Le 6 juin dernier a été présenté devant le Conseil économique et social le plan national concerté 2006-2010 sur l’emploi des seniors. Un accord national interprofessionnel a été signé avec les « partenaires » sociaux (les trois organisations patronales, Medef, UPA, CGPME, et trois syndicats sur cinq : CFDT, CFTC, CFE-CGC). Notons au passage que ce sont toujours les mêmes syndicats jaunes qui signent des accords allant à l’encontre des intérêts des travailleurEs. Ces mesures (31 propositions au total) figureront dans un projet de loi qui doit être soumis prochainement au Parlement. Un point n’est pas encore à l’ordre du jour : jusqu’à présent l’ANPE dispense les plus de 57 ans de recherche d’un emploi. Une possibilité que le gouvernement envisage de supprimer. Cette négociation, prévue par la loi sur les retraites de 2003 (encore un retour de bâton grâce aux syndicats qui collaborent avec le patronat), est destinée à améliorer le taux d’emploi des salariéEs de plus de 55 ans afin d’atteindre un taux d’emploi des 55-64 ans de 50% en 2010. Actuellement 37% des plus de 55 ans travaillent. Ces propositions ne font que remettre en question le droit à la retraite à 60 ans à taux plein pour les salariéEs, et le droit à cesser de travailler avant la fin de sa vie.
Un contrat dernière embauche et une mise en concurrence des travailleurEs
Le CDD senior : Création d’un CDD spécifique pour les chômeurEs de plus de 57 ans, inscritEs à l’ANPE depuis au moins 3 mois ou bénéficiant d’une convention de reclassement personnalisée, d’une durée maximale de 18 mois, renouvelable une fois. C’est le double de la durée maximale d’un CDD normal. Ce contrat est dérogatoire au code du travail. Il introduit, tout comme le CPE, une discrimination par l’âge. Il permettra au patronat de maintenir pendant trois ans des salariéEs âgéEs dans une situation précaire. Pour unE chômeur ou chômeuse de 57 ans ou plus il pourra être proposé un CDD de 18 mois, renouvelable une fois, tandis qu’unE salariéE de 55 ans bénéficiera d’un CDD ordinaire, pouvant potentiellement se transformer CDI. Ainsi, au sein de la catégorie statistique de l’Insee des "55-60 ans", il y aura un traitement différencié entre les travailleurEs sur la base du seul critère d’âge, sans aucun autre élément justifiant cette différence. Les chomeurEs et précaires n’auront pas d’autres choix que d’accepter ces contrats.
Contrat initiative-emploi : 20 000 sur les 50 000 prévus en 2006 seront réservés aux chômeurEs de plus de 50 ans. Rappelons que l’’employeur reçoit une aide publique et que comme tous les contrats spécifiques, il amène bas salaires et précarité de l’emploi.
Des acquis sociaux et des protections face aux licenciements qui s’envolent
Interdiction de la mise à la retraite d’office avant 65 ans : Certes, les mises en préretraite sont le moyen favori des entreprises pour la réduction de leur effectif. Celles-ci ne pourront plus mettre à la retraite d’office des salariéEs de plus de 60 ans (réforme Fillon sur les retraites en 2003). Mais c’était aussi la possibilité pour certainEs travailleurEs de partir en retraite après des décennies de travail difficile grâce à des accords de branches autorisant le départ anticipé en retraite avant 65 ans. Le plan ferme cette possibilité pour tous les nouveaux accords. Ceux en vigueur devront être révisés par les partenaires sociaux et s’arrêter au plus tard le 31/12/2009.
Suppression de la contribution Delalande : Créée en 1987, cotisation versée par les employeurs licenciant unE salariéE de plus de
50 ans, elle sera définitivement supprimée à compter du 1er janvier 2010. Le gouvernement estime que c’est « un frein à l’emploi des seniors ». L’embauche d’unE salariéE de plus de 45 ans ne sera plus passible de la contribution en cas de rupture de contrat. En tout cas c’est un frein au licenciement en moins ! Cette contribution rapporte 500 millions d’euros par an, dont la moitié est reversée à l’assurance-chômage. La disparition de cette ressource est inquiétante. Car au-delà de la perte d’un financement, cela présage de nouvelles attaques et pressions sur les chômeurEs. Il va bien falloir compenser le trou dans la caisse en radiant un peu plus de chômeurEs !
Quand le MEDEF rêve d’esclaves à vie
Cumul emploi-retraite pour les bas salaires : Jusqu’à présent, le cumul d’un salaire et d’une pension retraite est autorisé lorsque celui-ci ne dépasse pas le montant du dernier salaire perçu. Si unE salariéE est payéE au smic avant de prendre sa retraite, le cumul de sa pension et de son nouveau salaire ne pourra pas dépasser le smic. Le plafond de revenu sera désormais fixé à 1,6 smic. C’est surtout officialiser que des travailleurEs ayant leur 40 ou 42 annuités pour leur retraite soient obligéEs de travailler pour compenser le faible montant de celle-ci. Et c’est pervertir encore un peu plus la redistribution des retraites.
Valorisation de la retraite progressive : elle permet aux salariéEs de plus de 60 ans de poursuivre une activité à temps partiel en touchant une partie de leur pension. (ouverte aux salariéEs justifiant 150 trimestres de cotisation.). Tout est bon pour que les travailleurEs poursuivent une activité au-delà de 60 ans : aménagements d’horaires ou par exemple « valorisation » des salariéEs âgéEs par des missions de tutorats auprès des autres travailleurEs.
Augmentation de la surcote : La réforme des retraites de 2003 a instauré une surcote incitant à travailler au-delà des 40 à 42 annuités nécessaires pour une retraite à taux plein. Actuellement, les salariéEs qui continuent à travailler au-delà de 60 ans bénéficient d’un bonus pour leur retraite de 3 % par année travaillée. Ce taux sera maintenu à 3 % la première année, puis porté à 4 % les années suivantes et à 5 % au-delà de 65 ans.
Le ministère de l’emploi indique que 10 millions d’euros de crédits supplémentaires devraient être débloqués : 3 millions pour des « actions de gestion prévisionnelle de l’emploi dans les branches » (sic !), 2 millions pour « l’amélioration des conditions de travail dans les entreprises » (une goutte d’eau, au vue du nombre d’entreprises et des difficultés rencontrées par les salariéEs), 5 millions pour le financement d’une campagne d’information grand public qui devrait débuter en septembre. On est content de voir l’argent dépensé dans une propagande pour le travail au profit du patronat.
Ne nous y trompons pas, tout ceci n’est qu’une mascarade pour faciliter les conditions d’embauche et les licenciements par les employeurs et surtout remettre en question le droit à la retraite et limiter la répartition des richesses. Le libéralisme se dissimule derrière des plans mis en place par le gouvernement avec le soutien de syndicats trahissant encore une fois les travailleurEs. Sous prétexte d’aider les travailleurEs, chômeurEs ou retraitéEs ou de « relever l’économie de la France » se cache une destruction systématique des acquis sociaux au profit de quelques nantis. Car parallèlement à ce plan « senior », c’est 15 000 fonctionnaires qui ne seront pas remplacéEs après leur départ à la retraite.
Compléments d'info à l'article