A 10h, Je reçois un sms d’un ami, qui m’invite à participer à la manifestation contre les réformes des retraites. Engagé sans être militant, je me joins à la manifestation dont je partage les revendications. Mon métier de sommelier me permet d’être disponible en journée.
Vers 11h, je rejoins mon ami peu après la manufacture des tabacs de Lyon. Nous sommes à bonne distance de l’avant du cortège, avec la fanfare.
La manifestation se passe bien avec énormément de monde et nous avançons au rythme de la fanfare, au milieu des familles sans encombre jusqu’à la Guillotière.
A 13h, mes amis partent travailler. Je continue seul en suivant toujours le camion CGT rouge. Je suis encore loin de l’avant du cortège, où l’on aperçoit les premiers tirs de lacrymogène vers le début du pont de la Guillotière.
Le cortège continue et bifurque le long du quai Claude Bernard en suivant le parcours défini.
Un régiment de CRS est posté en contre-bas dans les escaliers du skatepark. D’après les informations qui nous parviennent et ce que nous voyons, une première échauffourée entre CRS et Blackblocs à l’avant du cortège stoppe la manifestation. Les CRS montent au niveau du haut du quai. S’en suivent des jets de bombes à gaz lacrymogène en direction des Blackblocs accompagnés d’une charge d’une vingtaine de CRS sur une quinzaine de mètre. Les Blackblocs s’enfuient vers le sud et les CRS retournent à leur position initiale.
La manifestation se poursuit après la consigne du speaker de la CGT.
Le cortège avance d’une cinquantaine de mètres, quand soudain une dizaine de Blackblocs contourne et traverse le flot de manifestants et se dirige vers les CRS. Au même instant, des bombes à gaz lacrymogène sont tirés par les CRS et les manifestants se dispersent.
Pour m’éloigner les affrontements, je me retire du quai, en direction de l’aire de jeu le long de la rue Raspail, dans des escaliers qui descendent vers la rue Passet. Au sommet des escaliers, je reçois en plein visage une bombe à gaz lacrymogène. Je suis sonné et n’ai plus conscience de ce qu’il se passe, la tête pleine d’acouphènes. Je titube encore sur quelques mètres, avant d’être pris par le bras par un streetmedic (témoin retrouvé grâce à l’appel du 10 décembre de la CGT), puis par un deuxième streetmedic (témoin retrouvé grâce à l’appel à témoin du 10 décembre). Ils me font m’allonger par terre. Une dame de la CGT qui a été témoin de la scène appelle les pompiers par téléphone qui refusent de venir (dans une manifestation, les pompiers n’interviennent que sur appel des forces de l’ordre). Au bout de quelques minutes, les médecins s’en vont pour voir s’il n’y a pas d’autres blessés. La dame de la CGT et une deuxième dame, me conduisent vers un banc public, où j’ai un nouveau malaise. La dame de la CGT rappelle les pompiers qui acceptent finalement d’intervenir et arrivent sur le lieu une dizaine de minutes plus tard. Ils me prennent en charge et me font un examen médical au bout duquel ils constatent un hématome. Pendant ce temps, un policier de la Police Nationale discute avec un des pompiers et enregistre mon identité. Ils me laissent partir et me conseillent de la glace et du repos. Ma compagne vient me chercher et nous rentrons à notre domicile.
Je n’arrive plus à ouvrir la bouche, et mon œil gauche se gonfle et je n’arrive plus à l’ouvrir non plus.
Du jeudi après-midi au samedi matin, je suis alité et je n’arrive pas à m’alimenter.
Samedi matin, je fais un malaise. Ma compagne appelle les secours et je suis emmené à l’hôpital Saint-Luc-Saint-Joseph. Les examens poussés (scanner, radio) montrent cinq fractures au visage. Ce bilan me vaut 45 jours d’ITT et 35 jours d’AT.
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