Au cours des deux derniers mandats présidentiels précédents, mais déjà
auparavant, les violations des droits humains fondamentaux ont été la
norme au Mexique : le massacre d’Aguas Blancas en 1995, celui d’Acteal en
1997, la répression visant les communautés indigènes de l’Oaxaca et du
Chiapas, les assassinats à Ciudad Juárez, massacre d’El Charco, l’entrée
en force de la PFP à l’UNAM lors de la grève des étudiants, la répression
à Guadalajara, les lâches assassinats de la compañera Digna Ochoa et du
compañero Pavel González, la répression à Lázaro Cárdenas, au Michoacán,
l’attaque sanguinaire de San Salvador Atenco et la répression infâme subie
par l’Assemblée populaire des peuples de l’Oaxaca (APPO) en 2006 le
démontrent amplement, pour ne rien dire des innombrables injustices
partout présentes.
Quelques mois seulement après la prise de fonction de Felipe Calderón, on
recense déjà de nouveaux cas de violation des droits humains. Le 26
février dernier, Ernestina Ascensión, une indigène nahua de
soixante-treize ans, était découverte agonisante, tout indiquant qu’elle
avait été violée sauvagement par des soldats du camp militaire situé à
quelques mètres de chez elle, dans la Sierra de Zongolica, au Veracruz.
Face à une telle ignominie, le président bâtard du Mexique, épaulé par la
Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), n’hésita pas à déclarer
que la victime était morte d’une violente "gastrite intestinale". C’est le
même climat d’impunité qui préside, le 13 avril 2007, à l’arrestation
illégale et brutale du compañero David Venegas Reyes, membre du conseil de
l’APPO, à qui la police de l’Oaxaca a fourgué 30 grammes de cocaïne et 2
sachets d’héroïne.
Comme si ça ne suffisait pas, notre pays doit affronter une vaste campagne
militaire orchestrée par son président infâme, campagne qui voudrait
justifier par la force des baïonnettes ses politiques néolibérales
aberrantes sous prétexte de combattre le narcotrafic et le crime organisé.
Un panorama qui évoque la Colombie exsangue des années 1990, où le même
discours et les mêmes pratiques ont servi à militariser l’ensemble du pays
et dans lequel se sont multipliés les groupes paramilitaires et
l’assassinat d’opposants du mouvement social, des communautés entières
vivant dans la terreur. La militarisation d’un territoire est un facteur
qui favorise une violation systématique des droits humains et en garantit
la plus totale impunité, mais qui sert aussi à exercer un contrôle sur des
populations bien précises et à restreindre la marge de manœuvre des
mouvements sociaux. Les diverses lois approuvées qui criminalisent la
lutte sociale, les réformes du code pénal, le projet d’implanter des
casernes de gendarmerie dans des villes de moins de 20 000 habitants sous
la supervision de l’armée et la réunification de la police sous une seule
autorité sont autant de symptômes d’un État policier qui s’est donné pour
tâche de perfectionner sa politique de sécurité nationale antisubversive.
Devant une situation aussi désastreuse, nous croyons que l’une des tâches
principales que doivent se fixer les mouvements sociaux est la défense des
droits humains. Inversement, les atteintes à de tels droits laissent toute
liberté à la classe politique et à la bourgeoisie mexicaine pour
poursuivre sa spoliation des biens et des droits, pour se maintenir au
pouvoir et fragmenter la lutte sociale. La défense des droits humains doit
venir du peuple, que ce soit en organisant des forums et des campagnes
d’informations, en appelant à une mobilisation sociale, en créant des
réseaux qui nous permettent de divulguer la répression subie par des
compañeras et des compañeros dans l’ensemble du pays ou en rassemblant les
pièces et, dans la mesure du possible, des documents vidéo prouvant de
tels abus et en rédigeant les rapports adéquats afin d’attirer l’attention
d’organismes mexicains comme internationaux. Le tout sans cesser de
dénoncer la complicité de la CNDH, qui n’a fait que fournir un bouclier
moral à l’impunité avec laquelle agit l’État mexicain, comme le montre son
rapport sur la répression dans l’Oaxaca, qui ne signale à aucun moment la
responsabilité de l’assassin Ulises Ruiz et de ses sbires dans les abus
incessants et les 27 assassinats commis à l’encontre du peuple de
l’Oaxaca, ainsi que l’occultation du viol et du meurtre de l’indigène
Ernestina Ascensión.
Les innombrables fronts qui s’ouvrent à la lutte dans notre pays nous
portent à croire que seules les personnes qui se consacrent à la lutte
anticapitaliste, à la construction d’un mouvement véritablement de base et
capable d’autocritique, qui abandonne tout opportunisme et adopte la plus
totale transparence politique, pourront survivre à la vague de répression
qui approche. L’expérience de l’Oaxaca, d’Atenco et autres ne doit pas
passer inaperçue. En ce qui nous concerne, au sein de notre espace de
communication alternative, nous nous rallions au sentiment et à la pensée
de nos frères indigènes de l’Oaxaca pour affirmer avec eux que « ce ne sont
pas les plus forts qui survivent mais ceux qui sont les mieux organisés ».
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