Dans un monde soumis à la rationalité économique, les salariés sont contraints d’intégrer les nouvelles valeurs concurrentielles que le capitalisme instaure à l’échelle européenne et mondiale : disponibilité et flexibilité, esprit de compétition, arrivisme, consommation frénétique, travail non payé...
Des millions de travailleurs sont réduits au chômage et à la précarité. Ceux qui travaillent doivent s’estimer privilégiés et se taire en subissant le harcèlement de la hiérarchie et la souffrance engendrée par la course à la productivité. D’après les statistiques officielles de 2001, 3,5 millions et demi de salariés vivent en dessous du seuil de pauvreté fixé à 601 euros par mois. Selon le seuil retenu par l’Union Européenne, ce sont 7 millions de personnes en France qui vivent avec moins de 722 euros mensuels.(chiffres Insee - 2001). Un tiers des sans abris ont pourtant un emploi mais ne peuvent plus payer des loyers exorbitants. Dans le seul département de Seine-St-Denis, 5000 enfants errent « sans adresse fixe, dont les besoins primaires ne peuvent être satisfaits. » (Le Monde du 11 janvier 2005)
Les champions de la croissance industrielle détruisent les richesses de l’histoire humaine en les transformant en marchandises. Ils pillent les ressources naturelles et délocalisent le travail là où l’exploitation de la main d’œuvre est la meilleure. Les patrons de l’économie, les politiciens et tous les réalistes qui prétendent penser à notre place, nous incitent à accepter la misère matérielle et sociale, dont ils se préservent dans leur univers hautement sécurisé, mais ils n’ont pas de réponse à la misère des relations et des sentiments humains, dans un monde où la brutalité s’exprime d’abord par des abstractions : les pauvres ne sont que des chiffres et des variables statistiques, des coûts sociaux qu’il faut réduire, voire supprimer. Alors la figure du pauvre redevient figure dangereuse, et la violence légale de l’Etat réprime la révolte dans ses prisons. Car tout le monde sait bien que par ailleurs, les riches sont de plus en plus riches. Patronat, gouvernement et nouvelle bourgeoisie technocratique étalent leur ignoble moralisme dans leurs 600 m2 et, sans gêne, tentent « symboliquement » de culpabiliser les salariés en exigeant d’eux le devoir de solidarité des pauvres envers les pauvres. (suppression d’un jour férié, le lundi de pentecôte, où les salariés doivent répliquer par une grève massive, des manifestations revendicatives et le boycott des commerces et services ouverts ce jour-là, 16 mai !)
La solidarité c’est refuser ensemble de courber l’échine ! La solidarité, c’est l’auto-organisation et l’entraide !
Le monde du salariat accumule les échecs : en France, après le démantèlement des retraites, ce sont l’ensemble des services publics, le système éducatif, la Sécurité Sociale et la santé, les règles et garanties du Code du Travail qui sont maintenant attaquées avec la collaboration ou la passivité des grandes centrales syndicales. Le syndicalisme représentatif organise le défoulement rituel et met en scène le simulacre d’une contestation revendicative désarmée et inoffensive, où le moindre mouvement de convergence des luttes est rendu impossible. Les responsables comptabilisent les manifestants pour le marchandage salarial, mais ils évitent surtout de faire du tort à la sacro-sainte économie, là où les salariés ont pour arme décisive dans le rapport des forces, la possibilité de frapper à la caisse. Entre exploiteurs et exploités, la CNT a choisi son camp !
Si la grève générale ne se décrète pas, elle se prépare et elle s’organise !
Les solutions sociales alternatives au monde barbare qui s’organise sous nos yeux (la Constitution Européenne prône « une économie sociale de marché, hautement compétitive » Art. 1-3), ce sont celles que nous mettrons en œuvre nous-mêmes, là où nous vivons. Comme en témoignent la multiplication des initiatives collectives de base, l’auto-organisation en assemblées générales pour débattre et décider, et l’action directe par les individus concernés, à partir de leurs lieux de travail et des structures collectives où ils se rencontrent quotidiennement, peuvent construire un mouvement vivant d’émancipation qui ne soit pas à la remorque des mots d’ordre parachutés et des stratégies politiciennes. Ce n’est pas la voie facile où l’on s’en remet à d’autres, mais c’est la seule méthode qui ne reproduise pas les clivages du monde actuel et qui puisse nous permettre de « Vivre tous, mieux et autrement . »
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