’il a vu son père torturé pendant l’état d’urgence en 1981 sous ses yeux alors qu’il n’avait que 5 ans. Cezary est arrivé en France pour travailler depuis deux ans et que malgré sa citoyenneté européenne, malgré ses démarches auprès d’associations comme l’ALPIL, il n’a rencontré que des difficultés pour un accès décent au logement et au travail. Il terminera sa plaidoirie en rappelant à juste titre que le tribunal en 1ère instance avait bien compris la gravité des fait puisqu’ils avaient déjà parlé de terrorisme et qu’il était donc inutile d’alourdir la peine.

- Après plusieurs heures d’attente et de stress, Finidori a annoncé 18 mois de prison dont neuf avec sursis (ce qui veut dire neuf mois de prison ferme) pour l’un et l’autre. Bref, la peine a été doublée. Audrey, qui bénéficiait d’une semi-liberté, va se retrouver incarcérée et doit refaire des démarches auprès d’un juge d’application des peines pour tenter de retrouver une semi-liberté, et si on l’accepte à nouveau à son travail... Voir le détail des peines ici.

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  • Le 9 septembre 2007 à 15:52

    Procès en appel pour une personne qui avait pris du surcis en 1re instance, suite aux manifs « anti-sarko », le mardi 11 septembre à 13h30 devant la 4e chambre de la cour d’appel de Lyon.

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