L’action visait notamment
à rappeler au gouvernement danois que ses exactions ne passeraient pas
inaperçues, et à exiger l’abandon immédiat des charges retenues contre
les quelques 300 personnes arrêtées depuis le début de la campagne de
soutien au lieu.
Le bureau du consul a été envahi par une quinzaine de personnes, qui y
ont faxé un communiqué de revendications, à destination du maire de
Copenhague, de sa mairie, et du cabinet du premier ministre danois. Le
téléphone du bureau a ensuite été mis à contribution pour appeler
Ungdomshuset, et avertir la police de Copenhague de l’action.
Manifestement très préoccupées par la situation, les autorités danoises
se sont montrées particulièrement soucieuses de la sécurité du consul,
l’appelant sur son téléphone portable, et allant jusqu’à prévenir
elles-même la police française.
Pendant ce temps, la trentaine de personnes située à l’extérieur
déployait deux larges banderoles en face des entrées du bâtiment, sur
lesquelles on pouvait lire "consulat danois occupé : solidarité avec
Ungdomshuset !« et »défendons les espaces autogérés !". Des tracts ont
alors été distribués aux employé-e-s et passant-e-s, présentant
Ungdomshuset et le mouvement squat, dénonçant les manoeuvres de
criminalisation de la contestation et d’imposition du contrôle social
mises en place par les autorités.
Deux voitures de police suivies par des flics en civil sont arrivés sur
place. Tour à tour, les divers-es agent-e-s ont essayé de monter au
premier étage pour y rejoindre le consulat, mais ont persisté à se
tromper d’ascenseur à chaque fois. Les deux seuls ayant triomphé de
l’exercice se sont cependant vus vertement rabrouer par leur supérieur,
leur intimant l’ordre de passer sous silence leur présence momentanée
dans le consulat - par peur d’un incident diplomatique ?
Les manifestant-e-s situé-e-s à l’extérieur étant pour la plupart
masqué-e-s, la police a alors appelé des renforts afin de procéder à des
contrôles. À ce moment là, tou-te-s les participant-e-s se sont
regroupé-e-s et ont soudainement quitté les lieux, après une heure et
demie d’occupation, sans que la police n’ait le temps de faire le
premier pas.
À noter que le quotidien danois Politiken, qui s’était déjà fort ému du
communiqué de soutien et appel à actions émis par l’Espace autogéré des
Tanneries en décembre dernier, s’alarmant du danger planant alors sur
les ressortissant-e-s danois-es du fait de possibles actions de
solidarité, s’est aussitôt fendu d’un article sur l’action, avec
interview de Monsieur le consul. Quant à la presse locale, elle n’a
peut-être pas tout compris, France 3 relatant qu’un groupe de "squatters
danois" avait occupé le consulat.
Il ne s’agit pas d’une action isolée : les initiatives de solidarité avec
Ungdomshuset se multiplient dans le monde entier. Le même jour, une
manifestation de soutien à Ungdomshuset se déroulait en face du Consulat
du Danemark à Genève, en Suisse ; le 16 février, une performance de
théâtre de rue et manifestation se tenaient à Moscou ; le 15 février, 45
personnes se rassemblaient en face de l’ambassade danoise à Berlin, et
on apprenait récemment qu’à Lyon même, la délégation commerciale du
Danemark avait eu ses vitres endommagées et son hall couvert de
graffitis de soutien à Ungdomshuset deux semaines auparavant...
À suivre, donc. Ungdomshuset bli’r !
Quelques photos de l’action se trouvent là.
Ci-dessous, le texte du tract distribué lors de l’action :
CONSULAT DANOIS OCCUPÉ :
DE LYON À COPENHAGUE, DÉFENDONS LES ESPACES AUTOGÉRÉS
À Lyon comme ailleurs, des milliers de mètres carrés sont à l’abandon,
tantôt oubliés par leurs propriétaires, tantôt utilisés pour spéculer
sur le marché de l’immobilier. Depuis toujours, nombreux et nombreuses
sont celles et ceux qui trouvent aberrant que des espaces soient laissés
vacants, quand dans le même temps, le prix des loyers ne cesse de
flamber, quand quantité de gens n’ont nulle part ou se loger, quand tant
de projets n’ont nulle part ou se réaliser.
Ainsi, depuis des années, divers collectifs et individus réquisitionnent
des bâtiments délaissés. Non seulement pour y vivre, mais aussi, bien
souvent, pour s’y organiser de façon autogérée, et proposer une
multitude d’activités : repas de quartier et concerts, bibliothèques et
salons de thé, ateliers et échanges de savoirs, libre-accès à Internet
et initiation aux logiciels libres, réunions & espaces de rencontres
militantes... sont parmi les nombreuses choses qui ont existé à Lyon ces
dernières années, rendues possibles par la réappropriation collective
d’espaces cadenassés ou murés.
Dans toute l’Europe, de tels endroits ont ainsi été arrachés aux lois du
marché, ces vingt dernières années. Malheureusement, beaucoup d’entre
eux ont été décimés par l’acharnement légal et policier. À Copenhague,
au Danemark, il ne plus que quelques uns de ces espaces de liberté :
Ungdomshuset. Ouverte en 1982, cette maison a acueilli des milliers
d’évènements, et constitue un point névralgique pour les contre-cultures
et contestations sociales dans toute l’Europe du Nord. Aujourd’hui,
malgré une longue bataille pour défendre le lieu, celui-ci est menacé
d’expulsion, et peut-être envahi par la police à tout instant.
Parce que nous partageons avec Ungdomshuset une communauté de pratiques,
de préoccupations ; parce qu’il nous semble intolérable que de pareils
espaces soient rayés de la carte et laissent place à l’uniformité ; parce
que notre meilleure arme est la solidarité... nous occupons aujourd’hui
le consulat du Danemark à Lyon, afin de montrer à l’état danois que là
bas comme ici, nous ne laisserons pas passer ses exactions ; afin, aussi,
d’encourager les occupant-e-s d’Ungdomshuset qui, depuis maintenant
plusieurs mois, se battent pour garder leur espace d’activité et de vie !
Mais il n’y a pas qu’au Danemark que les lieux non-alignés sont menacés.
En France, la police intervient régulièrement pour replonger dans le
sommeil des maisons qui avaient été un temps réanimées, pendant qu’un
nouveau projet de loi permet l’expulsion de locaux occupés en 24h ! Ce,
sur fond de contrôle quotidien de plus en plus serré, avec pour prétexte
la lutte contre l’« insécurité ». Mais de quelle insécurité parle-t-on ? Le
fait d’être filmé par dix caméras dans chaque rue et d’être fiché
biométriquement (comme l’imposent les passeports actuellement, les
cartes d’identité prochainement) va-t-il rassurer l’employé-e menacé par
un licenciement, protéger le sans-papier dont la vie peut basculer à
chaque instant, aider celui qui n’a pas de quoi manger quotidiennement ?
Il va de soi que l’on cherche à nous faire accepter un contrôle qui
profite à certains, à notre détriment. Dans ce contexte, les expulsions
de squats sont une menace pour tou-te-s, car elles témoignent de cette
volonté de nivellement, de suppression des espaces antagonistes et lieux
de résistance aux dominants. Aussi incombe-t-il à tou-te-s celles & ceux
qui ne souhaitent pas être mis au pas de se mobiliser, pour préserver et
étendre les espaces d’autonomie, face au « meilleur des mondes » que les
politicien-ne-s s’affairent à préparer. Longue vie à Ungdomshuset, et à
tous les lieux autogérés !
Le 20 février 2007, des squatteurs & squatteuses de Lyon et d’ailleurs...
Compléments d'info à l'article
Proposer un complément d'info