En lisant aujourd’hui le journal, j’apprends qu’un homme de 76 ans, dont les autorités refusent de révéler le nom, a été placé en garde à vue pour s’être « attaqué » à coups de marteau à l’urinoir de Marcel Duchamp exposé en ce moment à Paris dans le cadre de l’exposition sur le Dadaïsme.
Le malheureux va être jugé pour avoir égratiné une oeuvre qu’on se complet à estimer à 3 millions d’euros.
Moi, je n’appelle pas cela du vandalisme, mais une performance !
Je pense que les dadaïstes auraient applaudi cette action et que Marcel Duchamp lui même s’en serait largement réjoui. L’homme ne regrette d’ailleurs rien. En 1993 il avait déjà uriné dans la « Fontaine » lors d’une exposition au carré d’art de Nîmes.
Profitons de l’événement pour remettre les choses en place : qui s’attaque vraiment au dadaïsme ? Est-ce cet homme dont l’attitude insensée et provocante aurait séduit n’importe quel dadaïste ? Ou bien est-ce l’odieux marché de l’art d’aujourd’hui ?
Rappelons les faits :
Une exposition dadaïste à Pompidou qui fait 350 000 visiteurs et dont les organisateurs se gardent bien d’annoncer les indécentes recettes financières qu’elle engendre. Une oeuvre d’art, la « Fontaine » en question, qui avait été refusée au salon des Indépendants de New York lorsque Marcel Duchamp l’a présenté en 1917, considérée comme scandaleuse, et aujourd’hui « estimée » à 3 millions d’euros. Si Marcel Duchamp savait çà, le pauvre, il se retournerait dans sa tombe, lui qui était le plus ardent combattant de la sacralisation de l’art. C’est d’ailleurs le thème qu’il développait dans cette oeuvre.
Et le jour même de l’ouverture de cette exposition, « Libération » faisait sa Une en détaillant un soi-disant retour au dadaïsme, invoquant le « Non à la constitution européenne », le « fait de porter un chapeau » comme des actes dadaïstes. Je crois rêver. Le dadaïsme ne semble n’avoir jamais été aussi incompris qu’aujourd’hui !
C’est pourtant simple. Prenez un peu de provocation pure - pour faire trembler la bonne conscience - un fervent militantisme anti-guerre, une insoumission au grand Capital, un profond besoin de changer les normes imposées par l’art « officiel », de le dé-sacraliser, renvoyez Léonard de Vinci et Molière d’où ils viennent, laissez faire le hasard et l’innocence, et là, à ce moment là seulement, vous vous approchez du dadaïsme.
Ainsi, lorsque l’homme avait uriné dans l’oeuvre, il était tout à fait dans le juste, puisqu’il s’agit d’un urinoir ! J’ajouterai même qu’à partir du moment où les négociants d’art, les instigateurs de « l’art sacré » s’en sont emparé pour l’exposer dans la plus grand musée français, alors cette oeuvre dadaïste cesse d’être une oeuvre pour redevenir un simple urinoir, et donc, il est normal que notre homme puisse pisser dedans s’il le désire.
Allons même plus loin, par fidélité aux essences mêmes du dadaïsme, détruisons Toutes les oeuvres dada dont on se permet d’estimer un prix !
Je tiens donc par ce message à exprimer toute mon admiration à cet homme qui est surement l’un des derniers dadaïstes qui mérite ce titre.
Monsieur l’inconnu de 76 ans : Merci !
Joseph Paris
http://www.josephparis.c.la
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