Lyon : territoire de non-droit en matière d’hébergement

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Nous sommes des professionnels des structures d’urgence sociale du Rhône : lieux d’accueil, hébergements, équipes de rue, dispositifs de soin… Nous travaillons avec des personnes sans abri. Nous adressons une lettre au Préfet de Région car, pour gérer le manque de places d’hébergement sur le département, il a décidé d’en limiter l’accès et d’organiser des remises à la rue régulières.

Communiqué de presse du 29 Octobre 2019 du collectif Hébergement en danger

Nous sommes des professionnels des structures d’urgence sociale du Rhône : lieux d’accueil, hébergements, équipes de rue, dispositifs de soin… Nous travaillons avec des personnes sans abri. Nous adressons ce jour une lettre au Préfet de Région car, pour gérer le manque de places d’hébergement sur le département, il a décidé d’en limiter l’accès et d’organiser des remises à la rue régulières. Il compte sur les associations et les professionnels de l’urgence sociale pour mettre en place un certain nombre de dispositions, uniques en France, tant par leur infamie que leur illégalité. Nous refusons aujourd’hui d’être les complices d’un système hors la loi. Nous ne pourrons pas remettre à la rue un enfant de 366 jours. Nous n’accepterons pas que Lyon devienne le territoire d’une expérimentation ignoble et inhumaine. Nous envoyons donc ce jour cette lettre ouverte au Préfet de Région afin de lui rappeler ses obligations légales et lui demander le retrait immédiat des dispositions annoncées. Alors que les accueils de jour sont saturés, que 1500 personnes contactent le 115 sans obtenir de solution, que les personnes à la rue expriment leur angoisse à l’amorce de l’hiver, que nous ne parvenons plus à faire face, sur le terrain, par manque de moyens, nous regrettons amèrement d’être contraints d’en venir à rédiger une lettre ouverte pour préserver le droit fondamental que constitue le droit à l’hébergement. Nous sommes néanmoins déterminés et nous nous engagerons dans d’autres formes de mobilisations et d’actions si nous n’obtenons pas de réponse à notre demande. Il en va de la dignité humaine et des piliers d’un Etat de droit.

Le Collectif « hébergement en danger »



Monsieur le Préfet de Région,

Nous sommes des professionnels des structures d’urgence sociale du Rhône : lieux d’accueil, hébergements, équipes de rue, dispositifs de soin… et vous adressons cette lettre pour vous informer que nous ne pourrons nous conformer aux nouvelles directives que vous avez données à nos associations pour gérer la pénurie de places d’hébergement. En effet, pour faire face au manque de places d’hébergement d’urgence, vous avez décidé d’en limiter l’accès, comme si des centaines de personnes allaient disparaître comme par magie, comme si nier leur existence constituait une solution à la hauteur de la crise que connait actuellement le secteur de l’hébergement.

Monsieur le Préfet, vous êtes le représentant de l’Etat sur le territoire et vous avez décidé que, désormais, la loi ne s’y appliquerait plus.

« Toute personne en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès à tout moment au dispositif d’hébergement d’urgence » (article L.245-2-2 du Code de l’action sociale et des familles). Dans le Rhône, à partir du 1er Novembre, il faudra être un enfant de moins d’un an, une femme enceinte de plus de 6 mois ou prouver que l’on est atteint d’une maladie grave pour accéder à l’hébergement de manière inconditionnelle.

« Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. » (article L.345-2-3 du Code de l’Action Sociale et des Familles). Dans le Rhône, à partir du 1er Novembre, vous estimez qu’être âgé d’un an et un jour est suffisant pour être remis à la rue d’une structure d’hébergement et dormir dehors. Pour vous, un état de santé qui s’améliore justifie aussi un retour sur le bitume si la personne ne justifie pas de « perspectives d’insertion ».

Monsieur le Préfet de Région, nous, professionnels de l’urgence sociale, sommes à la fois atterrés et indignés par une telle remise en cause des principes d’inconditionnalité et de continuité de l’hébergement. Nous refusons d’acter que le département du Rhône devienne un territoire de non droit en matière d’hébergement. Parce que l’accès aux droits fonde nos professions, parce qu’il relève du bon sens d’appréhender qu’à 2 ans, on est en danger dans la rue, parce que nous ne pourrons pas être les rouages d’une machine à exclure, Monsieur le Préfet, nous vous demandons de revenir immédiatement sur ces annonces. Une femme, dont le mari vient de mourir ne peut pas se retrouver dans la rue parce que le ménage ne présente plus une vulnérabilité en matière de santé. C’est abject.

Notre code de déontologie et le socle de nos professions nous interdisent d’appliquer vos directives. Nos associations n’ont pas pu être entendues lorsqu’elles ont exprimé leur désaccord face à votre décision. Monsieur le Préfet, en tant que professionnels, nous en appelons à la raison, au respect des principes républicains, à savoir les lois. Nous souhaitons que notre énergie soit mobilisée au service des personnes et nous regretterions d’être contraints de faire appel au juge administratif ou au Ministre pour revenir à des fondamentaux qui n’auraient jamais dû être remis en cause.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Préfet de Région, nos respectueuses salutations.

Le Collectif « hébergement en danger »

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