A Lyon, on rase gratis ! (épisode 1)

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Dans les quartiers, chacun-e s’est habitué-e à voir disparaître, au gré des restructurations urbaines, les traces bâties de l’histoire industrielle et ouvrière, recouvrant parfois de formidables tènements fonciers. Cette fois encore, le boulet frappe sans y regarder. Pour notre part, permettons-nous d’y jeter un dernier regard.

Depuis lundi 24 octobre, les pelleteuses de la communauté urbaine se sont affairées à ne plus laisser trace d’une halle d’entrepôt des « Houillères de Rochebelle », il est vrai restée en friche plusieurs années.

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La halle telle qu’on pouvait la voir la semaine dernière...

Aujourd’hui mercredi 26, il n’en reste effectivement plus qu’un tas de gravats !

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... et après le passage des tractopelles. On apprécie mieux à présent la nouvelle silhouette urbaine du quartier ouvrier de la Villette.

Les lignes qui suivent ont été transmises au mois de juillet dernier par un collectif informel [1] à des élus et techniciens de la ville de Lyon et de la communauté urbaine de Lyon. Alors que ces autorités se sont confortablement assises sur les recommandations de ce texte en choisissant de démolir, il a été aimablement communiqué à Rebellyon qui se félicite de le partager aujourd’hui.

Il semble en effet que pas une association de patrimoine, pas un conseil de quartier, pas un collectif de riverains n’a daigné s’opposer à la destruction de ces hangars "crasses", qui de l’aveu même des techniciens du Grand Lyon sont en réalité démolis pour éviter le squat ! On comprend mieux la mauvaise foi des dossiers de permis de démolir...


RUES PAUL BERT & MAURICE FLANDIN

Les permis de démolition [2] sont sollicités au motif du « projet Lea-Leslys et création d’une nouvelle voie » alors que les parcelles visées sont situées en grande partie sur une réserve pour espace vert au plan local d’urbanisme [3], et hors de l’emprise que définit celui-ci pour cette ligne de tramway en cours de réalisation et pour la future rue Mouton-Duvernet.

Il se trouve que trois des édifices frappés de démolition méritaient une attention particulière à fin de conservation [4], d’autant qu’il était envisageable, comme dans d’autres parcs de l’agglomération, de les intégrer à l’espace vert pour y abriter :
- soit des équipements collectifs utiles au fonctionnement du parc,
- soit des équipements attendus par les riverain-es et faisant défaut dans ce quartier (skate-park ou autres équipements sportifs)
- soit d’autres usages issus d’une concertation.

Compte tenu de l’absence de fondement des motifs avancés par le bénéficiaire, et de la valeur patrimoniale des bâtiments concernés que reconnaît la municipalité [5], pourquoi en autorise-t-elle la démolition ? N’y aurait-il pas lieu de considérer d’autres options de revalorisation de ces tènements ?

Une halle à usage d’entrepôt
pour les Houillères de Rochebelle, vers 1940

Elle a été signalée en octobre 2003 à Patrice Béghain, adjoint délégué à la Culture de la Ville de Lyon, dans un dossier [6] transmis en novembre 2003 à Gilles Buna, adjoint délégué à l’urbanisme.

Au n° 96 rue Maurice Flandin se trouvent en enfilade deux halles en ossature bois. Leur architecture ne présente pas de caractéristique exceptionnelle. Elles sont en revanche d’une bonne facture, la plus grande des deux, la plus à l’ouest, ayant une belle et impressionante charpente.

Conserver cette infrastructure permettrait de donner à l’aménagement du site un cachet ancien, dans l’esprit du hangar du Premier film dans les jardins de la villa Lumière, plus sobrement des dépendances en brique du jardin public de la rue Paul Sisley, ou des pavillons du parc de Gerland. Il semble d’ailleurs qu’une proposition en ce sens a déjà été formulée au Grand Lyon, lors de l’étude d’impact de l’aménagement de cet espace [7] : conserver cette halle pour en faire un lieu public de réunion.

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Le hangar des usines Lumière à l’abandon, squatté, incendié, ravagé...
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... puis restauré à l’occasion du centenaire en un équipement emblématique et de qualité.

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Ne manquez pas l’épisode suivant (également disponible en vraie grandeur en se rendant sur place au 94 bis rue Maurice Flandin), dans lequel nous verrons disparaître l’usine Rochet & Schneider, site fondateur de la célèbre et pionnière entreprise de fabrication automobile !!

Notes

[1Collectif pour un Observatoire Urbain - Contact : amaliap(arobase)voila.fr

[2PD N° 69-383-05-0038 ; -0042 et -0043, déposés suite à une délibération du bureau du Grand Lyon le 7 février 2005 (décision B 2005-2935).

[3Plus exactement : emplacement réservé n°17 destiné à la « réalisation d’un équipement public » au bénéfice du Grand Lyon.

[4Sources : Archives municipales de Lyon ; DRAC Rhône-Alpes ; Fondation de l’automobile Marius Berliet.

[5Voir l’ouvrage Zoom Rive gauche, Ville de Lyon - mission Site historique.

[6S. Badey : Inventaire d’éléments remarquables du patrimoine historique ou architectural du quartier Villette-Paul-Bert, Lyon 3e

[7Olivier Rouchon, Guillaume Gaillard, 1999

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