Actualité et mémoire des luttes à Saint-Étienne et ailleurs
ANALYSES ET RÉFLEXIONS FLICAGE - SURVEILLANCE
Publié le 17 mai 2007 | Maj le 23 avril 2020 | 8 compléments

Une France acquise au sarkozisme. Des pistes pour la combattre


Je pense à tous les immigrés avec ou sans-papiers qui se déplaceront la peur au ventre, à ceux qui se demandent s’ils ne feraient pas mieux de faire leurs bagages.

Je pense à tous ceux qui se disent que la France est définitivement un pays de flics, qui voient devant eux les pires années possibles, les risques qu’ils devront prendre ou qu’ils devront éviter.

Je vois les jours à venir, les rues peuplés de ces sarkozistes invisibles, qui se pensaient de droite et s’assumeront peut-être désormais fachos.

Je vois les riches, les jeunes cons et les vieux cons, fiers à d’avoir gagné : on enverra, chez les autres, toutes sortes de flics (police proprement dite mais aussi CAF, ANPE), afin d’apaiser leur haine, on les caressera dans le sens de leurs préjugés, de leur ignorance.

A chaque personne que je croiserais dans les jours à venir, je me demanderais si elle a voté Sarko, comme autrefois je me demandais si ce crâne rasé était un facho, à la différence près qu’il y a 20 millions de ces cons et de ces connes-là en France.

Sarko est arrivé, on s’y attendait depuis longtemps, on avait bien senti une tendance profonde, dans la façon même dont les « problèmes » d’actualités étaient amenés, présentés, dont les discours affichaient de plus en plus ouvertement les opinions les plus obtuses, les plus répressives... comme si celles-ci allaient de soi.

Des têtes biens acquises, du riche au prolo, appâtés par les slogans alignés, les apparitions spectaculaires, les « qualités » d’homme à poigne, de mec-qui-dit-tout-haut-ce-que-Le-Pen-dit-tout haut, d’un personnage si finement usiné, pensé, travaillé.

Qu’on ne me parle pas de notre démocratie comme si elle était le lieu de l’expression de toutes les opinions. Miser sur les affects, le ressentiment pour établir des vérités, tel a été la stratégie de Sarkozy. Dans ce cadre, notre régime est apparu clairement pour ce qu’il est essentiellement : un système de gestion et de réorientation de ces affects.

Le travail de Sarkozy a consisté à empêcher toute identification du smicard avec le érémiste, du gentil français avec le sans-papier, du gentil jeune avec le méchant lascar. Il fallait faire aboutir l’isolement de chacun sur la haine de l’autre, faire reposer la responsabilité de sa propre vie sur la présence de « parasites » et créer des liens aussi dangereux qu’improbables : si, moi ouvrier je fais ce boulot de merde, c’est pour payer les érémistes, loger les sans-papiers et les glandeurs de la fonction publique ; si, moi, artisan, je suis dans la merde, c’est à cause des profiteurs, etc... Miser sur la sale vie des gens, sur leur sentiment de bosser pour rien et sur leurs peurs, tel a été le pari de Sarko pour s’attirer les électeurs du front national... sachant ses électeurs traditionnels déjà acquis.

Pour devenir celui qui répondrait à leurs attentes, Sarko a contribué à créer des étrangers, des ennemis intérieurs : le « clandestin », le « casseur », l’ « intégriste », le « profiteur », le « jeune de banlieue », le « gréviste », le « multirécidiviste ».
Contre ces figures, il a proposé de s’unir à l’opinion, s’unir dans une opposition proprement viscérale : l’incapacité à s’identifier doit s’inscrire dans le corps dans la perception que l’on a de soi, pour pouvoir être stimulée à la moindre évocation de l’un de ces termes.

Ce qui s’élabore sous nos yeux est la communauté du pire. Une « nation » réinstituée sur de multiples mensonges.

Où est passée la France qui se moquait des flics passant leur journée à boire au bar du coin ? Celle qui tentait de bosser le moins possible pour se garder du bon temps ? Celle qui avait le sang de la colonisation sur les mains et la haine de la guerre ? Celle de la solidarité de quartier et de l’opposition à l’Etat ?

Aujourd’hui, c’est « l’Etat c’est nous », les flics « qui font leur travail », « la France au travail » et « la colonisation française fut la plus humaine de tous ». Après le saccage de la mémoire de 68 (lisez à ce propos Mai 68 et ses vies ultérieures de Kristin Ross), il ne reste plus qu’à réhabiliter Pétain et la saine attitude des français à l’époque pour que la boucle soit bouclée.

Un pas a été franchi hier, les urnes ont légitimé des insanités qu’il aurait été impossible de dire il y a 30 ans, ont consacré les propos les pires comme des vérités, ont permis à la France la pire de renaître de ses cendres, une France droitisée, fière de sa haine, fière de la petitesse de ses pensées et de son « bon sens » étriquée, une France du rejet qui « intégrera » à coups de trique s’il le faut.

Reste la question : comment combattre cette France-là  ?

Les mots, les enquêtes, les chiffres n’y suffiront hélas pas, les bagarres avec les flics non plus. Pour l’instant, nous devons nous compter, établir les liens que l’on croyait jusque là impossible, nous trouver des bases de replis, penser à des stratégies multiples, convergentes, occuper, bloquer ce qui peut l’être.
Beaucoup parlent d’unité - comme d’ailleurs Sarko - mais méfions-nous : si l’antisarkozisme est un antifascisme, il porte en lui les mêmes limites que ce dernier.

Ce n’est pas une gauche une énième fois modernisée qui nous apportera le salut... une gauche qui semble accepter sa défaite « démocratique » alors que se dresse en face d’elle un danger jamais vu depuis 60 ans.
Une gauche sans doute aveuglée par ses propres propos, qui se sont eux aussi plus que jamais droitisés.

La LCR, les MJS et leurs alter egos syndicaux vont vouloir organiser à nouveau la « résistance » des citoyens solitaires et « conscients », vont mettre des foules dans les rues, organiser des rassemblements symboliques pour dire « non », etc.

On sait d’expérience le peu d’espoir que nous pouvons fonder sur ce type de mobilisation, mais nous pressentons aussi comment gagner des forces, sur quoi nous fonder : nos amis et nos proches.

Nous allons avoir besoin de tenir sur le long terme et de trouver les moyens de nous ressourcer, besoin de moyens alternatifs de nous coordonner, de nous passer les infos (radio peut-être, écrit, « téléphone rouge » d’alerte, etc.).

Il nous faudra tenter d’occuper le plus de lieux possibles, des lieux qui pourraient nous rester accessibles : facs, lycées, maison de quartier, faire que dans des quartiers entiers on montre que l’on n’accepte pas que Sarkozy règne en maître.

Voilà , c’est tout, ce n’est rien, juste des pistes : certaines choses sont sûres en tout cas : nous allons devoir faire gaffe aux RG (téléphone mobile, etc), apprendre à réagir quand certains sont en train de se faire choper pour les libérer, apprendre à passer inaperçu quand il le faut, à trouver les bonnes stratégies pour éviter toute récupération et tout dénigrement... Ce qui n’est pas une mince affaire.

Salut à tou-te-s


Proposé par mario
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8 compléments

  • Réponse à l’auteur du post daté du 23 mai 14:17.

    A qui est destinée cette réponse ? Tu parles comme si tu connaissais la personne.
    Essayer au moins de mettre un pseudo qu’on comprennent qui parle à qui. Merci.

  • parler de manipulation quand on entend certaines de tes idées... « Dictateur » ou « fasciste » quand tes parents ou tes grands parents ont eux connu la guerre, et savent ce que c’est un dictateur ou un fasciste. Se rallier à la cause libertaire quand les étendards sont brandis par des artistes « militant » qui ne sont là que pour la thune. Un peu comme de l’autre coté, d’ailleurs. Voir les principes anarcho défendus par de jeunes et jolis étudiants dont les cursus et les choix d’orientations ne laissent présager que de magnifiques retournements de vestes dès lors qu’ils auront accédé à la propriété et se seront inclus dans le système, comme les autres. Ramener sa fraise et donner des leçons, comme de bons petits juges, sans aucun vécu. S’imaginer une légitimité dans son discours quand tout dans son mode de vie se calque sur ce que l’on dénonce, ses caprices, ses intolérances, ses démagogies, et ses violences. S’estimer plus malin, plus brillant, plus courageux que les autres. Chier sur l’autre, celui qui ne pense pas comme toi, mais qui est calme. Mais la boucler, aussi, quand l’autre te fais peur.
    Tu espères quoi, en somme ? Changer le monde avant de devenir fonctionnaire. La violence qui a fait élire Sarkozy n’est pas celle de ses électeurs, ni celle des flics. Restent aussi ceux que l’on entend pas, ceux qui morflent, que tu traites de cons. Pas nés du bon coté, ni dans le bon quartier, pas assez comme si, ou un peu trop comme ça.
    Ton discours est puant, vide de sens, comme celui de ceux que tu dénonces. Et ta haine gratuite, comme celle de ceux à qui l’ont doit le résultat de ces élections.

  • Pour le post insultant envers les « gauchistes révolutionnaires », il est vrai qu’on n’est pas sur les forums de type France 2, ou les frontistes et autres viennent faire de la provoque.
    A voir.

  • Je voudrais vous suggérer la lecture de livres qui dressent des constats clairs et lucides et surtout offrent des moyens de solutions, par notre volonté d’être humains et d’êtres ensembles.
    Joël de Rosnay : Scénarios 202 et L’homme symbiotique
    http://csiweb2.cite-sciences.fr/derosnay/articles/livres.html
    Jacques Robin et Laurence Baranski : L’urgence de la métamorphose
    http://www.desideesetdeshommes.com/ouvrage,18/lurgence-de-la-metamorphose.html

    Bonne lecture à tous,
    Stéphanie

  • pourquoi des gens comme ca peuvent-ils utiliser le num.zero ? Ce média est à nous, alors que son genre de discours merdique occupe deja les médias classiques. C’est un plan à la « c’est la démocratie tout le monde peut s’exprimer » ?

  • Alors vas-y, si tu n’es pas un facho, ni un con, pourquoi as-tu voter Sarko ? On peut encore espérer que tu ne sois qu’un simple mouton égaré, qui s’est fait manipulé, qui n’a rien compris à la vie qui l’attend désormais, lui ou ses concitoyens, si tu es pauvre ; un enfoiré de riche qui ne pense qu’à sa gueule (comme beaucoup) sinon.

    Oui nous avons la haine contre ceux qui ont élu cet homme que nous considérons comme dangereux. La solidarité a tant sombré que 20 millions de personnes viennent d’imposer à leurs concitoyens de laisser leurs vies être guidées par un homme qui n’aspire qu’à la répression et à la division du peuple.
    Tu parles de propagande, mais tu es bien mal placé pour cela. Je ne considère pas ce texte comme de la propagande car c’est un texte de gauche, exprimant des pensées de gauche, et on le sait très bien. Mais toi, tu as cru aux paroles d’un espèce de populiste-démagogue, et à sa propagande réelle, suivant des techniques similaires à celle des grands dictateurs du 20° siècle : chiffres faussés, livres censurés...
    Tu t’es laissé hypnotiser, mais pour la « France qui se lève tôt », c’est l’heure de se réveiller.
    Jamais nous accepterons de subir sa répression, jamais nous n’accepterons d’être fichés, jamais nous n’accepterons que n’importe quel flic puisse connaître notre vie privée comme il le sent (nos déplacement sur les enregistrements de vidéo-surveillance, les emails que nous avons envoyés et reçus, de même de les appels...), jamais nous n’accepterons que des hommes, des femmes et des enfants se fassent rafler et expulser dans le plus grand secret, alors que la télé tentera de nous rassurer en nous disant, aidée de chiffres truqués, que le chomage et la délinquance ont baissé, que l’on peut remercié notre cher président...
    Il y a encore beaucoup de choses que nous n’accepterons jamais, mais le temps me manque, et de toute manière, je crains de ne pas pouvoir te convaincre, le culte de Sarkozy est déjà en marche et son effet néfaste se fait déjà ressentir.

    Mais sache que essayer de nous descendre dans des emails ne servira à rien, tu peux toujours continuer dans le vent.

    5 ans de mandat, 5 ans de lutte, la résignation est un suicide quotidien.

  • Votre texte truffé de haine et de propagande gauchiste révolutionnaire ne vous ménera pas très loin si ce n’est dans un mur.

    Arrêtez d’insulter les gens qui ont voté Sarkozy. Nous ne sommes pas tous des cons ou des fachos. Votre discours simpliste est à l’image de la petitesse de votre pensée.

    Bien cordialement,
    Un électeur et militant Sarkozyste refusant d’être traité de facho ou de con.

  • La gauche et de la droite se complètent mais ne s’opposent pas : la gauche fait passer des lois qui sont acceptées parce que c’est la gauche. De même me, elle tient et laisse dire des propos avorables à l’exploitation des hommes et de la nature qui sont ressentis comme légitimes car c’est la gauche (même des propos racistes et sexistes). Elle fait le boulot que la droite ne peut pas faire car elle donne bonne conscience (comme le catholicisme). Elle soumet les esprits à l’exploitation et au facisme (délation génralisée). Bourdieu dit que « les dominés deviennent complices de leur domination. » C’est la force du capitalisme.

    La gauche, c’est aussi : sortie de Papon, loi LSQ, violence physique et symbolique du gouvernement socialiste face aux grévistes de la faim sans-papiers : légaliser la situation des leaders, violences symbolique et physique de la part des institutions dont témoignent de nombreux militants présents dans la lutte, aucune réaction quand aux lois Perben...

    Je vois pas en quoi la gauche me permet d’expérimenter la liberté et l’amour inconditionnel.

    Au boulot, certains de mes collègues qui ont voté Sarko tiennent des propos de droite, anti 68 et anti gens qui ont une couleur de peau non dominante. Mais concrètement, ils partagent les tâches et défendent les personnes qui ont une couleur de peau non dominante. A contrario, certains colllègues qui ont voté extrême gauche au 1er tour ont des pratiques très peu démocratiques : hypocrisie, abus de pouvoir ou d’autorité, tire-au-flanc.

    Plutôt que de stigmatiser les gens autour d’un clivage fondé sur un simulacre de démocratie, je préfère expérimenter la liberté, l’interdépendance. Nous avons été conditionnés pour avoir peur de la liberté. Avoir une pensée dominante est plus facile : on se sent légitimes. Et être soi, c’est expérimenter la vie. Chaque jour, la liberté s’impose par des actes individuels et collectifs.

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