ANPE : les chômeurs au rouleau compresseur

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Pour éprouver ce que « la baisse du nombre de demandeurs d’emploi » affiché dans les médias dominants implique pour le demandeur d’emploi dans les agences ANPE, je vous livre un entretien vécu avec un conseiller ANPE, à l’occasion de mon passage au Contrôle Mensuel.
FORUM en fin d’article.

Concernant le nombre d’offre d’emploi pour un métier de journaliste débutant, le chiffre est stable depuis mon inscription sur la liste des demandeurs d’emploi en novembre 2004 : il est tout le temps resté nul.

Pour éprouver ce que « la baisse du nombre de demandeurs d’emploi » affiché dans les médias dominants implique pour le demandeur d’emploi dans les agences ANPE, je vous livre un entretien vécu avec un conseiller ANPE, à l’occasion de mon passage au Contrôle Mensuel [1].

Conseillère ANPE - Vous ne bénéficiez plus de l’Aide au Retour à l’ Emploi depuis le 1er septembre, dorénavant vous avez tout intérêt à ne plus être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi.
Demandeur d’Emploi - Euh non...j’aimerais rester inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi, c’est important pour moi.
C.A. - Pour l’ANPE, il est parfois problématique de conserver des demandeurs d’emploi qui bien souvent se contentent de répondre par courrier à une annonce et ne se présentent finalement pas aux entretiens ; les employeurs sont mécontents de ces rendez vous manqués et l’ANPE n’est pas conçue pour fonctionner comme ça.
D.E. - Ca n’est pas mon cas et la situation ne s’est jamais présentée. Si je trouve une annonce proposant une activité correctement rémunérée, correspondant à mes aspirations et mes compétences, j’irai au rendez-vous.
C.A. - Vous avez raison, il n’y a pas d’offre d’emploi dans votre domaine d’activité et l’ANPE ne s’occupe pas vraiment du secteur média ; vous savez et nous le savons aussi que ce sont essentiellement les réseaux de connaissance qui permettent l’embauche dans ce secteur. Ca ne vous sert donc à rien de rester demandeur d’emploi ; d’autant plus que vous exercez déjà des activités. Comprenez bien comment fonctionne l’ANPE : il y’ a des personnes qui exercent une activité ou un emploi la journée et qui viennent consulter les offres d’emploi le soir à la sortie de leur travail : ils ne sont pas pour autant inscrits comme demandeur d’emploi.
D.E. - Oui oui, mais mes activités à moi sont bénévoles et je suis à la recherche d’un travail rémunéré, je suis demandeur d’emploi, je propose régulièrement mes écrits à plusieurs médias.
...
C.A. - Il y’a beaucoup de demandeurs d’emploi qui veulent conserver ce statut pour profiter des aides qui l’accompagne ; profiter des tarifs réduits pour la carte de transport, par exemple.
D.E. -... Etre demandeur d’emploi ne me permet pas de bénéficier d’un tarif aidé : pour la carte de transport, il faut aussi justifier d’un revenu mensuel inférieur à 600€, ce qui n’est pas mon cas.
C.A. - Vous savez que ne plus être inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi vous permettrait quand même de profiter des avantages de l’ANPE : l’accès au service de téléphone gratuit, de photocopies gratuites, l’accès aux offres d’emploi, aux conseillers, sans subir les inconvénients de l’inscription c’est à dire les contrôles mensuels. Vous seriez un « demandeur d’emploi autonome ».
D.E. - Je crois que si je n’étais plus inscrit comme demandeur d’emploi j’aurais le sentiment d’être exclu...je ne le souhaite pas.
C.A. - Vous ne comprenez pas monsieur, l’ANPE c’est un service public : comme à la poste vous pouvez venir chercher ce dont vous avez besoin, les offres d’emploi, les services fournis par l’agence et ce en toute autonomie ; vous seriez un demandeur d’emploi AUTONOME.
...
D.E. - je ne trouve pas ça cohérent : si je suis demandeur d’emploi c’est que je suis à la recherche d’un emploi, alors pourquoi me supprimer de la liste des demandeurs d’emploi ?
C.A. - Vous ne comprenez pas le processus...Bon...le seul moyen, pour vous, si vous souhaitez rester demandeur d’emploi c’est de faire des démarches tel qu’un bilan de compétences ou une formation.
D.E. - Une formation ? Pourquoi pas...Quelle type de formation ?

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Ouf !

L’objectif affiché de ce rendez vous était de me faire disparaitre de la liste des demandeurs d’emploi.

Cela aurait permis a l’employé ANPE de toucher une prime en fin d’année et de se faire féliciter par son directeur d’agence ; lui aussi touche une prime, mais mensuelle, pour atteindre les objectifs fixés par le gouvernement : rayer les faire baisser le nombre des demandeurs d’emploi.

Objectif à réaliser par n’importe quel moyen et quelles qu’en soient les conséquences.

Au final j’ai bien fait de m’accrocher à mon inscription comme demandeur d’emploi puisque c’est une condition indispensable pour bénéficier de l’Allocation Spécifique de Solidarité qui, financièrement parlant, prend à moitié le relais de l’ARE* lorsque celle-ci s’arrête.

Comment font les autres demandeurs quand ils sont installés dans le siège éjectable qui se situe devant le bureau de ce contrôleur ANPE ? Combien se font rayer suite à cet argumentaire-choc pour « devenir autonome » et ne plus « dépendre » de l’ANPE, des ASSEDIC (mais seulement de l’aumône des passants ) ?

Chômeurs, bataillons ferme pour rester inscrit sur les listes des demandeurs d’emploi en savourant la pensée qu’on fait chier le gouvernement et ses chiens de garde.

Notes

[1Passage au Contrôle Mensuel : à l’épuisement de mes droits à l’Aide au Retour à l’Emploi qui m’octroyait 800 euros mensuels jusqu’en septembre 2006, l’Aide Spécifique de Solidarité a pris le relais et m’octroie 450 euros mensuels et le Contrôle Mensuel de mon frétillement à trouver un emploi.

  • Le 1er février 2007 à 11:29, par riezebos, ellen

    le 1-2-2007
    Merci pour vos explications M. Moulin. Je ne suis pas française ,je travaille depuis quelques années dans des usines en Bretagne, ouvrière ou cariste. Je trouve la situation de +en+effrayante pour les travailleurs. A l’usine on vous fait bien comprendre qu’il faut tout gober en tant qu’intérimaire parce que « dehors il y a du chômage »(heures sup. pas payées, pause de 20 min.impossible à prendre, mépris ou petites crasses pour rigoler des « permanents » ,etc). Arrive le harcèlement des ANPE qui sont myopes et souvent vous donne des info mensongères (telle usine est très ergonomique (suite à une opération d’hernie discale) et vous devez pousser des charriots de 300 kg avec roues grippées ,un toutes les 5 min pendant 8 heures, avec caméras de surveillance en prime)
    Comme je ne suis pas d’ici, je vais ammener mon ami, français, à l’étranger avec moi, et on regardera tout ça de très loin grâce au satellite !
    Des fois on rencontre des gens de l’ANPE qui y croient et font des efforts pour aider quelqu’un , je dirai qu’il doit y avoir un maximum deux par agence.
    Cordialement, E. Riezebos

  • Le 27 janvier 2007 à 09:41

    Tous mes compliments à la personne qui a publié cet article concernant la ténacité de l’ANPE à supprimer un demandeur d’emploi de ses listes, ordre émanant du ministère du travail et répondant, bien entendu à la folie furieuse de Sarkozy. Que ce soit les statitisques de l’ANPE, de la police, de la Sécurité sociale, des finances de l’état : tout est falsifié et trafiqué et le seul but est de pouvoir ficher toutes les personnes demandant ou appartenant à des groupes ou des associations considérées comme « dangereuses », sans parler de l’appui inconditionnel de certains médias à l’égard du gouvernement.

    En résumé, si vous aves affaire à un organisme, qu’il soit d’état ou privé, mais à plus forte raison s’il est d’état, soyez en alerte dès que l’on vous recommande de renoncer à vos actions, c’est très probablement parce que cela arrange les statistiques. Un dernier petit exemple : j’habite en proche banlieue
    parisienne mais je suis éloigné de mon central téléphonique. J’ai demandé l’ADSL à plusieurs reprises et à plusieurs fournisseurs depuis plusieurs années, lesquels m’ont diversement répondu : impossible, possible sous conditions de changement de central. Ces démarches ont duré plus d’un an et j’ai fini par m’adresser à 9 télécom qui m’a envoyé un modem inutile et a essayé de me fecturer des frais pendant près de 3 mois. Lassé par ces démarches, je me suis adressé au fameux fournisseur historique qu’est France télécom où je me suis entendu répondre : vous n’aviez qu’à passer par nos services directement au lieu de vous adresser à la concurrence, maintenant débrouillez-vous seul. Tout cela, bien sûr sous le sceau de l’anonymat car les agences de FT en banlieue pour le moins, sont virtuelles et joignables exclusivement par téléphone et il existe encore des salariés de FT qui refusent de s’identifier. Bref, pour faire court, je ne me suis pas donné pour vaincu et j’ai alors saisi le tribunal d’instance de mon lieu de résidence avec copie au maire de la ville - que j’avais déjà essayé de contacter antérieurement et n’a jamais répondu à mes courriers - UMP oblige. Un mois plus tard, j’ai reçu une citation au commissariat de police , j’ai du me déplacer car pas de renseignements par téléphone pour apprendre qu’à la demande du maire de la ville, on a essayé de m’expliquer que ma demande devait d’abord passer par une association de consommateurs, ce que j’avais déjà fait sans résultat, et que le tribunal d’instance n’acceptait pas ma demande.
    Voila comment la police fait ingérence dans un domaine de la justice pour lequel elle n’a aucune compétence et voilà comment on fausse les statistiques, on ouvre le parapluie des responsabilités : c’est pas moi, c’est lui et on fait baisser le nombre des plaintes. c’est aussi comme cela qu’on fait augmenter l’injustice sociale, qu’on met la pression avec pour résultats des mouvements sociaux de plus en plus violents et importants dont on trafiquera le nombre de participants et voila comment une simple demande de services est en cours devant la cour européenne , section consommation, sans aucun espoir de ma par que cela aboutira.

  • Le 16 janvier 2007 à 16:44, par ernertcharles10

    20 ans de chomage j"ais 50 ans recore a battre controle mensuel tapper du poing sur la table accepter un mi temp egale 500 e plus ass 440e =940e 12 mois=prime de retour a l’emploie =1000e c’est une loie pour les plus de 50 ans j’usqua la retraite ne vous laisser pas faire a la façon jean gabin tout le monde a droit a ca prime non ? voter bien

  • Le 24 novembre 2006 à 15:22, par chômeurchronique

    Venez donc faire un tour sur un site qui règle passablement son compte à l’ANPE et à ses miliciens, lesquels sont certainement des martyrs, victimes de ce terrible choix : être chômeur ou être un salaud, comme d’autres en leur temps avaient à choisir entre résistant ou collabo.

    http://precaires.free.fr

    « Exclusivement »

  • Le 3 novembre 2006 à 19:04, par El picador

    Article très instructif, merci ! Jolie illustration aussi (de qui ?).

    J’aime bien aussi ceux-là dans le genre :

    http://timeodanaosetdonaferentes.over-blog.com/10-archive-10-2006.html

    http://timeodanaosetdonaferentes.over-blog.com/article-4200240.html

  • Le 26 octobre 2006 à 23:51, par jean moulin

    Juste un petit commentaire à votre reportage que je trouve très juste et effrayant même si moi même je suis conseiller ANPE (mais néanmoins syndicaliste à SUD !) § la dérive de cette collègue n’est malheureusement pas isolée et la batterie de procédures et dispositifs visant à faire baisser artificiellement les chiffres des chômeurs inscrits est impressionnante. je ne reviendrai pas sur l’arme absolue que constitue les changements de catégories ( il y en a 8 et quand on sait que seule la catégorie 1 est annoncée comme baromètre officielle , on imagine facilement les enjeux de faire basculer les chômeurs dans les 7 autres catégories / cf l’excellent témoignage de Fabienne Brutus sur les trucages des chiffres du chômage officiel).

    je voudrais juste vous décrire succinctement la dernière née des armes de destruction massive des chômeurs : le recours à des opérateurs privés par les Assedics. Il ne s’agit pas ici du recours malheureusement généralisé à des sous traitants pour réaliser toute une série de prestations pour le compte de l’ANPE. Non, il s’agit de mettre en concurence directe le privé et le public.

    Le jeu consiste à sélectionner et segmenter les demandeurs d’emploi en fonction de leur soit-disant « distance à l’emploi » appréciée suivant une série complexe de paramètres tous plus discutables les uns que les autres. (NB :Quand l’Unedic a commencé à mettre au point cette méthode , ils l’ont appelé le « profilage » des chômeurs , terme rapidement abandonné en raison de sa connotation trop « serial killer ». ) Ensuite , une fois le tri opéré entre les « plus employables » et les « moins employables » (il devrait y avoir jusqu’à 5 sous groupe ainsi artificiellement créés), l’Unedic va affecter certains des demandeurs d’emploi dont la « distance à l’emploi » est soit disant la plus grande à des « opérateurs privés » qui seront grassement payés pour les placer. La prime versée à ces organismes (souvent des boites d’interim ou des cabinets de reclassement) est d’autant plus élevée que la « sortie » emploi sera importante. Inutile de sortir de polytechnique, pour comprendre que l’intérêt marchand de ces opérateurs sera de placer « à tout prix » ces demandeurs d’emploi sur n’importe quel emploi , quel qu’en soit la qualité, le lien avec le projet de vie ou la situation de famille, la rémunération ,les conditions de travail ou l’éloignement géographique...

    Mais, l’ANPE ne veut pas se faire doubler par la droite par ces Opérateurs Privés (qui ont l’habitude de présenter leurs maigres résultats avec tous les artifices pour les rendre présentables) . Aussi, la Direction Générale n’a rien trouvé de mieux que de créer des équipes spécialisées composés d’agents triés sur le volet pour leur « efficacité » ( !!! ) en terme de placement , et qui vont intervenir comme les Opérateurs Privés sur des « cohortes » (terme offciel !) de chômeurs pour prouver que le Service Public peut faire mieux et en plus - last but not least - moins cher ! Le nom des ces « commandos » ne s’invente pas : Cap vers l’Entreprise !!!!
    Inutile là aussi de faire preuve d’imagination pour comprendre que ces équipes de choc ANPE auront une pression maximum pour faire du « résultat » en terme de placement « à tout prix ». Bonjour les pressions , les chantages et les inévitables sanctions sur les demandeurs d’emploi sélectionnés qui ne voudront pas faire ce qu’on leur demande.

    Et pour remplacer ces super agents (les « meilleurs d’entre nous » !!!) dans les agences locales , la direction prévoit sereinement de recourir à des CDD !! Ainsi, le taux d’agents en situation de précarité à l’Agence Nationale POUR l’Emploi (temporaires, CDD, contrats avenir, CAE etc...) pourra bientôt allègrement dépasser les 16% , taux moyen dèjà très élevé dans la fonction publique.

    Pour celles et ceux qui ne suivraient pas le raisonnement et la logique, il est important de préciser que le degré de résistance d’un agent à des injonctions de la hiérarchie de l’ANPE pour faire du chiffre, radier, enregistrer n’importe quelle offre etc... est d’autant plus faible que l’on est en situation précaire. Donc, plus de précarité dans le personnel ANPE veut aussi dire plus de pressions sur les chômeurs ... CQFD

  • Le 26 octobre 2006 à 21:44, par Camille

    Un article bien intéressant sur actuchomage.org

    Après les propos de Fillon prétendant que l’on travaillait beaucoup plus dans les autres pays qu’en France, Actuchômage rectifie les choses en montrant que l’on travaille en réalité moins ou autant qu’en France dans les pays cités.

    Car il ne faut pas se fier aux apparences de la durée officielle des emplois à plein temps, mais voir quel est le nombre d’heures réellemnt travaillé, en tenant compte des emplois à temps partiel, parfois de très faible durée et en proportion beaucoup plus grande qu’en France.

    Ainsi, les Britanniques ne travaillent pas 33% de plus que nous mais 11,8% de moins que nous sur la semaine et 10,6 % de moins sur l’année ... les Danois ne travaillent pas 27% de plus que les Français, mais 5,5% de moins ... les Espagnols ne travaillent pas 20% de plus que nous, mais 4% de moins ...

    En France, la durée réelle du travail n’est pas de 35 heures par semaine mais de 39 heures pour l’emploi à temps complet, ou de 36,3 heures en moyenne pour l’ensemble des emplois (temps complet et temps partiel). En effet, la durée moyenne des emplois à temps partiel est de 23,2 heures et ceux-ci représentent 17,2% de l’emploi total (contre 25,5% en Angleterre).

    Voir cet article Les Français sont-ils paresseux ?
    qui renvoie à des dossiers bien documentés et à des sources officielles.

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