Depuis une semaine, le monde braque subitement ses yeux sur Alep. Nous assistons impuissants à la chute des territoires libérés de la ville, mètre carré par mètre carré. Dans les médias, chaque nouveau commentateur contredit le précédent, les "civils" sont bloqués tantôt par les rebelles, tantôt par le régime. Le summum de la confusion consistant à présenter les Alépins comme une population inerte qui par milliers rejoindrait les zones du régime. Simultanément, l’humanitarisme européen met en scène son engagement du côté de la « vie humaine », et nous informe qu’il serait de bon ton désormais de « sauver Alep ». À l’horreur des massacres et à l’abjection de tant de lâcheté, s’ajoutent les discours et manoeuvres qui ne visent qu’à enterrer cinq années de révolution en Syrie, pour en réécrire l’histoire. (…)
Qu’est ce qui a déclenché les premières manifestations en Syrie, et ce basculement général ?
On voyait ce qu’il se passait en Égypte, en Tunisie, en Libye, à la télé. D’ailleurs avant qu’il se passe quoi que se soit à Deir ez-Zor il y avait des gens qui se faisaient arrêter parce qu’ils mettaient Al-Jazeera (qui était pro-révolutionnaire à ce moment là) dans leurs maisons ou leurs cafés. Mais à Deir ez-Zor, nous étions très coupés des autres régions, du fait de l’absence de technologies et de moyens quand bien même Deir ez-Zor produit 70 % du pétrole syrien !
Donc, on était pas très influencé par les informations, tout le monde n’ avait pas l’électricité, et les gens ne regardent pas trop la télé, ce sont surtout les vieux qui la regardent. Personne n’est sorti dans la rue grâce à la télé. Par contre, on avait internet. (…)Raconte alors comment vous vous êtes organisés pour les premières manifestations ?
J’avais 17 ans quand tout a commencé. Quand on sortait en manif on ne le disait pas à nos familles car elles auraient eu peur que l’on soit arrêté ou tué. On faisait les manifs après l’école, le soir.
Dans la première où je suis allé, nous étions trente personnes. Au début il y avait peu de gens puis nous avons été des milliers. Un des premiers slogans était « celui qui ne participe pas n’a pas d’honneur ».Pour s’organiser, on se parlait par téléphone sans dire directement les choses. Je vais vous raconter une manif du début qu’on a fait dans notre rue. On avait prévu ça entre lycéens à l’école. Nous nous sommes mis d’accord à plusieurs que nous dirions à nos parents que nous avions des cours particuliers. Les gens avec qui je me suis organisé à l’école étaient des gens que j’avais déjà vu à des manifs, c’est ça qui a aidé à reconnaître nos alliés. Nous avons donc fait une réunion à peu et chaque personne à cette réunion avait des amis qui connaissaient des gens. Chaque personne amenait donc sa bande de potes. En gros on a organisé cette manif entre nous. On avait déterminé un lieu de rendez-vous, et avant la fin des cours on est parti de l’école et nous sommes allés voir des amis dans une autre école pour leur dire « ce soir il y a manif ». C’était la première fois qu’il y avait une manif dans cette rue parce que dedans il y a un commissariat, un bâtiment de la sécurité militaire, une académie de police, un bureau de recrutement et un centre d’entraînement de l’armée. On pensait que personne n’allait venir à notre manif. A ce moment là, il y avait déjà eu des morts, il n’y avait pas encore de combats mais la police tirait sur les manifestants. (…)
>Hommage à Salvador Allende
Le samedi 28 septembre 2024, comme chaque année, l’Association France Amérique Latine AFAL commémore la disparition de l’ancien président chilien Salvador Allende, le 11 septembre 1973.
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