Il y a quelques années, le 8 décembre c’était le seul jour où tous les Lyonnais et toutes les Lyonnaises étaient dans la rue par n’importe quel temps. Le 8 décembre c’était le seul jour de l’année à Lyon où on pouvait aller sans vergogne à la rencontre des autres dans la rue. Tout le monde avait le sourire, c’était la fête. Quel que soit l’âge, on pouvait se moquer de n’importe qui et tout le monde le prenait à la rigolade. On ne se privait pas de se moquer des flics, qui avaient ce jour-là du mal à nous faire passer aux 24 colonnes pour outrages et rebellion. Tout le monde descendait dans la rue avec toute la famille ou entouré d’amis. La différence avec la fête de la musique c’est qu’il n’y a pas que des jeunes dans la rue, il y a vraiment tout le monde le 8 décembre à Lyon.
Certaines années, nous allions avec tout un groupe de la maison des jeunes, dont certains chantaient accompagnés à la guitare, jusqu’au café du soleil, place de la trinité, à St Georges dans le Vieux-Lyon. Et là, nous commandions 36 limonades, puis nous buvions 36 bières sur le billard transformé en table de bar. Tous pouvaient boire leur coup, même sans le sou, car le total était mutualisé.
Tout le monde était en verve et les joutes de blagues n’arrêtaient pas, y compris avec les rencontres spontanées. Cela changeait du quotidien habituel lyonnais où tout le monde se regarde en chiens de faïence dans les bus ou dans les bétaillères (les nouvelles rames de métro). On partageait les marrons et le vin chaud, au fur et à mesure des déplacements d’un quartier à l’autre dans le centre de la ville. Il ne fallait pas trop passer par la rue St Jean si on voulait pas se transformer en omelette : là, farine et oeufs ça y allait ! On passait alors par les petites rues de derrière dans le Vieux-Lyon.
Il y avait dans la rue un sacré mélange, des gens de tous les milieux à faire la fête. Par exemple, même les « trims » qui dormaient sous le pont Lafeuillée faisaient la fête le 8 décembre, alors qu’ils ne font ni noël, ni le jour de l’an. Un 8 décembre, ils se trimballaient avec un saladier de pastis et se le passaient de main en main ou le partageaient avec des gens de passage. Il y avait un concours du 8 décembre qui existait à l’époque : c’était à celui ou celle qui ramenait le plus de képis de policiers. Une fois, un gone en avait cinq les uns sur les autres sur sa tête.
C’était une vraie belle fête que « les Illuminations » et c’était magique, quand on était petit, que de mettre toutes ces petites bougies scintillantes dans des verres sur les rebords des fenêtres, qu’on disait que c’était l’esprit de résistance des Lyonnais, canuts ou non.
Mais actuellement, depuis que cela dure 3 ou 4 jours et que cela s’appelle « la fête des lumières » (pour faire la nique à Paris, qu’on disait jadis la ville-lumière), ce n’est plus du tout le même état d’esprit, canalisés qu’on est avec tous ces flux énormes de touristes toujours en train de prendre des photos et qui n’ont pas trop envie de rigoler ; on ne peut plus aller où on veut, on ne peut plus rigoler avec n’importe qui. La fête se meurt...
Voir ce témoignage d’un 8 décembre en 2010 : Lumières, Lumières, est-ce que t’as une gueule de lumière ?
Un autre témoignage d’un 8 décembre en 2009 : Fête des lumières à Lyon : soirées cacochymes
Un autre 8 décembre en 2006 : A Lyon le 8 décembre : Faites la lumière sur les morts en détention !
Pour mémoire, l’appel au Carnaval du Blasphème du 8 décembre 1995 [2] :
LE 8 DÉCEMBRE , LE CARNAVAL DU BLASPHÈME...
... Pour que mille foufounettes jouissent et que mille zigounettes s’épanouissent !
Le 8 décembre, c’est l’occasion pour tout Lyon, de sortir dans la rue pour se balancer des oeufs et de la farine dans la gueule, mettre des petites lumières aux fenêtres que ça fait vachement beau avec toutes ces couleurs qui brillent. Dixit la presse locale.
C’est l’occasion aussi pour beaucoup de faire leur sortie de l’année, de s’endimancher un petit peu pour aller nager dans la foule en délire et pour une fois d’éteindre la télé...
Malheureusement les ensoutanés se sont réveillés et sur fonds d’ordre moral ont redonné à cette fête un caractère nettement plus grenouilles de bénitiers.
Processions aux flambeaux, exhortations à respecter les injonctions meurtrières de Jean Polski, contritions pour nos péchés passés présents et futurs, humilité et hypocrisie s’étalent dans l’odeur douçâtre de l’encens.Ce 8 décembre nous n’en voulons pas !
Le 8 décembre c’est l’occasion d’être nombreux à venir manifester notre refus de l’ordre moral, du sexisme, de l’homophobie et notre volonté de nous battre pour un avenir où les homo-trans-bi-hétéros et tous les autres préfixes de sexuel pourront avoir un statut d’existence et soient reconnus en tant que tels, un avenir où les droits des hommes et des femmes seraient égaux, un avenir ou il n’y aurait plus un amour « propre et normal » mais plutôt une libération sexuelle. Vous l’avez compris il ne s’agit pas de venir à un enterrement mais bien de faire la fête et de faire du bruit.
À BAS L’ORDRE MORAL ET VIVE LES PÉDALES (ET TOUS LES AUTRES) !
PLAISIRONS NOS DÉSIRS !
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