Le 17 octobre 2014 qui s’inscrit dans la semaine contre les violences policières et le racisme d’état, sera une manifestions en hommage au centaine de mort(e)s algérien(ne)s tués par l’État français le 17 octobre 1961.
Hier comme aujourd’hui, l’État français continue la chasse aux sans-papiers, la discrimination des rroms, les expulsions, les violences policières qui finissent en crime....
Une marche pour rappelé le courage de celle et ceux qui ont lutter et braver le racisme d’État, mais aussi rappelé qu’il n’y a pas de rupture dans l’histoire française depuis les années coloniales.
Rendez-vous : 18H00 Place Belleville
(Angle de la Route de Vienne et de la Rue Audibert et Lavirotte) - 69008 (Bus C12 ou C35 - Arrêt Grand Trou ou T4 Lycée Lumière à 10mn)
Le 5 octobre 1961, alors que les négociations devant mettre fin à la guerre d’Algérie ont commencé, le préfet de police Maurice Papon décrète un couvre-feu pour les Français musulmans d’Algérie à Paris et dans sa banlieue.
Le 17, une manifestation pacifique à l’appel du FLN s’ensuit, celle-ci sera sauvagement réprimée. Dans les rues de Paris, ces hommes et ces femmes vêtus pour la circonstance de leurs plus beaux habits se pensaient et se voulaient désormais libres. Ce qui fut insupportable aux yeux des représentants de l’ordre raciste et colonial.
Longtemps, les atrocités commises pendant cette manifestation pacifique d’Algériens ont été passées sous silence par le gouvernement et les médias français. Aujourd’hui, on en sait beaucoup sur la violence de cette nuit : des cars de police quadrillaient la ville, des policiers cernaient les bouches de métros, prêts à arrêter les manifestants. Aux portes de Paris, à la sortie et dans les couloirs des métros, sur les grands boulevards, les manifestants seront systématiquement matraqués, à coups de crosse, de gourdin, de bâton, souvent jusqu’à ce qu’ils s’effondrent.
Les policiers frappent au visage, au ventre et tirent sur les manifestants qui, à aucun moment, ne font preuve de violence ni d’aucune résistance. Sur les ponts, des centaines d’hommes sont balancés à la Seine. En plein Paris, pendant plusieurs heures, se déroule une véritable chasse au faciès à laquelle la population parisienne assiste et collabore, parfois. Le préfet de police M. Papon suit toutes les opérations et se rend lui-même à l’Étoile, pour constater leur " bon déroulement ". Il attisera la colère des policiers qui voulaient se faire justice eux-mêmes, en leur répondant : " Pour un coup rendu, nous en porterons dix ". Par ailleurs, il assurera aux policiers que "quoi qu’il arrive vous êtes couverts".
Au moins 200 Algériens ont été tués, 15 000 autres arrêtés puis torturés, parmi eux beaucoup sont internés et battus. On assiste à des exécutions et nombreux sont ceux qui meurent de blessures non soignées.
Au lendemain de la manifestation, le bilan officiel est de deux morts algériens. Il fait état de " tirs échangés " entre la police et les manifestants. Malgré les efforts de quelques parlementaires, le gouvernement empêche la création d’une commission d’enquête. Aucune des plaintes déposées n’aboutira.
Aujourd’hui ce massacre n’est toujours ni reconnu ni condamné. 53 ans plus tard, la société française va-t-elle enfin comprendre la portée de cet événement ? En bravant le couvre-feu, les manifestants algériens d’octobre 1961 ont affirmé leur volonté de transgresser l’interdit colonial et de cesser d’être invisible.
Cependant, le racisme dont sont victimes celles et ceux d’origine maghrébine et les anciens colonisés (discriminations quotidiennes, relégation dans des logements insalubres, harcèlement, contrôles au faciès, violences policières parfois meurtrières) est toujours bien présent.
Les immigrés et leurs descendants ne sont pas les post-colonisés, ils sont toujours les damnés du béton, des grands ensembles, des bidonvilles que les garants de l’ordre raciste peuvent toujours tuer sans être inquiétés. « Morts naturelles » au commissariat, « accidents routiers » de personnes prises en chasse par la police... Ce ne sont pas seulement les meurtres, les bavures dans leur quasi-totalité sont couvertes d’impunité.
Parmi ces morts combien ne sont pas noirs, arabes, immigrés, enfants d’immigrés ou insurgés ? Quelle que soit la « couleur politique » des gouvernants, la couleur de l’épiderme reste toujours un aspect déterminant de la valeur d’une vie. La France n’est dans l’ère post-coloniale que dans ses mensonges institutionnels, médiatiques et scolaires.
La mort touche sans distinction d’âge d’Ali Ziri (assassiné en 2009) à Abdelhak Goradia (assassiné en 2014) lors de son expulsion...
Le système néo-colonial, endo-colonial qui s’exerce au cœur même de la « métropole » régit la vie des damnés à travailler et contribuer à la machine. Ceux dont la voix s’élève au-dessus des champs de bitume, c’est par les matraques, les flashballs, les humiliations en garde à vue, l’impunité des nouveaux tortionnaires et les lourdes peines qui tombent, qu’on les fait taire, qu’on essaye de les réduire à ces corps qui finissent par accepter leur condition d’être de seconde classe.
En 2007, les frères Kamara sont condamnés à douze et quinze ans de prison. Seuls quelques témoignages sous X rémunérés les accusent d’avoir tiré sur des policiers, lors d’affrontements suscités par le décès de Larami et Moushi. Ces derniers avaient été tués lors de la collision de leur moto avec un véhicule de police.
Il n’y a pas de rupture dans l’histoire française depuis les années coloniales officielles, les bidonvilles n’ont pas changé à part peut-être l’origine géographique de ceux qui les occupent, l’origine sociale, elle, est toujours la même. Ce sont les mêmes qui humilient, harcèlent, battent et expulsent les habitants des bidonvilles des années 60 à aujourd’hui. Qu’ils soient d’origine maghrébine, des pays de l’est ou rrom, la répression reste la même, l’État fait la chasse à ceux qui n’ont pas le bon bout de papier.
Le code de l’indigène n’existe plus mais reste la différence de statut, donc de dispositif répressif. En 2005, à Clichy, les damnés de l’intérieur se lèvent contre la banalité de la mort de Zyed et Bouna le 27 octobre. La réponse de l’Etat est immédiate : lacrymo, grenades de désencerclement, flashball, fantasme médiatique du banlieusard-barbare, quadrillage des quartiers révoltés, déni de responsabilité, interpellations à la pelle, lourdes peines, etc. L’état d’urgence et un nouveau couvre-feu sont alors décrétés, suite à ces émeutes. Cela ne s’était pas vu, dans l’histoire française, depuis ceux de la guerre d’Algérie et de 1961…
Les 22 juin et 21 juillet 2014, lors des fêtes suite aux matchs de Coupe du Monde de l’Algérie, le dispositif policier, la répression et l’impunité des auteurs de bavures sont encore un exemple frappant. Les damnés n’ont pas le droit de se réunir, d’occuper l’espace public sans baisser les yeux ni courber l’échine, ils sont chassés du centre-ville par les canons à eau, et les grenades lacrymogènes. La plainte déposée par Omar contre le policier qui, alors qu’il était à terre, lui a mis des coups de pied au visage, n’a pas abouti, le coup était « un geste technique » « totalement justifié », d’après le procureur.
Les exemples sont sans fin…
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