Ziyed a été arrêté à Clermont-Ferrand le 16 mars suite à la délivrance par la préfecture du Puy de Dôme d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) à son encontre, en même temps qu’elle lui refusait le renouvellement de son titre de séjour étudiant d’un an. Ce n’est pas la première fois que les
autorités préfectorales font de Ziyed un « sans papiers ». En 2008 déjà, un premier refus de titre avait entraîné une OQTF. Motif invoqué par la préfecture : le caractère « réel et sérieux » des études menées par Ziyed
serait mis en doute, alors même que Ziyed est régulièrement inscrit à l’université. Une fois de plus, les services préfectoraux se permettent de contredire une décision pédagogique de l’université. A l’époque, un vice de procédure avait permis à Ziyed de sortir du centre de rétention et la préfecture avait été contrainte de lui accorder un titre de séjour afin qu’il puisse poursuivre ses études.
Cette année, Ziyed se retrouve à nouveau pris dans la machine administrative à fabriquer des « sans papiers ». Sa demande de renouvellement de titre annuelle a été rejetée, entraînant la délivrance
d’une nouvelle OQTF. Or les raisons invoquées par la préfecture sont les mêmes qu’en 2008, alors même que Ziyed a validé son année. On est en droit de s’interroger sur les raisons d’un tel acharnement.
Tout d’abord, Ziyed, en tant qu’étudiant étranger, et comme tel obligé à chaque rentrée de faire renouveler son titre de séjour, appartient à ce vivier de « sans papiers » potentiels dont disposent les préfectures afin de remplir les quotas d’expulsions réclamés par la politique gouvernementale par
l’intermédiaire du « ministère de l’immigration et de l’identité nationale ». Quoi de plus simple en effet, face à l’accroissement de la demande d’expulsions par l’Etat, et alors que les préfets ne remplissant pas leurs quotas se voient convoqués au ministère pour réprimande, que de rendre des personnes « expulsables » en refusant de manière arbitraire de renouveler leur titre de séjour ?
Mais il est des raisons tout aussi politiques à cet acharnement dont font preuve les services de la préfecture à l’égard de Ziyed. En effet, Ziyed est à plus forte raison dans le viseur des autorités car il a choisi de lutter contre l’injustice de cette situation.
Parallèlement à ses études, Ziyed milite au sein du RUSF/RESF 63 afin de venir en aide aux victimes de cette politique injuste. Quelques jours avant son arrestation, il participait à un rassemblement de soutien à deux étudiantes de nationalité marocaine et témoignait devant les caméras de la télévision régionale de son propre passage par le centre de rétention de Lyon en 2008. Le 17 mars, soit le lendemain de son arrestation, il devait participer à une rencontre dans le cadre de la Semaine de la Poésie de Clermont-Ferrand au cours de laquelle il devait évoquer, au côté de l’écrivain Marie Cosnay, la situation d’étudiant et de personne sans papiers.
Un activisme qui visiblement dérange, comme en témoignent les conditions de son arrestation : à la veille de cette rencontre, alors qu’il se trouve dans le centre-ville de Clermont-Ferrand, Ziyed est brusquement assailli par trois policiers en civil qui le plaquent contre un mur avant de lui passer les menottes. Ce n’est qu’une fois ainsi entravé que les policiers prennent la peine de lui demander « Vous êtes bien Ziyed T. ? ». Pour la forme seulement, car Ziyed découvrira à son arrivée au commissariat que sa photo circulait parmi les policiers de la ville. Visiblement ce « sans papiers » trop remuant était devenu l’homme à abattre à Clermont-Ferrand.
A peine Ziyed était-il arrêté que les autorités préfectorales se mettaient en action afin de l’expulser au plus vite. Fort heureusement, son passeport s’avère être en cours de renouvellement, ce qui repousse la procédure d’expulsion de quelques jours, le temps que le Consulat de Tunisie délivre un laissez-passer. D’ici là, Ziyed devra patienter au Centre de Rétention Administrative de Lyon.
« Centre de Rétention Administrative », voilà le nom que l’on donne pudiquement à cette prison pour étrangers où l’on enferme préventivement les personnes qui ont le malheur de ne pas avoir les bons papiers, le bon coup de tampon. Dans cet amas de préfabriqués cerné de hautes clôtures barbelées et de caméras, à quelques centaines de mètres des pistes de l’aéroport Saint-Exupéry, la « rétention » n’a rien d’ « administrative » mais est en réalité une expérience on ne peut plus physique : enfermement,
promiscuité, puanteur, nourriture infecte que de nombreux retenus soupçonnent d’être « chargée » aux tranquillisants afin d’annihiler toute combativité éventuelle… Une centaine d’hommes, de femmes, et même
d’enfants, à quatre par chambre, voire plus, attendent là une audience devant le Tribunal Admnistratif ou le Juge des Libertés et de la Détention, et au final pour la plupart, leur expulsion, le tout au rythme des appels et des comptages, sous l’oeil des agents de la Police aux Frontières (PAF).
Depuis l’arrestation de Ziyed, la solidarité s’est mise en place. Il bénéficie du soutien de ses professeurs, qui attestent tous, contrairement aux dires de la préfecture, de son sérieux dans les études. Une motion a été adoptée par le conseil d’administration de l’université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand
demandant solennellement à la préfecture du Puy de Dôme la régularisation de Ziyed afin qu’il puisse poursuivre ses études sereinement. Ziyed est également soutenu par la mairie de Clermont-Ferrand, pour laquelle il intervient depuis plusieurs années en tant que bénévole dans le quartier de La Gouttière (soutien scolaire, cours d’informatique, animation culturelle,…) ainsi que par les membres de l’association « Amitié Franco-Tunisienne » à laquelle il appartient. Samedi 20 mars, 300 personnes se sont rassemblées devant la préfecture du Puy de Dôme pour réclamer la libération de Ziyed. Deux jours plus tôt, une délégation d’enseignant-e-s de l’université Blaise Pascal a été reçue, mais s’est vue opposer une fin de non recevoir.
Réseau Université Sans Frontières de Lyon (RUSF 69)
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