L’article 14 du projet de loi Engagement et proximité, déjà voté au Sénat, est examiné à l’Assemblée en commission dès le 6 novembre et en séance à partir du 18 novembre.
Ce projet de loi est un outil d’exclusion massive pour des dizaines de milliers de personnes installées sur terrain privé : précaires du logement, Voyageurs, occupants d’habitats légers et réversibles...
Il permet au maire de prononcer une astreinte, au plus égale à 500 euros par jour, à l’encontre de toute personne installée pour vivre ou survivre sur un terrain privé, dans un abri ou un habitat non reconnu par les règles d’urbanisme municipales, tel qu’une yourte, tente, maison de paille, cabane, caravane, véhicule habité, mobil-home...
Pourtant, il dispose déjà d’un arsenal législatif conséquent pour sanctionner les infractions aux règles locales d’urbanisme : il peut constater l’infraction et saisir le juge qui examine le bien-fondé de la demande et entend la défense selon le principe fondamental du contradictoire. Avec l’article 14, il pourra, sans passer par le juge, prononcer une sanction en violation du droit à la défense. Le voilà juge et partie, puisqu’il est aussi l’auteur des règles d’urbanisme. Ce nouveau pouvoir lui permet d’évincer encore plus rapidement les habitants qu’il juge indésirables. Et même s’il ne veut pas devenir shérif, ses électeurs adeptes de l’entre-soi pourraient l’y contraindre.
Une mesure anti-pauvres, anti-Voyageurs et anti-habitats légers
Depuis des siècles, les populations nomades sont stigmatisées et chassées. Aujourd’hui encore et malgré les obligations, les « gens du voyage » sont trop souvent privés de lieu d’accueil ou relégués dans des zones classées Seveso comme à Rouen.
De plus, la crise du logement s’étend, alimentée par la spéculation et le logement cher, provoquant notamment le rejet de précaires du logement loin des métropoles, dont une part s’installe dans des véhicules et stationne sur des terrains privés. Nombreux sont aussi ceux pour qui l’habitat léger est une réponse à la crise environnementale, une issue à la crise du logement et aux délitements des politiques d’inclusion.
Pourtant le maire peut décider, ou non, de créer des zones d’implantation d’habitats légers et réversibles, un accueil pour les Voyageurs ou les saisonniers, ou des terrains familiaux. L’État, quant à lui, qui doit imposer ou accompagner ces dispositions, fait preuve d’inaction coupable.
Nombreux sont ceux pour qui l’habitat léger est une réponse à la crise environnementale et du logement.
Le plafonnement de l’astreinte à 25.000 euros est, aussi, lourd de sens. Elle condamne l’occupant, en sus de la saisie des quelques biens qu’il détient – véhicule, terrain …– à vivre dans la pauvreté et le dénuement. En effet, le fisc veille au « retour à meilleure fortune », c’est-à-dire que l’occupant devra payer cette astreinte dès qu’il gagnera un peu plus que le RSA. En revanche, cette astreinte représente peu pour le propriétaire d’une villa de luxe qui s’exonère des règles d’urbanisme pour construire ce qui lui plait...
Cet article 14, sous couvert de sanctionner plus efficacement le non-respect des règles locales d’urbanisme, a tous les caractères d’une mesure anti-pauvres, anti-Voyageurs et anti-habitats légers. Ses conséquences — notamment jeter le plus grand nombre sur les trottoirs — sont d’une grande brutalité.
Il faut des lois et des politiques d’inclusion plutôt que d’exclusion
Il faut prévenir plutôt que punir et donc imposer la création, en nombres suffisants, dans les documents locaux d’urbanisme, de lieux d’accueils décents, collectifs et/ou familiaux, de zones d’habitations légères et réversibles.
L’article 90 du projet de loi Loppsi 2 avait déjà prévu d’expulser sans le juge et sur décision du préfet les occupants d’habitations non conformes. Mais le 11 mars 2011, le Conseil constitutionnel l’avait abrogé, jugeant qu’il était « sans considération de la situation personnelle ou familiale, de personnes défavorisées et ne disposant pas d’un logement décent » et « opérait une conciliation manifestement déséquilibrée entre la nécessité de sauvegarder l’ordre public et les autres droits et libertés ».
C’est pourquoi nous demandons d’ores et déjà au gouvernement et aux députés de retirer purement et simplement l’article 14 du projet de loi Engagement et proximité et de produire des lois et des politiques d’inclusion plutôt que d’exclusion !
Premiers signataires :AITEC
ADGVC44
AFVS (asso des familles victimes de saturnisme)
ANGVC (Asso. Nat. des Gens du Voyage Citoyens)
Advocacy France
APATZI
Association des fils et des filles du camps de Salliers
Association Abraham Mazel
ATTAC
Bagagérue
CEDETIM
CLCV
CLIVE
Col. Logement Paris 14
Collectif Roms 95
COPAF
CRLDHT
Droit au logement (DAL)
Désobéissance fertile
Fondation Abbé Pierre
FARE
Fédération des acteurs de la solidarité (FAS)
FNASAT
Fondation Copernic
FTCR
Habitants de logement éphémères et mobiles (HALEM)
Hameaux légers
LDH France
Mémorial des nomades de France
Mouvement national chômeurs et précaires (MNCP)
Ouvertures du cœur (ODC)
Observatoire des droits des citoyens itinérants (ODCI)
Pas Sans Nous
ELIER
SNPES-PJJ/FSU
Syndicat de la Magistrature (SM)
TCHACHIPEN
Union Syndicale Solidaire
Union des Tunisiens pour l’Action (UTAC)
>Grande réunion publique. Hébergement : Luttons pour les droit oubliés
Arrêt du plan froid, délai pour obtenir un titre de séjour aberrant, remise à la rue des jeunes majeurs à 21 ans, Des dizaines de mineur.es non accompagné.es à la rue, famille et enfants sans hébergement d’urgence, contrôles de police devant les lieux d’hébergement, RSA conditionné, expulsions...
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