L’administration pénitentiaire innove avec l’incarcération de Salah Abdeslam, « seul terroriste encore vivant des attentats de Paris ». Supermax.be, site spécialisé sur les quartiers d’isolement et les prisons modernes, relaie trois articles de Jean-Yves Nau, auteur du blog « Journalisme et santé publique », sur les conditions inquiétantes de détention du militant de Daech au mépris des recommandations des médecins, notamment sa vidéo-surveillance 24 h/24.
La lutte contre les prisons et l’enfermement a toujours été une des grandes revendications portée par les militant.e.s antiautoritaire.s. Salah Abdeslam, le « seul terroriste encore vivant » des attentats de Paris (130 morts) plus que tout autre fait pourtant partie de cette catégorie d’homme dont personne ou presque n’a envie de défendre les droits. Et pourtant, "grâce" au quasi consensus de toutes et tous à ne pas vouloir s’en soucier, voir à souhaiter pour lui une mort violente, l’état se sert de lui pour faire passer tranquillement de nouvelles lois permettant des conditions de détention « pire que la peine de mort » qui pourront ensuite s’appliquer à toutes et tous les enfermés. S’intéresser à ce sujet sans détourner le regard semble donc obligatoire pour qui souhaite lutter pour une société meilleure.
[...]Caméras 24 heures sur 24
On sait l’importance accordée au témoignage et au procès de ce détenu. « Toutes les mesures de protection et de surveillance seront mises sur cette personne », avait assuré le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas. Mais jusqu’où peut-on aller dans la surveillance d’une personne détenue ? Il y a, bien sûr, les mesures habituelles pour réduire le risque suicidaire (cellules lisses, habits en papier, couvertures indéchirables). Mais l’administration pénitentiaire a ajouté l’installation de deux caméras qui permettent de suivre ce détenu 24 heures sur 24 dans sa cellule de 9 m² du quartier le plus sécurisé de Fleury-Mérogis.
Or cette initiative administrative a été prise sans consultation du médecin-chef de Fleury quant aux conséquences d’un tel dispositif en termes de santé psychique. L’administration pénitentiaire n’a demandé qu’un avis de la CNIL (avis obligatoire du fait de la vidéo). Son collège a statué jeudi dernier et son avis sera rendu public en même temps que l’arrêté qui paraîtra dans les prochains jours. Le Quotidien du Médecin donne la parole à différents spécialistes ou institutions concernées – en commençant par le Dr Serge Tisseron, psychiatre et docteur en psychologie, membre de l’Académie des technologies :
« C’est un scandale. Alors qu’on a perdu tellement de temps sur la déchéance de nationalité, les pouvoirs publics n’ont pas anticipé cette question en sollicitant plus tôt les instances chargées de protéger les personnes contre les utilisations abusives des technologies comme la vidéo. Le droit à l’intimité est un droit essentiel que l’on balaye dans le cas présent, quitte à ce qu’une mesure d’exception devienne une préconisation à long terme. Qu’adviendra-t-il dans le cas d’une peine de perpétuité réelle appliquée avec des caméras branchées en permanence ? C’est un châtiment pire que la peine de mort qui se profile insidieusement. »
Droits humains et suicide
L’OIP (Observatoire international des prisons) n’est pas moins violent. Il dénonce « une vidéo surveillance appliquée en dehors de tout cadre légal en violation des droits humains ». Et qui « renforce le risque de suicide qu’il entend combattre en fragilisant psychologiquement le détenu ». [...]
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