Une matinée tranquille
Après une marche pour le climat, pas folichonne mais où l’on a pu prendre des nouvelles de la semaine, s’échanger des infos et voir une foule assez bigarrée, on se dit que le climat social est vraiment assez particulier. Il y avait un nombre assez impressionnant de manifestant⋅es. La police en a recensé 7 000 et les organisateurs en comptent 10 000. Le cortège réclame ainsi de la justice sociale et des mesures climatiques, et une grosse partie du cortège marque son soutien à la répression du mouvement lycéen. De nombreuses personnes portent leur gilet jaune, bref on sent que la rage couve. Je croiserais d’ailleurs pas mal de gens présents dans les 2 manifs (ou au moins autour des 2 manifs). Les flics sont assez tranquilles mais ils nous montrent bien que l’accès à la presqu’île allait être compliqué.
Le malaise s’installe
Je m’étais dit que j’irai voir les manifestations des gilets jaunes dans l’après-midi, histoire de voir, et de me faire un avis, sur le tas. Je croise le cortège au niveau de la place Raspail.
J’avoue que j’y ai été décontenancé. Les rumeurs courent que de nombreux fafs sont présents et tabassent des camarades de lutte rendant vraiment le moment particulier, tout cela participe à me rendre assez distant vis-à-vis de ce mouvement. Les différentes connaissances croisées se tcheckent et se demandent comment intervenir, en restant un peu extérieur, et en se disant que manifester à coté de l’extrême droite c’est vraiment pas évident.
Au fur et à mesure de l’arrivée de badauds, les flics se retrouvent entourés d’un côté par les gilets jaunes et de l’autre par des passants, des curieux, des habitants du quartier. Bref pour ma part je me tiens à l’écart et observe de loin. L’extrême droite semble bien s’être lancée à fond dans le mouvement [1], et compte y faire sa loi [2].
La manifestation se décale place Bellecour, la rue de la Barre est bloquée par des flics qui se retrouvent assez vite entourés, ils gazent alors pour se dégager.
Une fin d’après midi surprenante
Suite à ces multiples gazages de toute la population de la presqu’île sans discernement, se produisent des scènes ahurissantes en centre ville : des passants traversent les gaz lacrymo avec leurs courses de Noël sous le bras, des gilets jaunes font des aller-retours à travers le centre ville, des touristes font des selfies avec des nuages de lacrymos, les magasins exfiltrent leurs clients par les sorties de secours, des personnes se promènent sur la presqu’île équipées de masque de peinture, la BAC court dans tous les sens… la fête des lumière approche.
Les affrontements se cristalliseront à Bellecour. Les flics videront la place plusieurs fois avant que celle-ci ne soit de nouveau envahie par des touristes et des manifestants.
Au fur et à mesure que le temps file, je me sens un peu plus à l’aise dans la masse, elle est plus chaude et semble franchement plus amicale. En regardant Le Progrès le lendemain, j’apprends qu’une marche des identitaires avait lieu à 19h30, ce qui explique en partie que les fachos aient quitté le centre ville un peu plutôt. Un sentiment semble partagé quoique non verbalisé. Et si on réussissait à niquer cette fête des Lumières, la fête que nous haïssons tous, cette machine touristique, qui rend Lyon invivable. Et si on réussissait à leur montrer à ces touristes la violence symbolique qu’on se prend dans la gueule tout au long de l’année. Ce sentiment est vraiment diffus, mais le fait est que les flics lyonnais comme à leurs habitudes ont joué les bourrins. Ils n’ont pas hésité à calmer toute cette jolie foule venue célébrer leur 8 décembre loin des flambeaux, qui tentaient de se venger de leurs misères quotidiennes.
La situation en fin d’après-midi est due notamment à la technique de maintien de l’ordre de la police. Les petits groupes de police courant un peu partout sur la presqu’île, les voitures de flics roulant comme des fous au milieu de la foule, les lancées intempestives de gaz lacrymo et leur présence massive ont permis aux flics de participer à leur façon à la bordélisation de la fête des lumières.
Avec une sono, un petit groupe transforme l’angle de la place Bellecour et de rue de la Ré en dance-floor. Les flics n’apprécient pas, ils gazent la foule présente à cet endroit. Les touristes et les danseurs refluent, certaines s’énervent, les barrières sont mises au travers de la route, et ainsi de suite. Les gens se retrouvent au niveau de la place de la République. Les gens sont assez solidaires, qu’on soit touriste, lyonnais, jeune ou vieux. On souffle à peine que la brigade à Pastor [3] déboule sur plusieurs cotés de la place, matraquant sans distinction toutes les personnes présentes sur place, leur volonté était clairement de blesser des personnes. On peut constater d’ailleurs qu’ils ont réussi à en blesser plusieurs sans aucun problème.
Globalement je tire trois conclusions de cette journée :
Si les flics étaient moins des tarés de la gâchette il ne se serait rien passé. De par leur incompétence et leur violence gratuite ils ont énervé pas mal de gens.
Que la population dans la rue était bien différente en début d’aprem qu’en fin d’aprem.
Qu’il serait pas mal de réussir à affirmer une parole claire, portant effectivement sur la galère des fins de mois et l’écologie, sur des bases qui nous sont propres.
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