Ali
Ali est le premier appelé à la barre. Il est pakistanais, il a été marié à une française mais il a divorcé et avec la rupture du contrat de mariage, son titre de séjour n’a pu être renouvelé (et oui quand on se marrie, on a pas forcément un droit de séjour définitif en France !). Une fois le divorce prononcé, il reçoit une OQTF (Obligation de quitter le territoire français) qui arrive dans son nouveau domicile, chez sa nouvelle compagne le 14 février, jour de la fête des amoureux. Justement, Ali et Fabienne ont le projet de se marier, ils font d’ailleurs partie du collectif Amoureux au ban, monté par la Cimade ; plusieurs personnes sont dans la salle pour soutenir Ali. Leur union a été célébrée le 5 juillet dernier à la mairie du 7e. Mais lundi 11 août, la PAF est venue cueillir Ali chez lui et l’a emmené au centre de rétention.
Le représentant du préfet, qui joue ici le rôle du procureur, reproche à Ali de « chercher à tout prix à rester sur le territoire français », il s’étonne de la différence d’âge avec sa femme et affirme que leur union est « montée de toute pièce ». L’avocate, document à l’appui, montrera que leur amour est bien réel après un an de vie commune et une enquête menée par la mairie qui les a marié. Ali rajoute qu’au CRA il est considéré comme un criminel alors qu’il n’a rien fait.
Ali sera assigné en résidence. Son avocate tente un référé demain jeudi 14 août à 10h30 au tribunal administratif pour annuler son OQTF vu qu’il est marié. [1]
Axa
C’est au tour d’Axa, d’origine kosovare, arrivé en France en mars 2000 avec les services d’un passeur qui lui a coûté 800 euros. Il a été arrêté à un contrôle routier en Savoie. Il est sous le coup d’une OQTF depuis mai dernier. Le procureur demande donc le maintien en détention, étonnamment l’avocate ne prend pas le temps de le défendre puisque « ses demandes d’asiles ont été rejetées ». Axa lui déclare qu’il a prévu de rentrer au Kosovo le 20 septembre mais qu’avant il a plusieurs affaires à régler.
Le juge le laisse au CRA. Axa remercie le juge par politesse.
M. Sekak
M. Sekak est algérien, il a été arrêté place Gabriel Péry puisque un arrêté prévoit la possibilité d’effectuer des « contrôles d’identité préventif » dans cette zone. Le représentant du préfet précisera qu’on appelle communément la place Gabriel Péry, « place du pont », le juge sur le ton de la boutade rajoutera « moi je l’appelle la place des voleurs » !
Sékak, l’air dépité déclare qu’il veut bien rentrer en Algérie malgré des menaces là-bas parce qu’il a tout essayé pour rester en France légalement et qu’on ne veut pas de lui. Il a une OQTF depuis mai 2004. Son avocate demandera l’annulation de la rétention puisqu’on ne lui a pas signifié son infraction lors de son arrestation (quand la police place quelqu’un en garde à vue, elle doit lui signifier ce qui lui est reproché et lui énoncer ses droits). Le représentant de la police défendra ses hommes en arguant le fait que le jour de l’arrestation, les policiers avaient 12 gardes à vue à gérer et que le détail leur a échappé. Les pauvres ! Ils sont submergés !
Sur le fond l’avocat précise que M. Sékak a ses parents qui vivent en France depuis 1957 et qu’il est venu ici pour fuir des menaces d’un groupe armé en Algérie. Le juge demande au détenu ce qu’il ferait s’il est renvoyé en Algérie. « J’essaierai d’obtenir un visa ».
Le vice de forme est retenu, M. Sékak est libéré.
Azim
Azim, lui est d’origine Turc. Alors qu’il devait se rendre à Marseille pour rencontrer son avocate, il est arrêté à gare de la part Dieu (qui, comme le rappelle le juge, est une zone internationale, où la police peut donc contrôler n’importe qui sans raison).
Le visa d’Azim a expiré en 2001 et il a refusé d’embarquer une fois en 2004. Son avocate venue de Marseille, demande l’annulation pour vice de forme. Dans une longue explication détaillée, elle raconte qu’on n’a pas notifié les droits d’Azim en présence d’un interprète comme le stipule la loi. Azim n’a pas compris ce qu’on lui demandait, il n’a donc pas pu contacter son avocate et du coup il n’a pas voulu signer le procès verbal. Le défenseur des policiers reconnaît qu’il n’y a pas eu d’interprète sur place mais qu’une personne lui a signifié ses droits en turc par téléphone (ce qui a dû faciliter le dialogue avec les policiers). Azim précise qu’on lui a arraché le téléphone des mains quand il a demandé à l’interprète de prévenir son avocate.
Le représentant du préfet ressort son argument comme quoi les policiers ont respecté toute la procédure malgré « le nombre impressionnant de dossiers ce jour là » (étonnant non ? À force de multiplier les zones où la police peut arrêter n’importe qui sans raison...).
L’avocate précise ensuite qu’il a été relaxé par un tribunal correctionnel suite à son refus d’embarquer, elle explique qu’Azim est chef de chantier, qu’il a une carte professionnel du BTP et que vue la durée de sa présence sur le territoire il répond aux critères (pourtant très restrictifs) de la régularisation par le travail.
Le juge demande à Azim quelle langue il utilise sur les chantiers. « En turc » ! répond-il par l’intermédiaire de son interprète.
Azim est libéré mais assigné à résidence « faîtes des efforts pour parler français » conclu le juge après la sentence.
Mourad
Enfin c’est au tour de Mourad, qui n’a pas d’avocat. Il est marocain et a été arrêté en Savoie. Mourad déclare vouloir rentrer au Maroc le plus vite possible. L’audience dure 3 minutes. Il est maintenu en détention..
L’exposé de ces 5 affaires aura pris une heure. Le tribunal se retirera une heure avant d’énoncer les sentences. En sortant rue Servient, on fait des signes aux 5 retenus qui repartent au CRA dans une navette entouré d’agents de la PAF (ceux qui sont libérés doivent attendre encore 4 heures, le temps au parquet de faire appel). L’un des policiers nous fait signe aussi, si seulement c’était toi qu’on enfermait...
Compléments d'info à l'article
Proposer un complément d'info