Julien poussé au suicide dans la prison des mineurs de Meyzieu

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« Julien, 16 ans depuis septembre, est né d’un père qui s’appelait Mohamed mais a changé pour Sébastien, et d’une mère fragile, partie lorsque l’enfant avait huit mois. »
Cet extrait d’un texte qui circule sur de nombreux sites internet est issu d’un blog de surveillants non officiel, comme ils disent. Nous tenterons de contrer la campagne de diffamation contre les proches de julien. Le Collectif Solidarité Prisonniers ne supporte pas la calomnie.

« Ils ont laissé mourir Julien »

“La tradition des opprimés nous enseigne que « l’état d’exception » dans lequel nous vivons est la règle.”
Walter Benjamin

“Le totalitarisme moderne peut être défini comme l’instauration au moyen de l’état d’exception d’une guerre civile légale qui permet l’élimination physique non seulement des adversaires politiques, mais de toutes les catégories de citoyens qui, pour une raison ou une autre, ne sont pas intégrables dans le système politique.”
Giorgio Agamben

Dans un petit livre d’une grande importance pour comprendre l’époque actuelle, le philosophe italien Giorgio Agamben analyse la figure paradoxale et inquiétante de « l’état d’exception ».

Trait typique du nazisme, « l’état d’exception » est la réponse violente des pouvoirs constitués aux conflits extrêmes, l’espace vide qui marque la suspension du système juridique et de la relation habituelle entre norme et autorité. Agamben le définit comme une frange d’indétermination où s’évanouissent les différences traditionnelles entre démocratie, absolutisme et dictature ; la brèche par laquelle se glisse la barbarie. Loin de disparaître avec la défaite des totalitarismes classiques, l’état d’exception s’insinue à la fin du XXème siècle comme paradigme du pouvoir, en arrivant aujourd’hui à sa plus grande extension planétaire. Partout, la violence gouvernementale peut enfin ignorer le droit international et ses aspects normatifs dans une totale impunité.

Julien, un jeune lascar de Montélimar, s’est pendu dans une cellule de la prison des mineurs de Meyzieu, dans la banlieue est de Lyon le samedi 2 février 2008. La presse locale donne, après coup, une large place à l’événement. Surprise ? Non !

Pour que la campagne médiatique fonctionne - la prison doit faire peur- il faut que tout ce qui compte dans le champ politique (médias, gauchistes, partis institutionnels) participent à leur manière.

Concernant les médias, il suffit de lire tous les jours la presse locale (Daubé , l’Impartial, La Tribune de Montélimar, et les diverses feuilles d’infos locales du département ) pour apercevoir l’intérêt des médias pour des faits divers sur-représentés par rapport à des événements significatifs de faits politiques et sociaux (grèves, mouvements sociaux, etc...) ; ce qui a pour conséquence d’entretenir un climat de psychose générale.

Les juges pour enfants et les éducateurs de la PJJ font même de la promo pour leurs tapins dans le Daubé ’’Privilégier l’éducatif au répressif’’’.

Dati, la ministresse, fait tout pour justifier cette prison de mineurs de Meyzieu à moins d’une semaine de la mort de Julien : « L’établissement est adapté aux nouvelles formes de délinquance », en plaçant sous un angle pédagogique la mise en avant des activités proposées, devant être considérés comme une chance pour les jeunes.
Que propose t’elle pour mieux fourguer sa daube ?
Ces établissements font intervenir des acteurs de plusieurs administrations :
- l’administration pénitentiaire par la présence de matons ;
- l’éducation nationale par les professeurs ;
- la PJJ par la présence d’éducateurs (qui ont refusé d’ailleurs de travailler au sein de la prison de mineurs de Meyzieu).

« Ce n’est pas vraiment une prison répressive mais une prison de réinsertion. La réinsertion, c’est redonner la paix de l’esprit à ces jeunes, leur redonner des repères et des ambitions. » Pascal Clément, Garde des Sceaux sous Villepin, 9 Mars 2007.

Qu’est-ce qu’on en pense ?

Cette institution a aussi pour but de soumettre de force les corps et les esprits à un degré toujours plus élevé. L’État a appris le façonnage des esprits avec la formation militaire (divers stages commando). Dans les "Centres Éducatifs Renforcés" (CER) et les Centres Éducatifs Fermés (CEF) des stages sportifs extrêmes ont donné des bilans / pistes de travail. On reviendrait ainsi à la très veille notion des bataillons disciplinaires d’Afrique. Notons le choix fait d’un encadrement mixte matons/éducastreurs qui place la détention au cœur du dispositif, rendant ainsi caduque la présentation officielle "éducative" de ces prisons.
Pour parfaire l’image de ces établissements pédagogiques, l’administration a organisé des matchs de foot pour consolider les liens entre matons et éducastreurs (l’esprit d’équipe). Tout de même chaque activité dans les EPM est encadrée par des matons.

Des instances répressives nécessaires au maintien de l’ordre établi.

Ces deux formes de réponse, l’enfermement psychologisant et carcéral, marquent le refus de cette société d’être mise en jeu, et par leur existence, limitent les velléités de remise en cause. Elles permettent de ne jamais lire la violence de l’enfant à la lumière de la violence de l’autorité, ni son hyperactivité à celle de son manque d’espace et de dépense d’énergie. Exception faite de leur caractère illégal, que représente le deal ou le vol à l’étalage en comparaison des ponctions financières orchestrées par ceux qui sont au pouvoir ?

Comment aborder la question des déviances sexuelles, sans interroger l’image véhiculée des hommes et des femmes et les frustrations collectives ?

Pour susciter l’adhésion, cette éducation sociale a besoin de reposer sur des liants abstraits, ceux de la démocratie et des particularismes locaux, maintenus par l’ethnicisation et par la peur de l’ avenir (cf les grèves lycéennes du 14 – 15 février à Romans et Montélimar : mot d’ordre ’’non aux suppressions de postes’’ ).

La pub de la PJJ en dit long sur son arrogance. “L’an dernier, plus de 1.700 mineurs du département de la Drôme ont été pris en charge dans le cadre de la protection judiciaire de l’enfance en danger...DL 16 février, évitant soigneusement toute réflexion politique [1].

Nous proposons une piste

La restructuration capitaliste et sa logique de précarisation des emplois ont fait exploser les structures sociales. Un recours à l’État est nécessaire pour faire face à la situation de paupérisation grandissante des exploités, avec ses travailleurs sociaux qui fonctionnent comme des ONG dans des zones de guerre.

Personne ne songe désormais à arracher quelque chose pour faire fonctionner la société des personnes différemment, comme dans les vieux idéaux d’émancipation ; ne laissons personne gérer nos vies, surtout pas notre colère. Il nous reste d’inventer des formes d’auto organisation pour ne pas subir la guerre qu’ils nous ont déclarée.

Fermons les prisons pour mineurs !

La responsabilité de la mort de Julien est à chercher dans cette prison des mineurs de Meyzieu, véritable Guantanamo sur le territoire français.

Collectif Solidarité Prisonnier
c/o Le Laboratoire
8 place St Jean 26000 Valence

P.-S.

Émission de radio du Collectif Solidarité Prisonnier de Valence le dernier lundi du mois de 18h15 à 19h sur radio Mega (99,2)
Contact : radio.labo AROBASE yahoo.fr

Notes

[1Les chiens mordent rarement la main de celui qui donne à manger

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