Grain de sable sous le capot !
Résistance et contre culture ouvrière

Trente années passées sur les chaînes de montage de l’usine Peugeot de Sochaux, une « vie » à l’usine ! Voilà ce que raconte un ouvrier spécialisé (OS), un témoignage très éloigné de celui du classique militant syndicaliste ou politique, plutôt celui, plein de vie et de vrai, d’une « forte tête » qui est restée à l’écart de la culture militante et des idéologies déformantes.

Marcel Durand fait bien sûr le cruel et classique portrait de l’usine, mais il nous montre aussi comment, en trente ans, se sont transformées le travail, l’usine, les ouvriers et leurs pratiques de résistance quotidienne sur la chaîne. Les années 70 voient l’explosion de ce qu’on a appelé « l’antitravail », une résistance aux formes multiples que l’encadrement combat de son mieux mais qui s’adapte aux nouvelles mesures de contrôle...une course de vitesse.

Mais parfois c’est le ras-le-bol et la grève éclate, d’autant mieux suivie si elle est à l’initiative de « la base » et non des syndicats qui n’échappent pas à la critique et dont les revendications ne collent pas avec les problèmes réels des ouvriers. A partir des années 80, le patronat introduit de nouvelles méthodes de travail et de management afin de briser la résistance ouvrière et d’augmenter la productivité. L’affrontement va alors se jouer sur le contrôle du temps, à quoi le patronat ajoute une offensive de type idéologique pour casser les liens de sympathies, les groupes, désagréger les formes de solidarité construites dans les ateliers, brouiller les repères.

L’apparition du chômage de masse et la multiplication des licenciements contribuent à cette débâcle (filialisation, délocalisation, externalisation, sous-traitance, temps partiel, interim). La loi sur les 35h officialise ensuite des années d’expérimentations patronales visant à intensifier l’exploitation. Cette vaste restructuration provoque la modification de la classe ouvrière et un retour de l’indiscipline qui inquiète les patrons...

A l’heure où la « crise » menace les industries de la voiture, comment ne pas songer au fait que ce sale objet est surtout une incroyable somme de gestes, de travail, de sueur, de peine et de souffrance ?

« À bas le travail ! »