Elles nous paraissent un peu loin, les manifestations où on revendiquait le retrait du projet de réforme des retraites et « du fric pour les services publics ». Il y a des circonstances où on préfèrerait avoir eu tort. On aurait préféré que le cri d’alarme des personnels des urgences, en mouvement de grève depuis un an, ne revête pas cette cruelle vérité. On aurait préféré que les hôpitaux ne connaissent pas le manque d’effectifs et de matériel. La crise sanitaire que nous traversons nous montre de façon dramatique que nous avions raison, et que nous aurons raison de nous remobiliser dès l’épidémie passée.
« Vous pouvez compter sur nous M. le Président, mais l’inverse reste à prouver ». C’est le message que font passer les personnels soignants depuis le début de l’épidémie. Dans l’Éducation, on peut tout à fait s’y joindre. Contrairement à ce que prétend notre ministre, non, nous n’étions pas prêt·es à mettre en place l’école à distance. Pourtant, chacun de nous fait de son mieux, pris entre les contradictions de sa conscience professionnelle et la fracture numérique, entre sa classe virtuelle et les devoirs de ses propres enfants parfois. Ainsi les témoignages de fatigue accrue, de migraines, de douleurs musculo-squelétiques, de burn-out même abondent.
Et tout cela pour assurer une continuité pédagogique chère à notre ministre qui laisse inévitablement sur le bord du chemin les élèves les plus fragiles, le plus souvent issus de familles populaires, qui ne bénéficient pas des conditions nécessaires à ce type d’enseignement : ordinateur personnel, connexion satisfaisante, imprimante, scanner, une pièce isolée, des parents présents et en mesure d’aider.
Pourtant en dépit du gel des salaires, du manque de reconnaissance de notre travail et du manque de moyens mis en œuvre pour le réaliser correctement, nous sommes là pour nos élèves, du mieux que nous pouvons.
Aujourd’hui confiné·es, demain dans la rue !
Le gouvernement dit avoir suspendu la réforme des retraites le temps de la crise sanitaire. Mais qu’allons-nous retrouver sortis du confinement ? La loi d’urgence sanitaire qui sert déjà à obliger des travailleurs et travailleuses à poser des jours de congé pendant le confinement ou à déplafonner totalement les 35 heures n’a pas de date limite. La réforme de la fonction publique est toujours d’actualité et l’augmentation de nos salaires ne risque pas d’être à l’ordre du jour, puisque le gouvernement aura beau jeu de dire que les caisses sont vides, et qu’encore une fois il faudra se serrer la ceinture.
Mais là nous dirons stop. Nous dirons stop parce qu’encore une fois, c’est nous enseignant·es, personnels soignants, cheminot·es, conducteurs et conductrices de bus ou agent·es de propreté qui aurons fait tourner cette société pendant l’orage. Les employé·es de la grande distribution, les livreurs et livreuses, les éboueurs et éboueuses et bien d’autres nous auront même permis de continuer à vivre au péril de leur vie comme est venu nous le rappeler il y a quelques jours le cas de Aïcha Issadounène, caissière de supermarché décédée après avoir contracté le covid-19 au travail.
Gardons le poing serré, chantons nos slogans de manif à 20h avec nos voisin·es, affichons notre colère à nos fenêtres. Prenons soin de nous pour nous retrouver tous ensemble dans la rue une fois l’épidémie passée, pour rappeler au gouvernement qu’on entend récupérer en salaires et droits sociaux les fruits de notre travail
Le 5 avril 2020
Coordination éducation des établissements en lutte de Villeurbanne
Fb : coordiantionVilleurbanne
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