Peine plancher : la fabrique de la haine

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L’application de la peine plancher pour la tire à de très jeunes majeurs, c’est foutre en l’air leur avenir professionnel, leur volonté et leur possibilité d’insertion, sans compter la fabrique de la haine, à coup sûr.

Djamel a 19 ans, il est accusé de vol avec violence.

Djamel est arrivé au début de l’adolescence en France. Il a grandi au Maroc et il est arrivé dans un quartier populaire de la banlieue parisienne il y a quelques années. Il côtoie un peu la délinquance et se met à la pratiquer. Plusieurs vols sont inscrits à son casier, 10 exactement, des affaires banales qui se répètent. Plus une affaire de stup’ et une de violence, c’est un parcours classique pour un presque mineur en grande difficulté. Et quand il le peut, il travaille en intérim.

Plus récemment ses parents décident de l’envoyer loin de la banlieue parisienne, chez un cousin à Lyon, pour le faire changer de quartier et peut-être d’avenir. Djamel continue à travailler un peu dans des « boulots de mort » en intérim, fait des stages et demande une formation professionnelle de maçon coffreur.

La veille du premier mai, avec un pote mineur, bien avinés tous les deux, ils dépouillent un homme d’une cinquantaine d’années dans le centre ville. Djamel lui met des coups, n’entrainant pas d’ITT [1] pour l’homme, avant que la police n’interpelle les deux garçons.

À l’audience du 2 mai, Djamel est accusé de vol aggravé ; aggravé par la violence (les coups portés sur l’homme) et la réunion (il était accompagné d’un mineur).
L’homme s’est porté partie civile et demande que ses lunettes, son sac et les frais de consultation du médecin lui soient remboursés, soit l’équivalent de 600 euros.

Le procureur demande l’application de la loi sur la récidive, dite loi sur les peines planchers. Cette nouvelle loi (8 aout 2007) dispose qu’en cas de récidive, le prévenu doit être condamné à un peu moins de la moitié de la peine maximale prévue par le code pénal. Pour le vol aggravé, le législateur a prévu sept ans de prison au maximum et la peine plancher est donc fixée à trois ans.
L’avocat de Djamel plaide pour pour que le Tribunal n’applique pas celle-ci, en insistant sur le parcours difficile de son client, et les espoirs d’« insertion » qu’il laisse tout de même paraître. Pour Djamel il semble que l’application d’une peine mixte (c’est à dire de la prison ferme et du sursis, avec des obligations fixées par le Tribunal) soit plus adaptée à sa situation que trois ans de prison ferme, issue purement répressive. D’autant plus qu’il existe la possibilité pour le Tribunal de donner une peine qui évolue en fonction de l’application ou non des obligations fixées par la justice.

L’application de la peine plancher pour la tire à de très jeunes majeurs, c’est foutre en l’air leur avenir professionnel, leur volonté et leur possibilité d’insertion, sans compter la fabrique de la haine, à coup sûr.

Le Tribunal a appliqué la peine plancher et condamné Djamel, 19 ans, à 3 ans de prison ferme, après un procès qui a duré 28 minutes, une défense qui a été préparée en une heure par un avocat qui a reçu le dossier dans la matinée qui précède l’audience.

Notes

[1Période pendant laquelle la victime est incapable d’effectuer les actes ordinaires de la vie.

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