Camarades et membres du collectif vigilance,
Nous vous faisons parvenir cette lettre pour vous informer de notre décision mûrement réfléchie de ne plus participer au Collectif de Vigilance 69.
Nous ne nous reconnaissons plus aujourd’hui dans les pratiques et le positionnement politique du collectif.
Le CV69, s’est transformé en bureau de liaison bavard pour préfets et journalistes.
Nous ne nous reconnaissons pas dans cet "antifascisme républicain", prôné et défendu par des membres du CV69 - et en son nom - devant les journalistes. La république n’a jamais été un rempart contre la xénophobie, le racisme et l’autoritarisme. La politique récente du gouvernement français en est une excellente illustration. Le caractère ouvertement xénophobe de certaines déclarations politiques et les faibles résistances effectives que l’appareil d’État oppose ne doit nous laisser aucun doute là dessus.
La République Française est un outil du capitalisme destiné à la gestion apaisée des rapports de domination. Elle permet, par la mise en place de moyens de "concertation sociale", d’assurer la paix sociale et la reproduction du système, en maintenant la capacité d’organisation autonome des classes exploitées à son minimum.
Parce que nous luttons contre les émanations de l’extrême-droite, nous devrions être complice d’un consensus autour de la nécessité de faire "amiE-amiE" avec la préfecture ?
La préfecture est un organe chargé d’appliquer la politique de répressions sociales du gouvernement, tâche dont elle s’acquitte avec zèle. Si chaque année, plusieurs milliers d’étranger-es sont expulsé-e-s du territoire dans notre département, des dizaines de familles sont chassé-e-s de leurs domiciles, des militant-es sont molesté-es et poursuivi-e-s en justice, c’est bien du fait de la préfecture.
Comment pourrait il en être autrement puisqu’il est du ressort de la préfecture de perpétuer l’ordre capitaliste.
Le fascisme est un produit du capitalisme lorsque celui-ci est confronté aux effets conjugués de la crise et d’une offensive autonome des exploité-e-s contre les effets de cette crise.
Faire croire que l’ Etat et la préfecture sont de notre coté, qu’il suffirait de l’informer des agissements des groupuscules fascistes pour qu’elle les fasse cesser est un mensonge. Nous ne pouvons continuer de militer auprès d’une organisation qui désarme politiquement notre classe en créant des illusions sur la vraie nature de l’ Etat. En faisant cela nous nous plaçons du coté de ceux qui étouffent toute contestation pour perpétuer le système d’exploitation. Nous ne pouvons convaincre la préfecture, elle est autant notre adversaire que les fascistes.
L’antifascisme n’est pas républicain, il est stratégie de défense de classe !
Du point de vue de l’organisation du collectif il a été dit et répété en réunion que la division du travail militant au sein du collectif était intolérable. Nous n’acceptons pas que le travail « ingrat » d’information, de veille, les distributions de tracts, les services d’ordres et l’organisation des actions soient toujours assurés par les même personnes et organisations, qui ont vu toutes leurs énergies militantes monopolisées.
Cela a été flagrant dernièrement avec le rassemblement de Sos-tout petits, où le collectif est resté sillencieux et passif.
Par contre, il a suffit d’un mail évoquant un entretien avec un journaliste pour que la liste mail soit saturée de réponses d’individus et d’organisations toujours prompts à se mettre en avant.
Nous reconnaissons le travail abattu par le collectif pour informer de la situation de l’extrême-droite a Lyon.
Cependant, toute l’agitation autour de l’antifascisme lyonnais mériterait une réflexion collective, sur nos pratiques comme sur le fond. De fait, tout cela n’a aucunement freiné ni l’expansion des organisations fascisantes ni leurs activités et démonstrations.
Le collectif demande l’interdiction des organisations fascistes par l’action étatique. Nous lui rappelons à cet égard que la même loi utilisée pour dissoudre - on a vu avec quelle efficacité ! (cf. Pétain !) - les ligues fascistes dans les années 30, a été utilisé par le même Front Populaire pour réprimer les indépendantistes algériens de l’Etoile Nord-Africaine, puis, après 1968, pour dissoudre les organisations d’extrême-gauche. En répandant respect sacré pour les lois parlementaires et pour le pacifisme social, l’antifascisme républicain avait préparé le terrain pour ces mesures. L’interdiction d’expression de fait des organisations fascistes ne peut être le résultat que d’une montée en puissance sociale des prolétaires, au plan organisationnel, idéologique, pratique ; l’ interdiction légale des groupes fascisants n’a jamais empêché, a contrario, leur existence sociale, y compris au sein de l’appareil d’état.
A cet égard, nous analysons la montée actuelle de l’extrême-droite comme le résultat des défaites ouvrières et populaires de la dernière période - défaites dans lesquelles la gauche républicaine et conciliatrice et les abandons du mouvement syndical officiel ont une responsabilité majeure.
Nous refusons que notre combat soit dévoyé et récupéré par des organisations au nom d’objectifs électoralistes, ces mêmes organisations se refusent a mettre la main à la poche pour défendre nos camarades antifascistes.
Néanmoins, nous restons disponible pour l’unité dans l’action, y compris avec toutes celles et tous ceux qui sont prêt-e-s à défendre les " libertés démocratiques " sans défendre une position de classe conséquente. Nous refusons seulement de contribuer à répandre les illusions qu’ils se font sur le caractère protecteur d’un régime et d’un " droit " qui ont toujours été foulé aux pieds par ceux-là mêmes qui en ont la charge, dès lors qu’il s’est agi de défendre leurs privilèges de classe.
Pour l’heure, le meilleur rempart aux fascistes reste d’occuper et de récupérer le terrain abandonné aux organisations d’extrême-droite.
Dans nos facs, c’est la présence syndicale et d’organisations progressistes, qui militent, sont présentes, ont un ancrage dans le milieu étudiant qui sont à même de repousser et de combattre les idées réactionnaires, par la diffusion et la mobilisation d’un discours de classe. Cela est tout aussi vrai dans les quartiers, les entreprises, tous les milieux sociaux.
Ceux que nous devons convaincre, c’est le grand nombre de ceux et celles qui, victimes de la politique du pouvoir et des capitalistes, du racisme d’Etat ou du patriarcat, ont un intérêt réel et matériel à combattre le fascisme jusqu’au bout, y compris dans ses racines mêmes : le mode de production capitaliste et la société de classes.
Ce n’est pas par la pratique d’un antifascisme technocratique, folklorique ou de façade que nous assurerons la cohésion des classes populaires contre les exploiteurs et leurs sous-fifres, les militant-e-s d’extrême-droite !
Retournons développer et structurer nos propres organisations ! C’est ce que nous avons abandonné dans une perspective antifasciste depuis trop longtemps, et c’est une pratique que les militant-e-s d’extrême-droite, eux, ont bien compris !
FSE-LYON
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