Bouquin : Lina Cretet, “ il ne faut jamais se laisser faire ! “

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« Il ne faut jamais se laisser faire ! ». Tel pourrait-être le principe de toute révolte. Le point de départ de toute vie cherchant à lutter contre les multiples formes de domination et leurs conséquences. C’est aussi le titre d’un petit ouvrage publié par les éditions Révoltes .

Lina Cretet nous raconte ici sa vie de syndicaliste ouvrière. Ou plutôt d’ouvrière syndicaliste. Car ce qui semble la guider tout au long de sa vie c’est bien l’envie de défendre et de rester au côté de ses camarades ouvrières dans les usines de filature de la Rodhia à Vaise.

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Sa vie d’ouvrière commence sa vie d’ouvrière à 15 ans comme ourdisseuse dans un atelier de tulle où elle
travaillera jusqu’en 1953. Elle intègre le club des amis de la nature qui est à l’époque une branche de la FSGT (fédération gymnique et sportive du travail). C’est pour Lina, un lieu d’amitié, de rencontres et de débats politiques.

Son entrée à la Rodhia, constitue un choc, un changement complet de décor par apport à son expérience en atelier : longues files d’attentes, chaleurs, bruits, et surtout une activité moins intéressante. Après avoir tenté une revendication en solo sur son salaire sans succès, elle se syndique très vite en prenant sa carte à la CGT. Mais selon ses propres termes, s’il elle se syndique à la CGT « c’est avant tout pour défendre les ouvriers ».

Dans son activité syndicale elle doit en premier lieu affronter le scepticisme d’un milieux essentiellement masculin. Elle parvient à le vaincre en prenant en compte les doléances des ouvrières et à leur permettre de s’associer à des luttes auxquelles elles ne participaient pas : Ils et elles organisent des grèves limitées afin que tout le monde puisse participer. Les femmes, les hommes et tous ceux qui avaient une famille nombreuse à nourrir comme les maghrébins. Elle devient très vite déléguée du personnel à la CGT puis prend sa carte au PC en 1958. Mais c’est surtout son activité concrète auprès des ouvrières qui lui valent une certaine confiance.

« Rester au côté de ses camarades ouvrières », ne relève pas de la simple « démagogie militante » car à maintes reprises elle refuse des avancements de carrières, donc des augmentations de salaire. Elle refuse aussi une place de
surveillante malgré les conseils d’autres délégués CGT qui y voyait un bon moyen de s’implanter dans une catégorie de salarié-e où ils étaient mal représentés. Mais gagne en contrepartie l’estime renouvelée de ces camarades. De la même manière, elle refuse de devenir permanente. Elle appliquera encore ce même principe lorsqu’elle sera conseillère municipale pour l’Union de la gauche en 1977 en ne se représentant pas une deuxième fois car selon elle, ce n’est pas une bonne chose d’occuper trop longtemps ce type de fonction.

Sa vie syndicale est émaillée de nombreuses luttes au cours des années 60 et surtout en 1967 qui fut une année intense de lutte et de négociations ; alors que pour elle 1968 fut presque une année de repos, si ce n’était les altercations avec les étudiants qui voulaient envahir les locaux et peut-être casser les machines.

Car s’il elle conteste, c’est toujours pour améliorer les conditions de vie et de travail des ouvriers et des ouvrières de la Rodhia. En 1968, elle ne croit pas du tout en la Révolution, mais surtout que c’est une bonne occasion pour maximiser les revendications. Jusqu’au bout, c’est à dire jusqu’à la fermeture des locaux de la Rodhia en 1986, elle continue d’aimer son travail : « Tout a été massacré, mais quant à nous, jamais il ne nous est venu à l’idée de faire des actions de sabotage. Jusqu’au bout nous avons travaillé et respecter notre outil de travail... ».

Malgré ces propos, Lina n’en reste pas moins consciente de sa situation. Son engagement quotidien, concret, lui
permet de mieux supporter sa condition au travail. (« j’avais ainsi l’esprit occupé et cela me permettait d’accepter plus facilement la relative monotonie du travail »).

La vie de Lina Cretet n’a rien d’exceptionnel, c’est peut-être pour cette raison que son témoignage est si riche. Il nous permet de comprendre concrètement ce qu’est
l’engagement d’une vie au-delà des appartenances partisanes et de leurs manœuvres stratégiques.

Nous remercions les petites oreilles qui ont pris le temps d’écouter et de retranscrire la vie de cette femme qui nous a quitté-es en septembre 2001.

Houria bent kafirine

P.-S.

Lina Cretet, « il ne faut jamais se laisser faire ! », recueilli par Gérard Fontaines et Mimmo Pucciarelli, Editions Révoltes 2003.

Les éditions Révoltes...
... ont précédemment publié un ouvrage intitulé : « La Rodhia, histoire d’une usine en grève », qui n’est malheureusement plus disponible. Elles ont publié dernièrement : groupe « Insoumission, matériaux pour l’histoire » en septembre 2002. Révoltes n’est pas simplement une maison d’édition tel qu’on l’entend habituellement, c’est avant tout une coopérative d’histoire vivante des révoltes et des alternatives sociales.

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