Après l’élection de Trump, beaucoup d’analyses ont insisté sur l’importance du vote des blancs en sa faveur. On a parlé de « whitelash », un retour de bâton raciste de l’Amérique blanche. Qu’en penses-tu ?
Il ne faut pas prendre le racisme américain à la légère. Mais soyons clairs, dans cette phase historique, le rôle des autonomes est d’être contre la tranquillité systémique, le statu quo. Tout ce qui bouge effectivement les lignes de front à l’intérieur de la société est bon à prendre. Il me paraÎt trompeur de faire des comparaisons avec les années 1930 et la montée du fascisme. Dans ces années les démocraties était une configuration du pouvoir très nouvelle qui n’avait aucune vraie stabilité, on ne peut pas agiter ce spectre car les phases historiques sont complètement différentes. Les représentants du populisme sont d’ailleurs complètement compatibles avec le système capitaliste démocratique.
Le premier réflexe des intellectuels, surtout de gauche, est de raisonner sur les figures du populisme : Trump et son passé de milliardaire, de violeur, etc. C’est une attitude essentiellement de déconstruction, malencontreusement reprise par la quasi-totalité des activistes « radicaux », qui se propose de révéler « la grande illusion du populisme ». Mais celle-ci devrait être l’approche des intellectuels, des journalistes et des académiciens, pas celle des militants politiques ! Nous, on devrait plutôt se demander comment peux-t-on agir là dedans, dans cette reconfiguration de la géographie du pouvoir, dans cette mutation des attentes d’une partie des classes populaires. Trump est un personnage exécrable, aucun doute là-dessus, mais il est plus fécond de regarder ses référents sociaux à l’intérieur de la société. Ce qui est intéressant, c’est qu’une partie de ses électeurs – sans raisonner en terme de majorité et de minorité – a trouvé dans ce vote la manière – comme avait dit Michael Moore avant le vote – d’avoir l’impression de lancer son « cocktail molotov » à travers ce candidat. Je pense que l’élément racial, il faut d’avantage le penser comme une partialité qui ne doit pas nous suffire. Trump ou le FN, c’est souvent des électeurs de plus de 40 ans, peut-être chômeurs, qui ont connu une autre époque, vécu des déceptions et qui voient dans leur vote une possibilité de revanche sur le système. Qui manque à l’appel ? Les noirs américains bien sûr, mais aussi les jeunes. Sur la question des jeunes, on fait face à un nœud que l’on arrive pas encore à problématiser. On observe dans ce segment de la classe une totale étrangeté pas seulement par rapport à la politique mais par rapport à la vie publique en général, Après l’élection de Trump, beaucoup d’analyses ont insisté sur l’importance du vote des blancs en sa faveur. On a parlé de « whitelash », un retour de bâton raciste de l’Amérique blanche. Qu’en penses-tu ?
D’un autre côté, est-ce que les termes de la sociologie électorale sont satisfaisants ? Pas sûr quand on voit que les femmes n’ont pas plus voté pour Clinton ou que certains immigrés ont choisi de voter pour Trump. Ce qui est intéressant, c’est que ça exprime l’envie de revanche et de leur faire mal. La vérité de ce vote peut se résumer ainsi : « ceux qui nous gouvernent nous font mal, maintenant on va leur faire mal à notre tour ». Certains camarades ne comprennent pas ça quand ils abordent la question du vote : ils se bornent à dire des banalités du type « Trump c’est un politicien comme les autres, il ne va pas aider les gens ». Bien entendu, mais la question n’est pas là !
Derrière le vote « populiste », il faut aussi voir une manifestation de notre propre faiblesse. Depuis le début de la crise, aucun groupe antagoniste n’a été capable de problématiser la question de la rupture, la volonté de pouvoir social, de pouvoir faire, de pouvoir leur faire payer. On est souvent resté dans des raisonnements très gradualistes, « les luttes partent d’en bas », « elles se construisent petit à petit », etc. Tout juste, mais est-ce suffisant ? En Italie, on a adoré le « Que se vayan todos » argentin. Et hop, un parti politique lancé depuis un blog (!) apparaît avec le mot d’ordre « qu’ils rentrent tous à la maison ces politiciens de merde ». En quelques mois, des personnes complètement inexpérimentées sont arrivés à devenir le premier parti politique d’Italie. Ça devrait conduire le milieu « subversif » à s’interroger sur sa capacité à avoir un impact sur le réel et à comprendre ce qui bouge dans la matérialité des rapports sociaux.à tout ce qui dépasse la famille, les proches et les affects personnels. C’est vraiment un bouchon à faire sauter.
D’un autre côté, est-ce que les termes de la sociologie électorale sont satisfaisants ? Pas sûr quand on voit que les femmes n’ont pas plus voté pour Clinton ou que certains immigrés ont choisi de voter pour Trump. Ce qui est intéressant, c’est que ça exprime l’envie de revanche et de leur faire mal. La vérité de ce vote peut se résumer ainsi : « ceux qui nous gouvernent nous font mal, maintenant on va leur faire mal à notre tour ». Certains camarades ne comprennent pas ça quand ils abordent la question du vote : ils se bornent à dire des banalités du type « Trump c’est un politicien comme les autres, il ne va pas aider les gens ». Bien entendu, mais la question n’est pas là !
Derrière le vote « populiste », il faut aussi voir une manifestation de notre propre faiblesse. Depuis le début de la crise, aucun groupe antagoniste n’a été capable de problématiser la question de la rupture, la volonté de pouvoir social, de pouvoir faire, de pouvoir leur faire payer. On est souvent resté dans des raisonnements très gradualistes, « les luttes partent d’en bas », « elles se construisent petit à petit », etc. Tout juste, mais est-ce suffisant ? En Italie, on a adoré le « Que se vayan todos » argentin. Et hop, un parti politique lancé depuis un blog (!) apparaît avec le mot d’ordre « qu’ils rentrent tous à la maison ces politiciens de merde ». En quelques mois, des personnes complètement inexpérimentées sont arrivés à devenir le premier parti politique d’Italie. Ça devrait conduire le milieu « subversif » à s’interroger sur sa capacité à avoir un impact sur le réel et à comprendre ce qui bouge dans la matérialité des rapports sociaux.
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