Le premier mai, c’est l’Anarchie !

2432 visites
1 complément

Tract du groupe Graine d’Anar de Lyon, membre de la Fédération Anarchiste, pour le premier mai 2018.

Le 1er mai, qu’est ce que c’est ?

Le 1er mai 1886 les travailleurs et travailleuses de Chicago manifestaient, soutenus par les syndicats américains et le journal anarchiste "The Alarm". C’est par une grève générale, impulsée par les anarchistes, qu’elles et ils s’expriment. Déjà les enjeux étaient de se réapproprier leurs vies, de lutter pour les droits sociaux, la journée de travail de huit heures, et déjà ces manifestations avaient suscité l’indignation et la réaction violente du pouvoir et de sa presse.

Déjà ils répondaient aux travailleurs et travailleuses et aux mobilisé.e.s qu’il n’y avait pas "d’argent magique" ou de solution miracle à leurs problèmes. Il fallait faire pour l’économie et donc travailler toujours plus et se taire. Pire, un attentat contre les flics, aujourd’hui reconnu comme piloté par les milices patronales, eu lieu le 03 mai de la même année alors que la grève se poursuivait. Cela justifia l’arrestation et la condamnation à mort de huit syndicalistes anarchistes. Cinq d’entre eux mourront (quatre tués par l’Etat et un se suicidant). Les trois autres furent condamnés à la perpétuité. C’est depuis que nous avons fait de ce jour un jour de lutte !

Contre quoi manifester ?

Aujourd’hui les droits et les acquis sont attaqués de toute part. Par les réformes du droit du travail, comme la loi El-Kohmri ou les Ordonnances Macron. Par les nouvelles formes d’exploitations au travail illustrées par "l’uberisation" des conditions de travail et la promotion de l’auto-entrepreneuriat (auto-exploitation) pour toutes et tous.
Par l’injonction à la flexibilité pour plier l’humain aux demandent toujours plus fortes, toujours plus folles, du “marché et de ses besoins”. Par la soit disant nécessité de “booster la compétitivité” dans le régime de concurrence généralisé qu’est devenue l’économie, où les travailleurs de tous les pays, à défaut d’être unis, sont mis “en concurrence”. Présenter de faibles acquis sociaux obtenus par les luttes des années passées comme des "privilèges", démontre une fois de plus le cynisme et l’arrogance des possédants et possédantes. Par la situation de "crise permanente" et de chômage de masse créée par notre organisation sociale au profit de quelques-uns, encourageant chacun à se vendre au meilleur prix. Par ce tous contre tous que l’on nous met en tête dès le plus jeune âge, comme si seule la compétition avait un sens en ce monde.

C’est en réalité tout un modèle économique et social que l’on cherche à nous imposer. Un modèle de concurrence perpétuelle entre individus perçus non plus comme des travailleurs vendant leur force de travail mais comme des “entrepreneurs”. Un modèle où la flexibilité et la souplesse sont les autres noms de l’auto-exploitation, de la destruction des collectifs et du vivre ensemble. Cela réduit de fait la possibilité de s’organiser et de construire la contestation. Si ça ne réduit pas l’idée même que nous pourrions changer les choses.

Ces choix politiques et économiques s’imposent de la pire des façons, par l’autorité et la violence. Autorité législative par l’usage du 49-3 et des ordonnances, par lesquelles Macron mène sa Blitzkrieg (guerre éclair). Violence policière à Notre-Dame des Landes, dans les Universités, les squats, contre les pauvres et dans les manifestations. Sans oublier la chasse à l’humain contre les migrantes et migrants.

Dans le même temps, nous voyons nos sociétés se militariser de plus en plus. Depuis plus de 20 ans, il est presque devenu banal de croiser des militaires en armes dans nos rues, comme si nous étions en guerre permanente dans nos villes. On ne parlera pas non plus de l’attirail dont disposent les flics qui ne cesse de s’agrandir, que de choix pour gazer, blesser, mutiler ou tuer au nom de l’ordre républicain ! Savoir faire exporté comme nos armes à toute dictature en demande.

Toutes ces raisons entrent en résonance avec la situation de 1886 et justifient une mobilisation massive. Car le capitalisme n’a pas abandonné la lutte, et continue son écrasement du plus grand nombre.

Pour quoi manifester ?

Cette situation n’est pas propre à la France. Cette volonté d’asservir et de casser est la même partout dans le monde, menée par celles et ceux qui sont riches, qui possèdent, contre celles et ceux qui produisent. Macron n’est qu’un de ceux là. Mais surtout, tous les rouages de l’Etat et de l’économie sont créés et mis au service des vrais privilégiés de ce monde.

C’est pour cela que notre analyse n’est pas patriotique, nationaliste, ou régionaliste. Elle est internationaliste et clairement anti-identitaire.

Les luttes pour la défense des droits des travailleuses et travailleurs menées par les syndicats est fondamentale. Mais nous ne devons pas oublier que le 1er mai est porteur d’idéaux anarchistes qui vont plus loin que la simple revendication de nouveaux droits ou leur défense. Il s’agit pour nous de porter une vision résolument anarchiste de la société. Cela passe nécessairement par une réappropriation des outils et moyens de production par celles et ceux qui produisent. Mais aussi par la promotion d’une organisation sociale vivante et décentralisée, résolument fédéraliste et coopérative, évitant la sclérose bureaucratique des économies planifiées et contrôlées. Une révolution sociale et libertaire quoi !

De la même façon, nous ne sommes pas des forçats volontaires, stakhanovistes effrénés (du mythe de Stakanov inventé par le régime stalinien , la glorification du travail n’étant pas réservée aux vilains et vilaines capitalistes de droite). L’automatisation des tâches ingrates, avec des outils dans les mains de ceux qui expriment les besoins, ne nous inquiète pas, au contraire. Il faut être cynique ou aisé pour regretter la disparition des tâches ingrates et des métiers qui tuent chaque jour. Nous ne nous offusquerons pas que les égoutiers pilotent des drones ou des robots à distance plutôt que d’aller mourir à petit feu pour nous permettre de ne pas nager dans nos rejets. Et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Le problème n’est pas l’outil mais qui le détient et au service de qui il est mis. Faire un lien ente progrès des moyens de productions et capitalisme est non seulement dangereux, mais cela reviendrait à valider l’idée que l’innovation ne pourrait venir que du capitalisme !

Nous ne rêvons pas d’une dictature, fût-elle du prolétariat. Nous ne rêvons pas d’une uniformisation, fût-elle pour le bien du peuple. Nous voulons que toutes et tous soyons moteurs et décideurs de nos vies. Que la production repose sur les besoins réels exprimés par des assemblées locales. Que la politique ne soit pas hors de la vie mais qu’elle soit dans et au service d’une vie meilleure.

Saisissons donc l’occasion d’aller au-delà d’une défense de conditions d’exploitations moins défavorables pour reprendre nos vies en main. A la concurrence opposons la coopération, à l’exploitation l’autogestion, à la planification le fédéralisme, à la destructions des collectifs la production de communs, au désordre économique et social des réformes néolibérales opposons l’anarchisme.

Oui ce mot fait peur, et il est, dans l’inconscient collectif, dévoyé par les pouvoirs depuis sa création. Anarchie, anarchisme, ce serait le bordel, la violence. Non, l’anarchie c’est une société sans pouvoir. Où tout le monde, dans une égalité de droits et d’existence, a voix au chapitre. Où l’individu existe dans le groupe et non pour et par le groupe. L’anarchie, c’est un monde sans frontières, sans murs entre les humaines et humains. L’anarchie, c’est un monde débarrassé des contrôles sociaux, que ce soient les religions ou l’Etat, ou encore le carcans moralistes. L’anarchie, c’est un monde en construction constante, sans certitude, mais où personne n’est oublié. On comprend mieux pourquoi ce mot fait si peur aux dirigeants.

L’anarchie, au fond, c’est se dépasser, rêver, espérer, mais surtout faire, tenter et expérimenter. Sans formule magique ni certitude. Mais clairement, ce ne sera pas pire que subir en baissant la tête.
Alors, on se lance ?

Graine d’anar , 1 er mai 2018

Groupes associés à l'article

Fédération Anarchiste - Graine d’Anar

  • https://grainedanar.org
  • grainedanar@federation-anarchiste.org

Proposer un complément d'info

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

  • Le 2 mai 2018 à 09:43, par Le Texan

    Bonjour, je voulais juste vous remercier pour ce bel article qui remet les pendules à l’heure :)

    Très bonne journée

Publiez !

Comment publier sur Rebellyon.info?

Rebellyon.info n’est pas un collectif de rédaction, c’est un outil qui permet la publication d’articles que vous proposez. La proposition d’article se fait à travers l’interface privée du site. Quelques infos rapides pour comprendre comment être publié !
Si vous rencontrez le moindre problème, n’hésitez pas à nous le faire savoir
via le mail contact [at] rebellyon.info

Derniers articles du groupe « Fédération Anarchiste - Graine d’Anar » :

>Cortège rouge et noir pour le 1er mai !

La CNT, la CNT-SO, le STJV, la FA et l’UCL organise un cortège rouge et noir pour la manifestation intersyndicale du 1er mai ! Rendez-vous à l’arrière du cortège syndical ! Et à Bellecour, on continue avec une manifestation libertaire jusqu’au repas de quartier (manif déclarée).

› Tous les articles "Fédération Anarchiste - Graine d’Anar"