Un contrôleur à un flic :
- Et pour la contravention on fait comment ? J’ai pas pris d’adresse du coup...
- C’est pas grave, envoyez-la nous, on fera suivre.
Nous à un contrôleur :
- Alors, c’est cool la collaboration avec la police, ça se passe.
- Oh, vous savez, j’fais mon travail, je mets des contraventions et puis juste, quand une personne n’est pas en règle, je la mets de coté.
- Vous appelez les flics quoi. C’est un peu ça la collaboration !
C’était un peu la même avec les juifs, un contrôle, les papiers, et puis hop dans le train direction les camps.
- Non mais là c’est pas pareil, il va pas aller en prison pour un ticket (genre il comprend pas de quoi on lui cause)
- Un centre de rétention, murs, grillages et surveillants, t’appelles pas ça une prison ?
Un autre contrôleur :
- Et puis y’avait pas que les juifs qu’on envoyait dans les camps... P’tit sourire cynique en coin, (style « vous aussi vous pourriez y aller p’tits cons »).
- Toutes façons, c’est vos parents, c’est vous, qui avez fait ce système comme il est. Moi je travaille, c’est tout. Si vous êtes pas content, faut le changer, faut vous organiser (le type est d’origine immigrée).
- C’est ça, toi t’es responsable de rien, tu fais rien.
- Si je suis responsable. Mais c’est pas des gens comme moi qui ont collaboré avec les nazis, c’est des chômeurs comme vous qui collaboraient par ce qu’ils avaient pas d’argent. Vous avez vu comment vous êtes sapé ! Moi je travaille, moi !
- Mais t’es un ouf, tu fais quoi là ?! Nous on préfère manger c’qu’on mange plutôt que bouffer du steak à genoux comme toi.
On essaye de s’approcher du type que les condés embarquent :
- Psst ! c’est quoi ton nom ?
Les flics :
- Hey là ! dégagez ! y’a rien à voir, allez de l’autre coté, ça vous concerne pas !
Et nous de répondre ironiquement que y’a aucune loi qui nous interdit d’être là et de demander son nom à ce gars. Un contrôleur en profite pour placer que c’est des lois d’abruti comme nous qui les empêchent de travailler.
Bref, on insiste, on les suit, les poursuit même jusqu’à leur voiture et on finit par avoir le nom du type. On demande au flics de quoi ils ont honte pour se cacher comme ça et on se fait coller contre un poteau avec l’ordre de dégager si on veut pas se faire embarquer. Mais rien de verbal hein ! Tout est dans le langage du corps là !
Le cœur qui bat à la chamade on s’barre, « chômeur, plutôt que contrôleur ! », direction l’arrêt de tram précédent. Dans les trams qui suivront, on entre pour prévenir en gueulant un peu que les flics et les leurleurs vont contrôler au prochain arrêt, qu’ils embarquent direct ceux qu’ont pas de papiers.
Un peu l’impression d’être pris pour des tarrés par des gens qui nous soupçonnent de raconter des histoires... « bas ouai, on n’est pas dans un film là, illes croient tellement plus à ce qu’on nous bassine à la télé que quand c’est dans la vrai vie, illes arrivent plus a y croire non plus ». Un peu de sourire par ci par là quand même. Mais bon, quelques personnes sont sortis après nous avoir entendu et quelques autres ont préféré ne pas monter et continuer à pieds.
Peut être bien que « les gens » voient pas comment c’est flippant cette frontière invisible qui existe quand à tous moments tu peux te faire embarquer parce que t’as pas le laissez-passer, parce que cet état t’a pas reconnu comme un de ses sujets ou comme un « ayant droit » de circuler sur ses terres... Ça mériterait qu’on foute des barbelés partout pour la faire exister cette frontière, pour emmerder un peu ce monde de résignéEs qui aime trop bien ne pas voir pour ne pas lever le petit doigt, qui quand illes matent pas la télé, matent leur pieds quand faudrait pousser une gueulante.
Trop ouf de dépossession politique, ces types qui se perçoivent comme de simples travailleurs qui n’ont pas d’actes politiques à poser et qui nous nous perçoivent comme des moralistes qui leur prenons la tête, à les juger dans leur actes et qu’on devrait plutôt aller emmerder les hautes sphères et faire de la politique etc... que eux ils ont pas choisis, comme nous dit ce type d’origine immigrée, que cette société lui a imposé son job, qu’il est pas en mesure de choisir. Mais voilà, tellement la normalisation sociale travaille, tellement le schéma du bon français s’impose que c’est nous qui devenons les potentiels collabos parcqu’on est des citoyens de seconde zone qui n’embrassons pas Marianne et sa nation.
Blasant la guerre entre pauvres, entre ces bons citoyens qui ont un taff de merde payé une misère et d’autres précaires, ou encore de voir des français fils d’immigrés qui arrêtent des migrants quasiment comme un acte d’intégration.
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