Le 7 décembre s’est tenue une réunion publique du Centre d’Étude sur les Réseaux les Transports et l’Urbanisme, animée par le Forum Français pour la Sécurité Urbaine, avec pour thème " sécurité et démocratie : comment faire entrer les problématiques de sécurité urbaines dans les politiques d’aménagement urbain ". « Au début, le porte parole du Forum a présenté son réseau européen : le Forum au niveau européen en gros a trois axes forts 1) faciliter l’échanges des bonnes pratiques entre villes européennes 2) mettre en place des formations en commun 3) une activité de lobbying auprès des instances de l’union, pour obtenir des subventions... Sinon le forum développe des partenariats avec des grandes villes en Chine, ou avec La Paz, Lima et Mexico » ...
Sécurité et liberté d’entreprendre
Après, la réunion commence et on apprend des choses à propos de la "norme européenne de prévention situationnelle" [1] qui doit déterminer nos futurs paysages urbains. À l’initiative de ce projet on trouve essentiellement des groupes privés (des groupes immobiliers, des assureurs, des boîtes de sécurité) ... et son application ne dépendra pas d’une décision politique au niveau des états membres, mais d’un petit jeu des grandes compagnies d’assurances : vu que les compagnies adoptent la norme en question, le prix des polices d’assurance explose si un constructeur ne respecte pas le principe de "prévention situationnelle"... Autrement dit la norme entre en application grâce aux providentielles lois du marché. Ensuite, de l’aveu même des intervenants, les agences immobilières prennent le relais et augmentent le prix du logement pour les zones "sécurisées".
Éthique sécuritaire
Pour ce qui concerne la situation locale, le débat a tourné d’abord autour de l’utilisation de la vidéo surveillance comme "outil de prévention, de sécurisation et de recherche de preuves", sur l’agglomération lyonnaise. D’emblée, un adjoint à la sécurité pour Villeurbanne et la COURLY s’est voulu rassurant : la surveillance exercée par les caméras de la ville est forcément démocratique puisqu’il y a un "comité d’éthique" susceptible d’intervenir en cas d’abus... Le problème se poserait d’avantage pour tous les réseaux privés (caméras de la Part Dieu, des TCL [2]) qui ne sont pas soumis au contrôle de cette instance forcément morale.
Bien sûr une personne indélicate pourrait objecter que, pour saisir ce comité d’éthique, il faut déjà avoir une idée du genre d’images sélectionnées ; or il n’y a que le comité éthique, dans la mesure où il serait saisi au préalable, qui puisse demander à les consulter... Bon. Mais pour les manifestations politiques par contre le premier adjoint est formel : c’est dans la charte, la ville ne communique pas ses images aux RG qui pourtant le demandent régulièrement. Par contre, évidemment, si des faits sont "constatés" par la police, alors là les opérateurs leur communiquent les images (« pour ajuster les moyens à la situation ») et les bandes (pour faciliter les condamnations) Autant dire que ce genre d’éthique ne coûte pas grand chose...
Droit de cité
Maintenant tout le monde n’est pas égal/e face aux objectifs : les pouvoirs publics prennent d’abord en compte le "revenu moyen" ou le "rapport du nombre des propriétaires par rapport au nombres de locataires", pour mesurer la "dangerosité sociale" ou le potentiel d’insécurité d’un quartier. Et les études sont formelles : « il y a un courant criminogène qui remonte la rue Victor Hugo le samedi après midi, quand arrivent les trains de Saint Étienne et Givors »... De l’aveu même des opérateurs, le travail de vidéo surveillance consiste d’abord à "viser les casquettes" : sous ce registre de la lutte contre l’insécurité, il s’agit d’abord de renforcer le contrôle des pauvres et des sauvageon/nes.
Récapitulons : dans notre joli monde sécurisé, l’instance souveraine, c’est la compagnie d’assurance ou le cabinet immobilier ; la population, c’est d’abord "les commerçants et les professionnels du secteur" ; l’ennemi, c’est les pauvres, la faune du train Saint Étienne-Givors... C’est une belle leçon de démocratie que nous offrent ces perspectives sécuritaires.
Larsen Lutin
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