Retour sur le procès en référé de l’expulsion de la Maison Mandela par la Métropole

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Droit d’asile bafoué ? Droit au logement opposable et à la mise à l’abri d’individus vulnérables, par la mise à disposition dans des lieux vacants, bafoués ?

«  Peut-être les démocraties ont-elles toujours été des communautés de semblables, et donc (…) des cercles de séparation. Il se pourrait qu’elles aient toujours eu des esclaves, un ensemble de personnes qui, d’une manière ou d’une autre auront toujours été perçues comme faisant partie de l’étranger, des populations en excédent, indésirables, dont on rêve de se débarrasser et, à ce titre, "totalement ou partiellement privées de droits". Cela est possible. »
Achille Mbembe, Politiques de l’inimitié.

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Georges Perec

Procès en référé de la Maison Mandela : notes du 11 juin, suite au Tribunal d’Instance :

Aucun représentant des familles actuellement hébergées et citées au Tribunal n’est présent.

Selon l’avocat de la Métropole :

  • Le collège prévu sur les parcelles concernées doit ouvrir en 2022, il n’y a donc plus de temps à perdre pour effectuer les dernières procédures avant la démolition de la Maison Mandela qui dit être effective en octobre 2018 et pouvoir commencer ensuite le chantier de construction.On veut faire passer la Métropole pour le « méchant loup » et pour l’agresseur… mais si le chantier prend du retard à cause des gens qui squattent la Maison Mandela, il y aura des pénalités de retard … qui seront en fin de compte à la charge de la collectivité via les impôts !
  • Sur plusieurs points, l’ordonnance du 12 mars dernier est vraiment surprenante et défie toutes les règles juridiques de notre pays :
  • Il est dit par exemple qu’on ne peut pas expulser les squatters parce qu’il y a « absence de contrat de bail » … c’est n’importe quoi ! les militants d’Agir Migrants sont entrés dans le bâtiment par « voie de fait », ce qui est incontestable et qui est même revendiqué par le collectif Agir Migrants. Au sens de la loi, entrer par voie de fait signifie simplement « pénétrer et se maintenir dans un bâtiment sans l’accord du propriétaire ». C’est bien le cas à Mandela … et on ne voit pas comment le propriétaire pourrait, dans ces conditions, signer un droit de bail !
  • Autre argumentation fallacieuse de la défense d’Agir Migrants : « on ne peut pas identifier vraiment les occupants ! Agir Migrants se croit au-dessus des lois alors qu’il viole le droit de propriété.
  • Ce n’est pas parce qu’ils auraient mis 2 ou 3 coups de peinture sur les murs que le bâtiment cesse d’être dangereux pour les occupants comme le prouvent les rapports d’expertise amiante et plomb.
  • Il faudrait soi-disant respecter le « droit à la proportionnalité » dans l’application de la loi : compte tenu que les personnes sont à la rue et dans la misère, ce serait moins grave de s’approprier le bien d’autrui au mépris du respect du droit de propriété ! Mais ce droit s’impose et le droit de proportionnalité (droit européen) ne s’applique pas au juge judiciaire dans le cadre du Tribunal d’Instance !
  • Les squatters « originels », ceux qui ont ouvert le squat, s’autorisent le droit de dire qui a le droit de rentrer et de sortir … sans tenir compte de la présence de plomb et d’amiante !
  • La défense des squatters veut absolument mélanger la question de la Maison Mandela à l’ensemble du projet et notamment à la question de l’expulsion de l’autre squat, celui du 12 rue Baudin (Amphi Z) en argumentant que tant que la question du bâtiment 12 rue Baudin n’est pas réglée, il n’y a pas lieu de précipiter la démolition de la Maison Mandela … mais c’est n’importe quoi ! D’abord, le 12 rue Baudin n’appartient pas à la Métropole mais au SDIS … donc cette question n’a pas lieu d’être abordée ici, au Tribunal d’Instance, puisque, ici, c’est l’action et la responsabilité de la Métropole qui sont en jeu … et rien d’autre ! D’ailleurs, sur le 12 rue Baudin, le Conseil d’Etat a été saisi et doit donner son argumentation après-demain (mercredi 13 juin) … On verra donc à ce moment-là pour cette question !
  • Le collectif Agir Migrants s’auto justifie par des « témoignages » qui viennent seulement de m’être remis … mais ces témoignages, dans leurs formes actuelles, n’ont aucune valeur juridique.
  • C’est pourquoi la Métropole demande l’expulsion immédiate de tous les occupants actuels ainsi que de « tout occupant de leur chef » qui pourrait éventuellement venir prendre la suite des occupants actuels. La métropole demande donc que le Tribunal refuse le délai de 2 mois (puisque les gens sont entrés par voie de fait) et tout autre délai !
  • On n’est pas ici dans une république bananière : on est dans un Etat de droit !

Selon l’avocat d’Agir Migrants :

  • Il aurait été possible de demander le renvoi pur et simple de l’affaire car les décisions d’aide juridictionnelle n’ont pas pu être transmises … Au contraire, nous ne demandons seulement un délai !
  • Le droit de propriété si défendu par la partie adverse existe effectivement … mais il doit être apprécié au regard d’un autre droit qui existe également, un droit fondamental : le droit au logement ! et c’est en fonction de ce droit au logement que la décision du Tribunal doit être modulée. Or nous sommes devant des familles qui sont en demande d’asile ou qui sont reconnues « prioritaires » au sens de la DALO !
  • Concernant la dangerosité du bâtiment à cause de la présence d’amiante et de plomb, il faut arrêter de dire n’importe quoi pour faire peur : dans ce bâtiment, la Métropole y logeait encore des locataires il y a encore moins d’un an ! Donc, à ce moment-là, la présence d’amiante et de plomb était loin d’être une priorité !! Et les expertises demandées par la Métropole elle-même sur les échantillons prélevés le prouvent : nous sommes à un degré niveau 0 et niveau 1 de risques … c’est-à-dire à des niveaux où il n’y a absolument aucune mesure à prendre (niveau 0) ou seulement de repeindre certains murs pour éviter que la peinture ne s’écaille (niveau 1) …. Ce qui a déjà été fait par les habitants ….
  • Le projet actuel de construction d’un lycée porte bien sur plusieurs parcelles … qui appartiennent effectivement à plusieurs propriétaires (dont le SDI) … mais ce sont les parcelles d’un même projet ! On n’imagine donc pas le début des travaux si le devenir de l’ensemble des parcelles n’est pas réglé !!!
  • Le report des travaux, s’il y a report, n’est pas dû aux squatters mais à la Métropole elle-même qui a voulu aller très vite sans avoir en sa possession les documents nécessaires : c’est le cas du Tribunal Administratif de Lyon qui a débouté récemment la Métropole car elle n’a pas agi « au fond » mais sur les procédures …
  • Enfin il est important de signaler que, en ce moment même, les députés et les sénateurs planchent justement sur la loi ELAN (loi sur le logement) et que, dans ce cadre de discussion, un nouvel article (article 9bis) vient d’être adopté par la majorité gouvernementale pour permettre l’utilisation des bâtiments vacants pour du logement d’urgence …
  • C’est pourquoi, la défense d’Agir Migrants demande un délai d’un an. En ce qui concerne le délai de 2 mois évoqué par la défense de la Métropole pour demander que ce délai ne soit pas accordé, il est important de rappeler que le Tribunal a effectivement la possibilité de supprimer ce délai … mais, comme précisé dans la loi, ce n’est qu’une possibilité, laissée à l’appréciation du Tribunal !
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Suite aux deux plaidoiries, l’avocat de la Métropole a voulu reprendre la parole … mais la Présidente lui a fait comprendre qu’on avait bien entendu son argumentation et qu’il n’était pas nécessaire de la fournir une deuxième fois !! Il n’a donc pas insisté.

Décision de la Présidente : Mise en délibéré de 15 jours (-> 25 juin 2018) … (ou est-ce, l’accord d’un délai de 15 jours avant décision ?)

Soutien à tous les collectifs, à tous et toutes les occupants et occupantes, mis à l’abri dans les lieux vacants, à tous les demandeurs d’asile.

Appel à soutien contre l’expulsion de la maison Mandela assignée par la Métropole le lundi 11 juin

la Maison Mandela, un ancien bâtiment vacant de la Métropole, abrite et sert de refuge depuis le mois de janvier aux personnes sans-abri qui avaient été expulsés de l’esplanade Mandela près du quartier de la Part-Dieu. Le 12 février 2018 des membres du collectif Agir Migrants ont été assignés (...)

12 juin 2018
Retour sur le procès du squat « la Maison Mandela » : verdict le 12 mars

Pour défendre la réquisition citoyenne d’un immeuble vacant « la Maison Mandela » lieu d’hébergement des migrant.es sorti.e.s du bidonville face à l’esplanade Mandela, le collectif Agir Migrants appelle à un rassemblement devant le Tribunal d’instance de Villeurbanne (3 rue Dr Pierre Papillon, (...)

19 février 2018

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