« Checker les privilèges » ou renverser l’ordre ?

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« Check Your Privilege » : le mot d’ordre est désormais fameux. On trouve même, sur Internet, des tests visant à calculer son niveau précis de privilège — en fonction des remarques que l’on reçoit sur son accent, du logement que l’on occupe, des tentatives de suicide que l’on a ou non commises ou encore de l’existence d’un lieu de culte honorant sa religion dans la ville que l’on habite. On dénombre ainsi un « privilège masculin », un « privilège hétérosexuel », un « privilège de classe », un « beauty privilege » ou bien un « privilège blanc ». C’est ce dernier, mobilisé aux États-Unis depuis les années 1970, qui retient ici l’attention de la sociologue et écrivaine Kaoutar Harchi. Si l’on ne saurait nier, avance-t-elle, toute pertinence théorique à ce concept, son succès académique et militant fait question : il dépolitise les luttes pour l’égalité et se conforme aux attendus de l’individualisme libéral. Car c’est la structure de l’ordre dominant (capitaliste, raciste, sexiste) qu’il s’agit bien plutôt de penser — autrement dit, de démanteler.

Ici, aux États-Unis, une petite fille blonde tient à la main une pancarte : « Privileged. #BlackLivesMatter ». Là, des centaines de personnes blanches se rassemblent et, mains levées, clament en chœur qu’elles renoncent à leur « privilège blanc ». Il y a de quoi sourire, oui. Au même moment, en France, dans une « lettre adressée à ses amis blancs qui ne voient pas où est le problème », l’écrivaine Virginie Despentes, réaffirmant son soutien au combat mené par le Comité Adama Traoré, écrit : « [L]e privilège, c’est avoir le choix d’y penser, ou pas. Je ne peux pas oublier que je suis une femme. Mais je peux oublier que je suis blanche. Ça, c’est être blanche. Y penser, ou ne pas y penser, selon l’humeur. En France, nous ne sommes pas racistes mais je ne connais pas une seule personne noire ou arabe qui ait ce choix. » Décidément, tout cela va trop loin : alors, du Figaro au Monde, d’émissions télévisées en émissions radiophoniques, on pousse des petits cris.

Retour sur un concept

« On dit des Noirs qu’ils sont Noirs par rapport aux Blancs, mais les Blancs sont, tout court. Il n’est d’ailleurs par sûr que les Blancs soient d’une quelconque couleur. » Par ces mots, la sociologue française Colette Guillaumin suggère la nécessité de penser le pendant relationnel de la condition minoritaire, soit la condition majoritaire dite « blanche ». En ce sens, la « blanchité » (de l’anglais « whiteness ») désigne, en sciences sociales, une position sociale dynamique, historiquement produite, et continument traversée par d’autres principes de hiérarchisation — au premier rang desquels la classe et le genre. Elle se caractérise par une perception précise : celle de se croire, en tant qu’individu rattaché à la « condition blanche », irréductible à des stéréotypes fixes et immuables, a fortiori négatifs, tandis que les autres, non-blancs, le seraient — et, de ce fait, le sont.

La suite à lire sur : https://www.revue-ballast.fr/checker-les-privileges-ou-renverser-lordre

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