« Le soleil n’est pas pour nous », pop’potins

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Courant août, le capitaine Mallet, responsable du commissariat de Bron, déclarait avec ingénuité : « Ceux qu’on doit le plus surveiller ne partent pas en vacances ». Voilà ce sympathique gradé pris en flagrant délit d’aveu spontané : la police est faite pour fliquer les pauvres. En échange, les pauvres remuent un peu parfois. Histoire de réchauffer l’été.

Pas de justice…

Vendredi 28 juillet, la BAC attrape un jeune « visiblement sous l’emprise de l’alcool », lors d’un contrôle routier place J. Ferry, et lui colle un « outrage et rébellion ». Etrangement il n’est pas question d’alcotest ni même de conduite en état d’ivresse dans le communiqué de presse. Nouvel outrage constaté trois jours plus tard : un individu de 30 ans est interpellé pour avoir craché au passage d’une voiture de police. Samedi 5 août, pas de crachat mais des insultes (les flics ont l’ouïe fine même au volant) et la dépense de salive est payée de la même monnaie : « outrage à agent ». Le lendemain encore : contrôle-outrage-rébellion à Caluire… tout ça donne une idée du rythme pour l’été : à croire que les flics ont décidé de s’offrir une petite prime estivale sous forme de « dommages et intérêts pour préjudice moral ». Le 29 août trois personnes sont interpellées après une tentative de vol sur le chantier du futur hôtel de police, avenue F. Faure. Deux jours plus tard 7 taggers sont interpellés au métro Hénon, trahis par la vidéo surveillance alors qu’ils tentaient de re décorer des rames de métro. Jeudi 28 septembre 2 jeunes filles de 15 et 20 ans sont interpellées rue du 4 août à Villeurbanne, pour « outrage à une patrouille de police » ; elles résistent à l’interpellation, sans succès.

Vendredi 4 août, un homme de 33 ans interpellé en scooter et en état d’ivresse prend six mois fermes [les joies de la récidive 1]. Vendredi 25 un jeune majeur attrapé sur un scooter exproprié prends six mois fermes. Mercredi 30 août, Slimane F. est condamné à deux ans de prison fermes pour « l’extorsion » d’un paquet de clopes. C’était sa douzième condamnation [les joies de la récidive 2], et il écope en prime de 1000 euros de dommages : soient un mois, six jours et 50 euros par cigarette. Le même jour un sénégalais de passage dans le Rhône pour rendre visite à un ami est condamné à un mois de prison ferme pour « séjour irrégulier ». Jeudi 7 septembre 33 bulgares en vendange sont interpellés à leur camping pour « occupation illégale d’un terrain appartenant à autrui » (une petite nouveauté des lois Sarkozy) : quinze sont expédiés en centre de rétention et comme il ne reste plus de place les 18 autres écopent d’un « simple » Arrêté Préfectoral de Reconduite à la Frontière. Rafle dans les vignes dès le lendemain : 40 interpellations au faciès, et autant d’APRF. Jeudi 14 septembre le tribunal prononce une peine de deux mois fermes à l’encontre de Saït K., pour le vol d’une pomme dans une épicerie du deuxième arrondissement (6 mois avaient été requis initialement par le procureur). Le 5 octobre R. est condamné en comparution immédiate à quatre mois de prison ferme, pour le vol d’un baladeur MP3 (il avait été déposé directement à la gendarmerie par un conducteur TCL zélé et collabo). Le 30 septembre un détenu met le feu au matelas de sa cellule ; il est présenté au parquet le 10 octobre pour « dégradations volontaires de bien privé par incendie ».

… Pas de paix !

Courant juillet la tension monte dans le quartier Ménival. Provocations policières, caillassages, un flic est légèrement blessé et en réponse les patrouilles et les contrôles s’accentuent. La casse vise de plus en plus le mobilier urbain (matériel de la mairie, abribus…). Dans la nuit du samedi 5 au dimanche 6 août un centre commercial de Vénissieux est cambriolé : des individuEs non identifiéEs se sont laisséEs enfermer dans les locaux avant de prendre la fuite par un accès de service. Mardi 8 août la piscine de Vénissieux est attaquée par des jeunes (une dizaine de vitres sont brisées, plusieurs interpellations ont lieu à la suite). Le même jour, à Bourg, deux flics sont blessés dans un accident de voiture : sirènes hurlantes ils ont percuté un autre véhicule alors qu’ils se rendaient sur les lieux d’une fausse alerte (au centre commercial Carrefour). Dans la nuit deux fourgonnettes de chantier sont incendiées chez Sobeca à Lent. Mercredi 9 août dans le quartier Terraillon à Bron, un équipage de police est à la recherche de deux individus qui viennent de se soustraire à un contrôle d’identité ; en arrivant à la hauteur d’une terrasse de café les flics sont accueillis par des insultes, des pierres, des canettes ; les chaises volent et la flicaille se replie précipitamment. Aucune interpellation à déplorer, même une fois les renforts déployés (pour la petite histoire, deux mois après le rade qui a servi de décor à l’échauffourée écopera d’une fermeture administrative ; c’est d’autant plus mesquin qu’il semble être tenu par un bon citoyen, adepte de la vidéo surveillance et tout).

Samedi 19 août quinze bagnoles flambent dans le quartier Jacquard à Saint-Etienne. La même nuit, rodéo aux minguettes, boulevard Lénine : la BAC est appelée en renfort et se ramasse une volée de projectiles ; 4 CRS sont légèrement blessés en aidant à procéder à l’arrestation de deux jeunes qui tentaient de dissimuler des motos. Une voiture de flics part dans le décor en tentant de rattraper un motard qui se fera malheureusement choppé plus tard. Un personne est interpellée place Carnot, à Lyon, après avoir jeté une bouteille sur une patrouille de police. Le 21 un vigile de super marché se fait marav’ en essayant d’empêcher une auto réduction. Quatre adolescents sont interpellés un peu plus tard. Mardi 22 août deux jeunes se font choppés après un incendie de voiture à Villeurbanne. La même nuit une ford fiesta est lancée contre les portes de la station de métro Mermoz-Pinel, puis incendiée. Vendredi 25 un flic est blessé (15 jours d’ITT) suite au contrôle de deux SDF. Samedi 26 plusieurs départs de feu sont constatés dans des HLM désaffectés de Roanne. La flambée dure cinq heures. Mardi 29, dans le huitième arrondissement, une ford fiesta (encore) est projetée au travers de la baie vitrée du collège Jean Mermoz (pour fêter la rentrée ?). La brigade de sûreté départementale est toujours sur le coup… A Meyzieu un centre commercial est cambriolé : une centaine de bouteilles sont sorties par un trou découpé dans le toit. A Vaux des pierres sont jetées contre la police : une interpellation.

Jeudi 7 septembre une résidence étudiante de l’Ecole de Management de Lyon est ravagée par un incendie « criminel » (après avoir été la cible de cambriolages dans les semaines précédentes). L’ensemble du bâtiment est condamné et hors d’usage. Un contrôleur TCL se fait claquer à Saint Fons (le fraudeur turbulent est appréhendé). Le 8 septembre une « enveloppe piégée » est adressée à l’ANPE d’Oullins. Après investigation le « contenu suspect » sera identifié comme un mélange à base de curry. Autre colis suspect le même jour à la gare Part Dieu ; l’esplanade est évacuée, un périmètre de sécurité d’une centaine de mètres établi : les valises contenaient du linge et un ouvrage sur la vie des cheminots. Au centre commercial voisin un vigile se prend une mandale mais parvient à maîtriser courageusement un voleur de casquette…

Dimanche 10 septembre des flics interviennent à Vaulx-en-Velin après un incendie de moto ; caillassage à la hauteur du Chemin des Echarmeaux : un élève gardien de la paix se ramasse une pierre dans la figure et perdra l’usage de son oeil. Des témoins désignent vaguement les jeunes aux BACs arrivés en renfort et deux interpellations auront lieu dans la foulée. Deux autres personnes sont arrêtées par la Brigade de Sûreté Départementale le mercredi 20 septembre : une balance aurait identifier le lanceur qui, malheureusement, s’est un peu vanté de son geste dans le quartier. Samedi 16 septembre, le centre de loisir de l’entraide Pierre Valdo est saccagé pour la deuxième fois en 15 jours (quarante vitres pétées, des graffitis un peu partout et une cuisine et un baby-foot saccagés). Jeudi 21, un équipage de police intervenant sur un tapage nocturne est la cible de jets de canettes rue de Bonald, dans le septième arrondissement. Trois jeunes sont interpellés. Le 23 trois bagnoles sont cramées rue brûlard, dans le 3° arrdt. Jeudi 28 septembre un policier du commissariat de Villeurbanne se suicide à son domicile, avec son arme de service.[…] Un contrôleur TCL est pris à parti tabassé à la station Saint Jean, le 29 septembre (trois jeunes de 14 à 15 ans seront interpellés suite à cette affaire, début octobre).

« L’incendie, un monde qui grandit… »

Mardi 3 octobre une personne est interpellée sur les coups de 6 heures du mat’ à Caluire. Un peu plus tôt une bagnole avait été incendiée (mettant le feu à deux autres caisses et noircissant une façade au passage). Jeudi 5 octobre 12 bagnoles crament dans un parking sous terrain à Villeurbanne ; une vingtaine d’autres sont endommagées dans l’incendie. La même nuit, sur les coups de deux heures du matin un distributeur automatique de billet est arraché à Mostel (fiche technique : découper le socle à la disqueuse, utiliser un camion comme bélier puis tracteur, câbles à l’appui ; penser à brûler le camion une fois l’action de ré appropriation accomplie). Plusieurs dizaines de millier d’euros de préjudice (pour le crédit agricole) et de gros dégâts en prime (pour l’agence). Incendie d’un bus dans le dépôt TCL de Villeurbanne (la structure du hangar est touchée, ainsi qu’une caisse et un moto garées à proximité). Dimanche 8 octobre, un jeune de 17 ans est interpellé à Saint-Priest pour avoir balancé divers projectiles en direction d’une bagnole de flics.

Mardi 10 octobre : « Vive tension dans le quartier Belleroche à Villefranche » ; dans l’après midi une patrouille de municipaux est appelée pour une affaire « nuisances sonores ». Les flics, visiblement désœuvrés, tentent de contrôler un conducteur de scooter roulant sans casque quand une trentaine d’habitantEs rappliquent en soutien. La police nationale intervient pour disperser l’attroupement. En face deux personnes cagoulées en profitent pour attaquer à coups de pierres une bagnole de condés, stationnée à distance. Jeudi 12, incendie d’un garage dans le 7° arrondissement. Dimanche 15 : des flics et des pompiers appelés pour des feux de poubelles dans le quartier Belleroche, à Villefranche, sont accueillis par une trentaine de jeunes en capuches et cagoules. Jets de pierres, et de bouteilles. Une voiture flambe un peu plus tard et deux cocktails molotovs sont balancés sur les flics sur les coups de 23 heures. Aucune interpellation. Le lendemain trois autres bagnoles sont cramées. Plusieurs équipages de la BAC de Lyon sont appelés en renfort. Le 18 octobre, à la mi journée, des sacs de feuille s’embrasent à Vaise. Le 19 un jeune de 16 ans est interpellé suite à l’agression de deux contrôleurs TCL, gare de Vaise. Vendredi 20, une salle appartenant aux témoins de Jéhovah est incendiée dans le quartier du Garret, à Villefranche.

Mardi 24, vers cinq heures du matin, un gardien de la paix qui allait prendre son service au commissariat du premier arrondissement croise quatre jeunes sur la place des Terreaux, qui l’identifient comme flic. Il l’admet, et le revendique même, et finit par se faire gentiment éclater (quinze jours d’ITT). Ses adversaires se sont faits choppés sur le fait par une patrouille qui passait inopinément dans le coin (et ils ont dû passer une salle garde à vue ; même le journaliste du progrès présent au moment de leur incarcération parlera de « visages marqués par l’interpellation »). A 18 heures, le train Lyon Avignon se fait caillasser aux environs de Saint Fons. Dans la nuit quatre voitures et plusieurs poubelles flambent encore à Villefranche. Mercredi 25 : incendies en série. Un bus stationné rue des Martyrs à Vénissieux est entièrement cramé. Feu également dans un parking sous terrain de Pierre Bénite. Feu de cave à Villeurbanne. Plus tôt dans l’après midi des bus des lignes 44, 66 et 89 se font caillasser à la Duchère (9°arrdt).

Et tôt le matin un officier de la PJ de Lyon a fait une chute mortelle en Maurienne, au cours d’une partie de chasse.

Jeudi 26 octobre, la cour d’appel de Lyon confirme le non-lieu pour les flics qui ont assassiné Nicolas Billotet en mars 2003 (huit balles dans la tête et la poitrine tirées au cours d’une intervention « ne nécessitant pas le recours à la force », d’après la Commission Nationale de Déontologie pour la Sécurité). Vendredi 27 : des voitures crament à Bron, aux Minguettes (Vénissieux) et à Vaulx-en-Velin. Des bus TCL sont également caillassés sur le territoire de ces deux dernières communes. Dimanche 29 : dès 18 heures des petits groupes très mobiles munis d’engins incendiaires commencent à mettre de l’animation dans l’Est lyonnais. Les feux de poubelles et de voitures se multiplient en début de soirée à Saint Fons, Villeurbanne et Vénissieux (32 caisses brûlées). Des bus, des camions de pompier et des bagnoles de flics sont la cible de jets de pierres. 12 voitures sont incendiées la même nuit à Saint Etienne.

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