« La canaille...j’en suis ! » répondait Louise Michel lorsque, au siècle dernier, les tenants de l’ordre moral et de l’ordre social jetaient le discrédit sur des révoltés qui, poussés par la faim, pillaient une boulangerie, ou sur les révolutionnaires de la Commune. Le bon vieux « classe laborieuse, classe dangereuse » a toujours fait recette. Aujourd’hui encore, alors que certaines banlieues s’enflamment en affrontements entre jeunes et forces de l’ordre, cette équation est mise en avant et Sarkozy, sinistre de l’intérieur, n’hésite pas à jeter les qualificatifs de « racaille » qu’il « nettoierait au Karcher » pour exprimer sa haine de classe.
Pourtant cette « racaille » dont parle le ministre, à Clichy-sous-Bois, à Montfermeil comme à Vaulx-en-velin, ce sont bien souvent nos élèves ou d’anciens élèves de nos établissements et de nos écoles. Des jeunes issus des classes populaires voire défavorisés, souvent aussi issu-es de l’immigration, et qui savent que la véritable insécurité c’est le chômage, la précarité, l’incertitude de l’avenir et les pratiques d’une police chauffée à blanc par un ministre oscillant entre populisme et relent d’extrême-droite.
Alors quand des jeunes poursuivis par la police trouvent la mort comme à Clichy-sous-Bois ou sont sévèrement blessés puis hospitalisés comme au Mas du Taureau à Vaulx-en-velin, tout peut basculer dans la violence et l’affrontement. Cette implosion de violence n’est alors que l’expression d’un affrontement et d’une révolte, consciente ou plus souvent inconsciente, contre un système qui marginalise socialement, qui exclut dans l’accès aux richesses produites et qui fabrique chaque jour un peu plus de misère et de précarité.
Bien sûr ces implosions de violence ne résoudront rien et ce n’est pas une solution que de s’en prendre aux équipements urbains utiles à toutes et tous ou aux biens individuels de ses voisins tout autant concernés par les difficultés économiques et sociales.
Bien sûr tous nos élèves ne participent pas à ces affrontements car il existe encore une ligne de partage entre ceux qui ont encore la tête hors de l’eau et ceux qui ont déjà coulé.
Néanmoins, ces affrontements sont l’expression d’une jeunesse populaire de banlieue réunie par le fait d’être soumise à la précarisation générale de la société, l’incertitude de l’avenir et la criminalisation sociale et souvent raciale.
Croire que l’école est un « sanctuaire » coupé de la société et de ses problèmes c’est faire le choix de « la politique de l’autruche » ou accepter implicitement les choix sociétaires antisociaux et inégalitaires des classes dirigeantes actuelles. L’école n’est que le reflet de la société qui l’entoure et toutes les plus belles idées et pratiques pédagogiques seront limitées par la reproduction sociale et la société de classe.
CNT Éducation 69.
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