Plutôt que de mornes AG : nous organiser !

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Quelques considérations sur le spectacle des Assemblées Générales étudiantes à Lyon 2 ces derniers jours, et quelques pistes pour continuer autrement...

Parmi celles et ceux qui découvrent pour la première fois ce qui se déroule sur les universités [1], nombreux sont-il-le-s à connaître immédiatement un sentiment de lassitude et de dégoût. Tout semble minuté, orchestré, réglé par avance par une poignée de professionnel-le-s de la politique qui se font les dents sur leur premier public. C’est comme si rien n’était possible qui ne soit pas la même chose que toujours, que partout, et surtout comme si rien n’était possible autrement que par eux, une poignée de délégué-e-s autoproclamé-e-s.

Mais nombreu-se-s sont aussi celles et ceux pour qui ce n’est pas la première déception : 2005 et le CPE, 2007 et la LRU, chaque fois l’histoire semble se répéter.

Parmi les carriéristes professionnel-le-s de la politique, il y a principalement un syndicat : l’UNEF. Proche du presque-mort parti socialiste, ce syndicat n’en est pas à son premier coup d’éclat pour nous mettre des bâtons dans les roues pour empêcher la construction de toute mobilisation. Revenons sur l’exemple de l’automne 2007, lors de la grève dite contre la LRU : d’abord le syndicat n’est pas opposé à la LRU dans son ensemble (« il faut être lucide, blablablablabla. »). Puis voyant le vent tourner et des AG de centaines de personnes se dérouler sans lui, le syndicat participe au mouvement... environ 2 semaines. Fin novembre, il-le-s rencontrent Pecresse et viennent dans les AG nous apprendre à « terminer une grève », car nous sommes des « ados » excités qui ne comprennent rien à la politique. Ainsi les mêmes qui ces jours ci nous apprennent à nous mobiliser, il y a un peu plus d’un an appelaient à se résigner aux décisions gouvernementales. Individuellement, il-le-s sont nombreu-se-s parmi les bureaucrates de ce syndicat, à rêver de la même carrière parlementaire que leurs ainé-e-s du PS. Collectivement leur mot d’ordre est « réaliste » : ne luttons pas contre un gouvernement, un système politique, des dominants, des possédants, mais luttons plutôt contre « la trop grande précarité des jeunes » , et « pour des chambres du CROUS avec de la peinture neuve ».

Pourtant, au milieu de ce spectacle d’orateurs et d’oratrices, de la tristesse d’assemblées où l’on ne peut pas parler, pas échanger, et seulement écouter leur même programme qui ne bouge pas d’année en année, il faudra bien qu’il soit possible que nous tou-te-s – que nous découvrions pour la première fois ce genre de mouvement, ou qu’il nous soit plus familier– nous puissions construire ce que nous voulons construire. Nous pouvons donner ensemble au politique une autre place : celle d’instituer ce nous, par tout ce que l’on peut entrevoir à présent : des instants, des espaces, qui seront ce que nous voudront en faire, dans la rage et la joie. À commencer par tenter de faire de ces Assemblées des lieux autres, débarrassées de ses apparatchiks locaux qui reproduisent à leur micro-échelle de campus, le modèle que leur offre ceux qu’il-le-s prétendent combattre.

Prenons donc quelques exemples concrets :

- Une personne prévient l’AG qu’un rendez-vous est fixé par un groupe en ville à une heure donnée. Voilà, l’information est passée, pourquoi la soumettre à un vote ?

- De la même manière, il a été proposé d’élire un « comité de mobilisation ». A-t-on seulement discuté collectivement de ce que l’on mettait derrière cette expression ?

- Pourquoi ne pas discuter à beaucoup moins (30, 40, 50) d’un sujet, puis de mettre ça en commun à plus nombreux ? La charge de « rapporter » cette discussion n’a pas besoin d’être attribuée à quelqu’un par un vote, cela peut être un tirage au sort par exemple (dans lequel aucun spectacle, aucun jeu de pouvoir n’intervient).

Les exemples sont nombreux, profitons dès maintenant des AG pour en changer le déroulement.

Ce texte a été écrit par des personnes déçues de ce déroulement, comme elles avaient été déçues pendant le CPE, pendant la LRU, mais toujours déterminées à construire cette grève avec toutes celles et ceux qui voudront y prendre part.

Notes

[1Ce texte n’aborde pas les réformes des universités, ni les politiques gouvernementales en cours. Il s’agit simplement d’une mise au point pour avancer. Nous avons bien sûr aussi des choses à proposer sur ces sujets. Mais nous avons le temps d’en parler.

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  • Le 6 février 2009 à 12:41

    Pour en revenir sur le rôle des syndicats dans la mobilisation : de gauche comme de droite, c’est toujours l’avidité et l’ambition de tout contrôler, de mettre leur nom sur le mouvement et de s’attribuer la plus grosse part dans la « réussite » du mouvement qui prévalent sur le respect des étudiants non syndiqués.

    Quand je vois 200 étudiants, qui se retrouvent à une heure avancée dans un amphi merdique pour la même raison, et qui s’entretuent pour des sujets FORMELS, qui ne s’écoutent pas (une étiquette fse collée au manteau sucite quelques gargouillis dans l’assemblée), je me dis que le meilleur moyen de rater ce rendez-vous avec l’histoire de la contestation intelligente en France, c’est bien de se diviser.

    Et sans aller jusqu’à parler de véritables divisions : se battre contre des méthodes que nous utilisons ? Se battre contre le manque de parlementarisme chez les parlementaires (vous savez, tous ces types qui téléphonent, lisent le journal à l’assemblée), se battre contre le manque de concertation du gouvernement pour ses réformes, et JOUER CEME JEU en laissant le pouvoir de décision à une AG incapable de s’écouter... Où va t-on ? :D

    Le problème d’une voix qui s’éléve, c’est qu’il faut l’écouter. Et le système profite trop à certains pour que la démocratie commence dans nos AG.
    Tant qu’on ne sera pas une forme de modéle, une forme d’aboutissement, tant qu’on aura pas réussi là où ces vieux politiciens aigris ont échoués, on ne vaudra pas mieux qu’eux.

  • Le 6 février 2009 à 11:44, par dududupi

    Nous vivons étudiants dans des situations qui ne sont pas faciles, il faut l’avouer.
    Pour ma part je suis totalement en accord avec vous pour les soit disant partisans de l’Unef qui au lieu de privilégier la solidarité étudiante ne font que faire un combat de coq pour le pouvoir politique et ainsi impressionner avec des discours qui sont le plus souvent plats et totalement contradictoires.

    Mais je pense que nous devons aussi nous organiser avec les enseignants, voir si par un système avoir des cours en dehors des facultés. Brisé l’idée que les étudiants qui font greve ne font pas attention à leurs scolarité car il ne faut pas oublier cette aspect.

    Oui nous prenons aujourd’hui la décision d’aller dans la rue pour défendre nos droits mais faut -il pour autant négliger le fait que nous avons un avenir à assurer ? Que lorsque nous faisons grève nous sommes les premiers perdants ?

    Bien sur que la loi sur la réforme universitaire est un grand cafouillage, mais je le dis en toute conscience de cause : j’aimerais que nous trouvons étudiants, tous ensemble un moyen de ne pas nous jeter dans la gueule du loup.

    Pour ma aprt j’ai assisté à beaucoup d’Ag et je vous l’avoue au bout de 10 minutes l’envie de partir était immense ! Il faudrait peut etre essayer de programmer bien à l’avance ce qui va s’y dire et s’y faire. Maintenant je vous dis bon courgare à tous

  • Le 6 février 2009 à 09:29, par Ensemble

    Effectivement, l’Unef est évidemment surreprésentée dans l’écoute nationale et cela se répercute dans nos AG. Néanmoins accabler l’Unef pour des fautes de l’année dernière ne fait pas avancer le débat, il faut parler au moment ou les problèmes se créent et non plus de garder des rancoeurs.
    Aujourd’hui le gouvernement pousse toujours plus loin l’erreur. Il ne s’agit pas de se diviser.
    Enfin cet article est très interessant mais ne doit pas omettre que l’Unef n’est pas le seul malheuresement à dévier du fond et monopoliser les débats pour une guerre de pouvoir stérile. D’autres organisations sont fautives au même titre, si on accable certains, il faut accabler les autres qui ont les mêmes torts dans les AG.

    Merci pour ton article, organisons-nous sans que les syndicats soient omniprésents, envahissants voulant avoir toujours « plus raison » que tel autre et qu’ils comprennent que la « pastille » syndicat nous importe peu, le résultat lui, beaucoup plus.

  • Le 5 février 2009 à 16:52, par Ben

    Pour le mouvement contre la LEC-CPE, deux bouquins ont été écrits là dessus par des mobilisé-e-s :

    • Les mouvements sont faits pour mourir

    • Le CPE est mort, pas la précarité

    Peut-être quelques leçons à en tirer…

  • Le 5 février 2009 à 16:17

    Rappelons également qu’à lyon1, à l’époque du mouvement contre la LRU, des mandatés pour la coordination nationale, encartés à l’unef, avait trahi la parole de l’ag préférant suivre les appels de leurs petits chefaillons à quitter l’amphi. En tout cas, heureux de voir qu’au moins ici sur le campus de la doua, les affiches de l’unef ont été largement remplacées par de plus belles en rouge et noir...

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