Hommage au résistant lyonnais Nathan Chapochnik

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Le 20 Avril 2009 disparaissait brutalement à Lyon Nathan Chapochnik, résistant lyonnais FTP MOI (Franc Tireur Partisan, Main d’Oeuvre Immigrée). Retour sur son parcours pour lui rendre hommage, avec notamment la Résistance, les sabotages et les actions de guérilla avec le bataillon Carmagnole...

Il avait bien voulu en octobre 2007 parler de sa vie et de ses actions à RADIO CANUT, en direct dans l’émission BISTANCLAQUE.

Nathan CHAPOCHNIK n’avait pas d’âge , enfin c’est l’impression qu’il donnait quand on le rencontrait et qu’on parlait avec lui. Et pourtant à 89 ans toujours en pleine action et avec plein de projets en cours, son coeur l’a lâché.

89 ans et presque 80 ans de militantisme

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Fils de juifs ukrainiens immigrés en France pour fuir les pogroms, il est né à Paris le 9 novembre 1920. Né français et républicain, il le reste même quand à 20 ans, la France n’est plus républicaine. Fin 40, il colle déjà des affiches antinazies sur les murs de Paris.

En décembre 1941, il s’installe à Lyon avec sa famille, poursuivant son activité professionnelle d’ouvrier fourreur à domicile. Il entre en contact avec les Jeunesses juives de Lyon, qui deviendront l’Union de la jeunesse juive (UJJ) avec qui il participe à des actions clandestines : collages d’affiches, distributions de tracts dans les transports en commun, les cinémas.

Les camps de concentration, il le dit, il le savait déjà depuis longtemps. L’étoile jaune il ne l’a jamais portée, il n’en était pas question. Tout de suite il a voulu se battre contre le nazisme et ses suppôts français, se battre vraiment, et il devient, sous le nom de "Francis", un des premiers membres des groupes FTP-MOI, donc un clandestin.

En juin 1942 c’est avec son camarade et beau frère Simon Zaltzerman (dit "Fred") qu’il est détaché de l’UJJ auprès des FTP-MOI : c’est ainsi qu’ils deviennent les deux premiers membres du bataillon CARMAGNOLE, formé à Lyon en juillet 1942, un des plus actifs maillon de la Résistance.

La résistance, des sabotages et des actions de guérilla avec le bataillon Carmagnole

Le 11 novembre 1942, pour accueillir les Allemands il est sur la passerelle Saint Vincent en couverture des résistants qui lancent la grenade qui n’explosa pas.

A partir du 11 novembre 1942, il participe avec Zaltzerman et Kugler à des actions armées contre les troupes allemandes et des sabotages de camions, de transformateurs électriques... ainsi que beaucoup d’autres actions contre les occupants dans la région lyonnaise. Il en contera quelques unes.

Il assurera pendant un temps le fonctionnement de l’imprimerie clandestine de l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) à son domicile avenue Thiers à Villeurbanne, avant de lui trouver une cachette plus sûre. Vers la mi-mars 1943, il rentre dans la clandestinité totale cessant tout contact avec sa famille et toute activité professionnelle pour ne se consacrer qu’à la lutte contre l’ennemi nazi : « Ni travail, ni famille, ni patrie ».

Le 27 mai 1943, une opération pour récupérer des tickets d’alimentation se passe mal et son beau frère Simon Zaltzerman (dit Fred) est blessé, puis capturé et sera guillotiné.
Le 4 décembre 1943, il allait être guillotiné à la prison Saint-Paul par les soins de la "justice" française de Vichy. Le juge responsable de la condamnation sera abattu par un groupe FTP MOI de CARMAGNOLE. Pour échapper à sa condamnation, il quitte Lyon pour Grenoble, avec le bataillon Liberté, ce qui formera le bataillon Carmagnole-Liberté. Il sera à l’origine de la création, avec une douzaine de compagnons, du maquis Le Chant du Départ près du Mont Aiguille...

Puis il part à Nice où il devient "Paul", responsable militaire des FTP MOI du département. Grâce aux liens qu’il développe avec l’Armée secrète, il
parvient à armer ses groupes. Ainsi le maquis de Peille reçoit un parachutage d’armes et d’explosifs. Les actions se poursuivent contre l’occupant allemand : destructions de camions, d’une usine d’air liquide, attentat à la bombe dans un café, contre un blockhaus ; jusqu’à sa blessure
au Cros-de-Cagnes, le 6 juin 1944, qui l’oblige à interrompre ses activités. Il poursuit toutefois l’instruction militaire de groupes de combat (Arméniens)
jusqu’à la libération de Marseille le 15 août 1944.

Après la guerre il s’engage dans l’armée, et assez vite on l’envoie en Indochine. Mais comprenant tout de suite qu’il n’est pas question pour lui de devenir un artisan du massacre du Viet Minh [1], il démissionne de l’armée en 1951.

Il reprend ensuite à Lyon sa vie civile et de militant oeuvrant pour la cause de ses compagnons disparus dans la lutte (97 morts au combat sur les quelques 200 membres de CARMAGNOLE et LIBERTÉ), au sein de l’ANACR, et pour celle de la justice sociale et des droits des travailleurs. Avec d’autres résistants et déportés, Nathan participait activement à l’activité en direction des scolaires du Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon.

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Marcel Bertone

Quelques jours avant sa mort, place Bertone sur le plateau de la Croix Rousse, il prononçait le discours de l’hommage annuel rendu au résistant lyonnais assassiné Marcel BERTONE et « Chapo », comme on l’appelait dans son quartier, parlait « du devoir de mémoire à poursuivre après notre disparition »...

NATHAN , nous y sommes.

P.-S.

En plus de pouvoir enregistrer cette émission Bistanclaque de Radio Canut, on peut emprunter à la Bibliothèque de la Part-dieu une vidéocassette VHS (82 mn.) : « Témoignage de Francis Chapochnik », enregistrée le 11 juin 1997 au Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon, qui contient des informations sur le bataillon Carmagnole et d’autres récits personnels sur la guerre 39/45, sur Lyon...

Notes

[1Ligue, créée par les Communistes en 1941, et qui regroupe tous ceux qui luttent pour l’indépendance du Viet Nam

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  • Le 20 mai 2016 à 08:45, par Mallet

    J’ai lu la biographie de « Chapo » que vous avez fait paraître. Elle fait renaître en moi l’admiration que j’ai toujours eue pour lui. Je l’ai bien connu et justement votre biographie me semble curieusement amputée. Après avoir compris la nature de la guerre d’Indochine, il ne rentre pas à Lyon, comme vous l’indiquez (sur quelles bases ?) mais s’installe à Paris. Militant de toujours il devient secrétaire de la cellule Hypolite Perrau quartier St Merri du 4e arrondissement. Il va y vivre maritalement et aura un garçon, dont le prénom m’échappe. C’est vers la fin des années 60 qu’il quitte Paris pour retourner à Lyon. Mon album photo personnel le montre de nombreuses fois dans les relations amicales qu’il entretenait avec mes parents. Je m’interroge sur cette amputation d’une partie important de sa vie. Cordialement. PM

  • Le 10 mars 2013 à 00:08, par Marcel BROCART

    LISTE DES HOMMES DU MAQUIS FTPF MOI DE PEILLE

    OUTCHAROV Jordan dit Marcel
    GERIBALDI Joseph dit Henri
    GUIRCHOWSKI David
    BIRTEL Théodore dit Albert
    PUNZI Gino dit Gino
    MIEDEL François dit Philippe
    CARLINO Pierre dit Louis
    MENTZER Eugène dit François
    CIPOLLA Marino dit Marino
    JARODAS Luber dit Slavie
    PYKA Paul dit Georges
    JENANTS Fernando dit Marti
    DELEUSE Paul dit Frank
    GAUBERTI René dit René
    BARBERA Pierre dit Pierre
    VAN DER GUCHT Laurent dit Laurent
    BEDOARERZT Paul dit Martin
    CIESLIK Ernest dit Heinz
    AME Renato dit Valentin
    GIGLA Joseph dit John
    BADURA Max dit Emil
    BIAYA Tladislar dit Franz
    DELEUSE Jean dit tita
    PEANO Joseph dit Titin
    GOLOLWDEK Joseph dit Félix
    ZIEMMTER Ehewald dit Leppi
    MICHEL François dit Michel
    GUGLIELMI Adolphe dit Chauffeur
    CAVALLARI Giovanni dit ?amil
    CRISTINI Antoine dit Gilbert
    BRIGATA Raymond dit Nizoi
    BALLIAN Jean dit Antoine
    SORBA Joseph dit Xavier
    MICHEL Gastaud dit Paul
    BERNARD Max dit Charlot
    FARINELLI Elvezio dit Franklin
    ALESIO Jacques dit Robert
    PULITI Richard dit Léon
    DANIEL Marcel dit Morint
    BOMIZZOMI Luipi dit Louis
    BELLOMI Vincenzo dit Vincent
    BOLAMI Laurent dit Laurent
    LENA Amélio dit François
    CANTONI Pierre dit Cirillo
    GAUBERTI André dit André
    FEDERER Zosenck dit Gontrant
    MANOSSIAN Antranique
    PEGHINI Simone

    Liste des gendarmes des brigades de Sospel et de la Turbie ayant rejoint le maquis de Peille :

    BERTREM
    DESCLAIR
    MARC
    DEVRON Henri
    MICHEL
    CLERIS
    MENTZER
    SAUSSAC dit Arsène
    SORBA
    ELLOUET
    BLANCO
    DESHAYES
    GUIGO
    BERNARD
    RI ?UIT
    ROUSSEAU

  • Le 26 décembre 2010 à 19:36, par Marcel BROCART

    Ma commune a abrité le maquis FTP-MOI d’ongrand.
    Je suis intéressé par cette période car les maquisards de ce maquis semblent avoir joué un rôle très important dans la libération de Nice.
    Mon oncle, André LAUGIER, m’a laissé des documents datant de la Libération de Peille.
    D’après les renseignements que j’ai pu recueillir, le maquis FTP-MOI d’Ongrand, était composé d’anciens des brigades internationales, la plupart de ces résistants étaient Juifs, d’autres étaient des anti-fascistes Italiens ou des pays de l’est.

    Je souhaiterai obtenir plus de renseignements sur ces résistants camarades de luttes de Françis CHAPOHNICK.
    Je souhaite compléter si possible les éléments déjà réunis de manière à laisser une trace aux nouvelles générations.

    Pouvez-vous me donner plus d’éléments sur ce maquis et me communiquer si possible des précisions sur ces femmes et hommes valeureux.
    Vous trouverez ci-dessous quelques noms.
    Merci de votre aide.

    Sincères salutations.

    LISTES DES FTP-MOI DE PEILLE

    Joseph GERIBALDI : Capitaine HENRI Chef des résistants FTP (Un de mes cousins originaire de Peille).

    Andreï TOMCZACK : Pologne

    Julia RAAS-BEER : Responsable jeunesse Commission aux effectifs.

    Max BRINGS : Allemand

    Alfredo GAMBASSI : Italien Commandant Ludovic.

    Jordan OUTCHAROV : Alias Marcel Bulgare.

    Augusto MUGELLI : Italien.

    Gino PUNZI : Italien Capitaine Gino.

    Albert ? : Chef de camp.

    Yves ? : Gendarme.

    Henri DEVRON : Gendarme tué à Peille Brigade de Sospel

     ? BERTREM : Commandant de la Gendarmerie de Sospel

     ? MUNTZER : Gendarme de la Turbie.

     ? DESCLAIR : Gendarme.

     ? CLERIS : dit Yvon Gendarme

     ? GIRI : Soldat Italien

    Antoine ? :

     ? ? : Soldat Polonais

     ? ? : Soldat Polonais

    Michel FEY - Jean OTTAVI

    Le Premier Parachutage : Appel Radio le 28- 29-30 mars 1944.
    Le Deuxième Parachutage : Appel Radio le 30 avril 1er mai et 2 mai 1944.

  • Le 14 juin 2010 à 17:50, par eliane chaponik

    Je voudrais simplement vous indiquer que j’ai pris la suite de mon oncle Nathan CHAPOCHNIK en tant qu’ami de l’ANACR (association nationale et anciens combattants et amis(es) de la Résistance)
    En effet, je siège régulièrement au sein du comité départemental de l’ANACR et organise désormais chaque année les commémorations à la mémoire de Marcel BERTONE (avril) et de Georges LYVET (15 juin)

    Je vous prie de croire, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs. ELIANE CHAPONIK

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