Le premier hôpital-prison en France... ?
L’UHSA (Unité Hospitalière Spécialement Aménagée) de Lyon devrait être le premier hôpital psychiatrique-prison en France. Sa construction est achevée au fond du Vinatier, à Bron, avec des hauts murs d’enceinte en béton de six mètres de haut et des douves, qui doivent être surveillés par des matons qui pourront faire feu à tout moment en cas d’évasion. Cela ne va sans doute pas rassurer les patients des autres pavillons de l’immense hôpital du Vinatier situés à proximité, et n’est-ce pas un très « mauvais signal envoyé à la population », selon Marc Auray, délégué CGT du Vinatier, alors que le gouvernement parle d’un "hôpital psychiatrique ouvert sur la société“ ?
Mais alors que cet établissement devait recevoir initialement une soixantaine de prisonniers de Rhône-Alpes, Bourgogne et Auvergne, ayant de graves troubles mentaux, et ce dès le 6 avril 2010, avec dans la foulée une inauguration de Sarkozy, la date d’ouverture est reportée à on-ne-sait-quand... En effet le décret d’application n’a pas été encore promulgué. C’est vrai que le Conseil d’État a émis quelques réserves, mais est-ce la seule raison ?
Préavis de grève
Et déjà une partie du personnel prévu pour travailler dans cet hôpital-prison vient de déposer un préavis de grève pour... le jour de l’ouverture de cet établissement. Ils protestent contre l’opacité et le manque d’information de la part des autorités ainsi que la réduction de moitié de la prime mensuelle de 234 € qu’on leur avait promis. Cela révèle le malaise énorme actuel de l’administration pénitentiaire à l’égard de la gestion de cette structure et des personnels !
Le vertige de la peur sécuritaire
C’est dans un contexte de faits divers fort médiatisés et de dérive sécuritaire que devait intervenir l’ouverture de cet hôpital-prison, qui participe à la destruction d’une conception humaniste de la prévention au profit de structures à gestion sécuritaire de crises. Pendant des années, la prison a joué un rôle asilaire. Aujourd’hui, ne parvenant plus à maîtriser la situation, on a trouvé en cet hôpital-prison une autre conception du contrôle social de la maladie mentale.
Nuit de résistance
C’est pour dénoncer ces dérives et le tournant sécuritaire pris par la psychiatrie que la CGT, avec une trentaine d’organisations, a organisé le 9 mars 2010 une fameuse “nuit blanche de résistance” au Vinatier. Voir ces deux articles de Rebellyon :
Nuit de résistance du Vinatier face à la prison dans l’hôpital psy ;
Vinatier : retour sur la Nuit blanche de résistance du 9 mars 2010.
N’est-ce pas d’abord notre société qui est malade ?
Environ un quart de toutes celles et de tous ceux qui se retrouvent en prison ne devraient pas s’y trouver car ce sont d’abord des malades. Et ces nouveaux hôpitaux-prisons risquent au contraire de légitimer l’incarcération de malades mentaux.
Tout comme pour les mineurs, on s’aperçoit dans la prison de Meyzieu qu’il est impossible d’éduquer et de punir dans un même lieu, pourquoi serait-il possible de soigner et punir au même endroit ? Ce n’est certes pas du tout souhaitable. Il vaudrait mieux que notre société prenne en charge bien en amont les malades qu’elle fabrique en se donnant les moyens nécessaires. Ils seraient alors des malades traités comme tels, et il y aurait alors beaucoup moins de malades incarcérés !
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