Salut à toutes et tous,
Comme je vous l’avais annoncé, avait lieu à Grenoble jeudi dernier une
manifestation contre l’inauguration de Minatec, et contre le monde
nécro-technologique que nous préparent les nanotechnologies.
Comme on pouvait s’y attendre, le dispositif policier était
impressionnant. Comme on pouvait l’imaginer depuis les manifestations
anti-CPE de Grenoble, la police a eu le lacrymo et le Flash-ball faciles :
une jeune manifestante a été défigurée par un tir dans la joue et opérée
le soir-même, alors qu’elle était assise sur un banc au milieu d’un
rassemblement pacifique.
Comme vous le savez, je suis membre du collectif « Opposition Grenobloise
aux Nécrotechnologies » qui appelait à cette manifestation et tentait de
l’organiser (débats les jours précédents et hébergement collectif des
extérieurs à Grenoble) dans la mesure de ses faibles moyens. Mon
colocataire Samuel aussi, mais lui c’est encore pire puisqu’il a parlé
dans le mégaphone pendant la manifestation.
Pendant la manif, avant la dispersion, la vitrine d’une banque a été
entièrement détruite par quelques personnes, que nous ne connaissons pas.
Donc, pour la Police, je suis coupable d’avoir « participé à un
attroupement armé » et Samuel est coupable « d’incitation à la destruction
de biens en réunion ».
Donc, nous avons été tous les deux interpellés le lendemain matin vers
9h30, alors que nous nous rendions en vélo vers le centre-ville pour y
diffuser des tracts, ou peut-être juste nous reposer car nous nous étions
levés à 5h00 du matin afin de veiller sur les gens dormant dans le lieu
d’hébergement.
Je ne vous raconterai pas en détail les 10 heures de garde-à-vue qui ont suivi,
juste quelques moments forts :
fouille au corps (nudité totale),
découverte des cellules de béton de garde-à-vue,
transport menottes au poignet à notre domicile pour perquisition, pour y
chercher des armes (ce n’est pas une blague),
pression psychologique intense lors de notre refus de nous soumettre à
un prélèvement ADN, notamment pour nous faire croire que cette décision
entrainerait la prolongation de la garde-à-vue et une nuit passée en
prison préventive,
audition, où nous découvrons qu’un policier infiltré parmi les
manifestants ces derniers jours nous auraient vu « applaudir » lors de la
casse de la banque, et Samuel dire « on va péter un laboratoire » (tissu de
mensonges incohérent).
Nous sommes finalement convoqués au tribunal de Grenoble le lundi 19 juin
à 14h00, où nous serons jugés pour « avoir participé volontairement à un
attroupement après sommations et dispersion ».
Quant au refus de prélèvement ADN, il constitue un autre délit (le
saviez-vous ?? et oui, bienvenue à Gattaca, le Meilleur des Mondes des
lois Perben 2) mais ça c’est le dessert, ce sera pour plus tard.
Nous sommes donc jugés pour être restés dans la rue alors que les CRS
pourchassaient les manifestant-e-s à coups de matraque, de lacrymogènes et
de Flash-balls tirés à hauteur de visage. Nous sommes jugés parce que
notre
colère face à cette répression a été plus forte que notre peur des
cogneurs de la Brigade Anti Criminalité en chasse et en tenue de combat.
Je m’arrête là, vous comprenez que je suis toujours, plus que jamais, en
colère.
Il me reste une chose, une seule, à vous demander : si vous pensez que
notre arrestation est injuste et indigne d’un pays qui se dit « des Droits
de l’Homme », si vous ne voulez pas que nous soyions condamnés à 2 à 4 mois
de prison avec sursis pour rien (c’est vraisemblablement ce que nous
allons prendre) : diffusez cette histoire autour de vous, parlez-en, dites
à tout le monde qu’aujourd’hui en France, c’est le simple droit de
manifester qui est menacé.
Il ne s’agit plus aujourd’hui de se demander si nous sommes encore en
démocratie. Face à la dictature qui s’installe en France, loi après loi,
se nourrissant de la misère et de la résignation du plus grand nombre, du
silence des nantis et de la cacophonie des médias, il s’agit de choisir
son camp.
Ce récit est encore trop parcellaire et incomplet, il y aurait tant à dire
sur ces quelques jours...
A bientôt, grosses bises.
Lucas
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