La Maison Sans Souci, occupée depuis 2 ans et demi, est un squat dont le bâtiment appartient à la mairie de Lyon, dans lequel 50 personnes habitaient. La mairie n’avait pas de projet clair sur le lieu, et plusieurs annonces affirmant qu’il n’y aurait pas d’expulsion par la force avaient été faites (article du Progrès du 10 mars 2021). Les contacts avec les institutions étaient limités depuis plusieurs mois, face à la volonté claire de la mairie d’expulser sans propositions d’hébergement pour la grande majorité des habitant.es. Suite à l’intervention de « recensement » de la police le vendredi 2 juin, pendant laquelle les portes des chambres ont été défoncées et les habitant.es intimidé.es et brusqué.es par la police (article du Progrès du 9 juin 2023), les habitant.es ont tenté pendant 10 jours de relancer le dialogue avec la mairie en demandant un rendez-vous et sont resté.es sans réponse. Un rassemblement s’est tenu devant l’hôtel de ville du 8e arrondissement. Le maire a refusé de recevoir les habitant.es, et alors qu’aucune violence n’a été commise lors du rassemblement, des personnes ont été frappées et gazées, un habitant a été interpellé, a passé une nuit en garde à vue, et des poursuites sont engagées contre lui.
Lundi 12 juin au matin, une trentaine de policier.es sont venu.es procéder à l’expulsion, vers 10h, alors que beaucoup de personnes étaient au travail ou en rendez-vous à l’extérieur. Aucun service social, ni la DDETS, ni le CCAS, ni la Métropole, ni des associations habituellement mandatées n’ont été identifié.es sur place par les habitant.es et soutiens. Les personnes venues en soutien n’avaient pas le droit d’entrer. Des personnes dont des femmes enceintes ont été sorties de force alors qu’elles demandaient juste à récupérer leurs affaires, 4 personnes ont été embarquées par la Police aux Frontières, dont une femme enceinte. Elles ont été libérées plusieurs heures après.
Dans l’après-midi, la police est restée sur place pendant que des agents de sécurité condamnaient la maison. Les habitant.es ont pu récupérer les affaires qu’ils et elles pouvaient porter, puis ont dû s’organiser avec les soutiens pour la recherche de lieux de stockage et de solutions d’hébergement. Des dizaines de personnes se retrouvent donc à la rue, ou hébergées temporairement chez des ami.es ou dans d’autres squats.
Beaucoup de pères vivaient là, puisque la mise à l’abri des femmes et de leurs enfants par la Métropole exclut presque systématiquement le père, isolant les femmes dans leur rôle de mère, éloignant les enfants de leur père. A chaque expulsion de squat, ce ne sont pas que les occupant.es qui sont impacté.es, ce sont aussi toutes les personnes qui soit ont un hébergement précaire, soit sont à la rue, et utilisaient ce lieu comme ressource, pour se reposer, cuisiner, prendre une douche, voir les amis. Le lieu était donc aussi un lieu d’entraide qui comme plein d’autres, palliaient aux carences des institutions.
Dans l’après-midi, nous avons vu qu’une équipe du CCAS était garée devant la maison et donc présent sur les lieux. On a demandé à la police de pouvoir leur parler pour signaler les situations des personnes. Ils ont dit que le CCAS n’était là que pour un état des lieux du bâtiment et que si on voulait signaler des situations il fallait les donner aux agents de police présents. On leur a signalé une femme enceinte sans solution, et une maman d’un bébé de 8 mois qui était partie pour la journée pour son entretien à l’OFPRA à Paris. Elle est rentrée à 20h30, sans solution d’hébergement, avec son mari et son bébé.
Nous avons donc été très surpris.es de lire dans le Progrès (article du 13 juin 2023) que « des agents du CCAS étaient sur place pour la prise en charge des individus évacués », et qu’elles allaient être hébergées, quand les seules personnes avec qui ont pu interagir les habitant.es sont la police. C’est dans la solitude et le mépris que s’est en réalité déroulée cette expulsion, sans aucun accompagnement social pendant ce moment traumatisant, où des personnes ont perdu leur seul lieu de vie, leurs meubles, et ont passé la journée dans l’angoisse à chercher un endroit où dormir et où stocker leurs affaires. Habitant.es et soutiens, nous avons été seul.es, et les appels au Samu, à la Métropole, au CCAS, aux élu.es, sont restés sans réponse (seules deux personnes ont été finalement hébergés pour une seule nuit au 115).
Alors que de plus en plus de gens sont sans domiciles, vivent sous des tentes, que la préfecture durcit de plus en plus sa politique d’hébergement, la mairie et la métropole s’entêtent à attaquer en justice et expulser des squats. Nous demandons l’hébergement de tou.te.s les habitant.es, l’arrêt des expulsions de squats dans un contexte de précarité extrême et à l’approche de la canicule.
Les habitant.es et soutiens de la Maison Sans Souci
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