Ce n’est pas un suicide, c’est un assassinat !
Jerémy Martinez, jeune de 19 ans, originaire de St Étienne, est mort le mardi 4 mars 2008 des suites de blessures infligées dans la cellule de la prison de Valence où il était incarcéré depuis à peine trois mois. C’est le procureur de la République de Valence, Jean-Pierre Nahon, qui le dit : « Les résultats de l’autopsie, réalisée en Avignon, montrent que la personne décédée n’est pas morte des suites d’un suicide, mais d’un acte homicide perpétré vraisemblablement pas son co-détenu. Des traces de strangulation forte relevées sur la victime sont à l’origine du décès. »
En effet, on avait annoncé au départ, comme cela arrive souvent de la part de l’administration pénitentiaire, que ce jeune s’était suicidé. On avait retrouvé Jérémy inanimé dans sa cellule avec un sachet plastique sur la tête afin de faire croire qu’il s’agissait d’un suicide. La justice a fait diligence pour une fois pour reconnaître qu’il y avait bien un meurtre. Le procureur de la République a d’ailleurs ajouté : « Mais l’enquête devra dire si le sac, qui recouvrait la tête de la victime lorsqu’elle a été retrouvée, est une mise en scène ou pas. »
Après une enquête réalisée par le Collectif Solidarité Prisonniers de Valence, on peut se poser cependant un certain nombre de questions.
Jérémy n’avait aucune raison de se suicider, pourquoi avoir parlé de suicide ?
Les proches de Jérémy Martinez n’ont jamais cru à la thèse du suicide.
« Il ne voulait pas se suicider : il avait des projets, il préparait même sa réinsertion et devait sortir cette semaine avec un bracelet électronique pour passer un examen scolaire. » Condamné en comparution immédiate à un an de prison ferme pour vol, le jeune garçon, embastillé depuis mi-décembre, devait sortir dans la semaine-même après sa mort pour passer un examen. Quelle raison aurait-il eu de se suicider ? C’était un gamin comme les autres « qui aimait le foot et les jeux video ».
La maman de Jérémy n’a plus que son chagrin et quelques mots à lire de son fils qui pour rien au monde n’avait indiqué l’envie de se suicider. Ces mots concluaient toujours les lettres de Jérémy :
« Ma petite maman je vous aime plus que tout au monde. Quand je sortirai, je vous serrerai très fort dans mes bras. »
Le jeune suspect d’assassinat n’avait pas sa place en prison
Jérémy a sûrement perdu la vie à cause d’un malaise de son codétenu qui souffrait de malheureux troubles psychiatriques. Le meurtrier présumé, qui partageait la même cellule que Jérémy, a été placé sous mandat de dépôt criminel et sera entendu à la diligence du juge d’instruction chargé de cette affaire. Ce suspect, âgé également de 19 ans et qui ne connaissait pas sa victime, était en détention provisoire pour une tentative d’homicide sur son co-locataire depuis avril 2007. Une expertise psychiatrique avait été ordonnée dans le cadre de cette affaire, dont les résultats n’ont toujours pas été communiqués.
Ce drame humain aurait pu être évité par de nombreux mécanismes qui aujourd’hui n’appartiennent plus à la prison. Jérémy a pu être assassiné grace à la logique d’enfermement psychiatrique (rétention sécurité). Les politiques de droite comme de gauche sont responsables avec leurs logiques d’abandon de la réflexion sur les dégradations psychiques dû à la précarité. Depuis des années le secteur hospitalier a subi des coupes sombres, une dégradation des conditions de vie quotidienne, et un enfermement carcéral de plus en plus important de personnes présentant des troubles psychiatriques. On confond soins et peines ! L’enquête des magistrats a pour but d’alourdir l’avenir d’un jeune homme de 19 ans qui en fait est un malade psychiatrique, selon les dires du procureur.
Pourquoi l’administration pénitentiaire n’a pas écouté les craintes justifiées clairement exprimées par la famille de Jérémy ?
Jérémy Martinez se serait plaint durant trois mois, qui ressemblent à un calvaire, à plusieurs reprises de son codétenu. Cette affaire déjà atteint le sordide, pendant des semaines et des semaines un détenu est tabassé par son codétenu.
Deux jours avant les faits, sa soeur, sa mère et sa grand mère l’avaient vu au parloir et déclaraient : « Il avait des bleus au visage et dans le dos. Il avait même aussi très mal au bras. » Véronique, la maman de Jérémy, insistait : « Il nous a dit qu’il avait été battu par son compagnon de cellule ». Sa grand mère a déclaré « On a signalé ces coups à des membres du personnel pénitentiaire. On a demandé à ce qu’il soit vu par un médecin. »
Pendant les parloirs la famille la grand mère de Jérémy supplie les matons de faire intervenir le médecin pour changer Jérémy de cellule.
Aussi inquiétant que cela puisse paraître, ni le bricard de service, ni le médecin, ni le directeur de la prison n’ont fait le nécessaire !
Le personnel pénitentiaire dont la déontologie est de cibler les détenus qui jouent la comédie et de sanctionner ceux qui sont peu, ou moins soumis, n’ont pas tenu compte des propos de sa famille. C’est dans cet univers des laissés pour compte que ce drame humain s’est produit.
La responsabilité de l’administration pénitentiaire et de l’État reste totalement engagée ?
C’est évident, puisque le personnel pénitentiaire est au courant. La famille déclare « On l’a remis à son bourreau. C’est un scandale ! La responsabilité de la maison d’arrêt et de l’État est engagée. »
Responsable aussi la logique d’enfermement pratiquée par l’État à l’heure actuelle. Responsable aussi l’appareil judiciaire qui n’effectue pas les contrôles au minimum nécessaires. Responsable aussi l’Administration Pénitentiaire qui a été sourde face aux plaintes de Jérémy. Responsables aussi en bas de l’échelle sociale du contrôle sécuritaire : les matons.
Le capitalisme réussit à faire croire que la guerre de classes qui fait rage actuellement a quelque chose d’individuel (dans un malaise psychique). La guerre se retourne avec une guerre entre pauvres. Capitalisme assassin !
Mise en danger de la santé d’autrui...
Le médecin psychiatre qui intervient 4 heures par semaine à la maison d’arrêt de Valence a laissé un homme de 19 ans en très grande souffrance mentale à proximité d’un autre homme de 19 ans durant plusieurs mois. Les traces de coups sur le dos et le visage de Jérémy prouvent les tortures qu’il subissait par son codétenu.
La responsabilité de l’administration pénitentiaire et de l’Etat dans cette affaire est évidente. Magistrats, juges et procureurs sont pourtant censés veiller à la bonne marche de l’institution carcérale. Le Comité pour la Prévention de la torture chargé de contrôler les prisons françaises a observé de nombreuses fois des conditions de détention lamentables.
Cette tragique histoire met en évidence que le secteur médical est désormais inscrit dans la machine judiciaire au même titre que les juges et les matons. Nos corps enfermés, nos vies sont laissées au bon vouloir, à la sensibilité ou aux contrariétés du personnel pénitentiaire. Les médecins ont maintenant le pouvoir de prescrire des peines (loi Dati de rétention de sécurité).
Le directeur inter-régional des services pénitentiaires, déclarait : « Une enquête administrative est en cours à la maison d’arrêt ». Ce n’est pas pour autant que nous arrêterons de dénoncer les pratiques de grave mépris de la dignité.
Le racisme n’a-t-il pas favorisé ce meurtre ?
Jérémy faisait partie d’une famille des gens du voyage. Natif de St Étienne il a été enterré mercredi 12 mars dans cette ville. Mais l’horrible de cette histoire c’est que la famille de Jérémy faisant partie des gens du voyage, le racisme peut expliquer l’omerta qui enveloppe cette histoire. Même dans le Dauphiné Libéré, de magnifiques articles écrit par Benjamin Boutier et Fabrice Margaillan ont donné de nombreux témoignages dans ce domaine. Pourquoi ne l’a-t-on pas du tout écouté ? Voulait-on par racisme le laisser au rebut ?
On ne peut pas laisser la famille seule à se battre contre l’administration pénitentiaire. Soyons solidaires et soutenons la !
La prison tue !
La prison tue :
par manque de soin approprié, promiscuité...
par des mauvais traitements (mitard, isolement, fouilles à corps)
Vider la société de son contenu et de son essence pour mieux remplir les prisons, est-ce là le nouvel axiome du pouvoir en place ?
Incapable de gérer sans réprimer, inscrit dans l’exclusion des minorités, attaché à administrer les sous espaces sociaux par une ethnologie carcérale... mais on crève dans les prisons.
Le silence assourdissant des sans voix de cette ville de Valence empêche de visualiser une riposte dans cette ville nucléaire où tout le monde a peur de se montrer comme contestataire. Dénonçons cette histoire de meurtre entre pauvres, commis avec la complicité du personnel de la prison. Il ne faut surtout pas que ce meurtre de ce gamin de 19 ans reste caché au nom de la bonne conscience.
Supprimons les prisons !
Pour que ça n’arrive plus...
Ce meurtre impose un rassemblement devant la prison afin de soutenir la famille de ce jeune et dénoncer ces tortures infligées dans le cadre d’une institution d’un pays dit démocratique.
Rassemblement le MERCREDI 26 MARS à 16h30
devant la Prison de Valence (avenue de Chabeuil)
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