Police partout

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Brève « Police partout », de septembre 2011 à janvier 2012. Des flics partout, à tout heure du jour ou de la nuit. Qui patrouillent, contrôlent et font les chauds. Et qui parfois aussi se plaignent, se font mettre à l’amende. Petit tour d’horizon de la condition policière. (Lire aussi « en guise d’introduction »).

Augmentation du nombre de patrouilles policières de 10% entre juin et septembre dans le Rhône. Soit un passage de 6 366 à 7 049 patrouilles (6 488 motorisées et 561 pédestres). Tous les jours, plus de 100 patrouilles de police quadrillent l’agglomération lyonnaise, aidées par la cinquantaine de patrouilles de gendarmes sur les zones dépendant du groupement de gendarmerie.

Citoyen = flic.

3 septembre 2011. Collonges, « banlieue » bourgeoise du nord-ouest lyonnais. En rentrant dans sa demeure, un mec découvre deux personnes en train de fouiller son appartement. « J’étais vraiment en colère. En plus, l’un des deux portait l’une de mes casquettes ! J’ai vu rouge ». Il se lance à leur poursuite, rejoint bientôt par un voisin. Une course s’engage sur 300 mètres. Sur le point de se faire distancer, ils croisent une voisine en train de se garer. Elle prévient aussitôt les gendarmes et leur file son véhicule pour continuer la poursuite. Les deux voleurs sont finalement rattrapés plus loin.
Début octobre 2011, un mec s’introduit dans une résidence. Il se fait chopper violemment par les deux fils de la meuf qui vivait là. Ils le foutent dans le coffre de leur voiture avant de l’emmener au commissariat. Condamné 22 fois (pour des vols essentiellement), ayant fait plusieurs séjours en Hôpital Psychiatrique et passé plus de la moitié de son existence en taule, il se ramasse 10 mois ferme.
En cette paisible matinée du 15 octobre 2011, en plein centre de Bron, le citoyen Gilbert Lori, bijoutier toujours en activité bien que bientôt à la retraite, ouvre le feu sur deux hommes qui venaient le braquer. Un des intrus est blessé de plusieurs balles. Son comparse ne le laisse pas tomber et s’enfuit en le transportant. Sérieusement amoché, l’homme se fait serrer un peu après dans le quartier de Bron Terraillon. Il va rester plusieurs semaines hospitalisé. L’autre a réussi à s’esquiver.
Garde-à-vue pour le bijoutier qui ressort libre dans la soirée. Il faut dire qu’il n’en était pas à son coup d’essai : en 1986, il avait déjà abattu un braqueur, en « état de légitime défense » avait alors conclu la justice pour justifier son geste. Dans le Var, 3 jours après, un homme en abat un autre d’un coup de fusil de chasse parce qu’il l’avait vu déménager des objets de chez son voisin. Le 19 octobre 2011, un homme suspecté d’être le deuxième braqueur est interpellé et écroué. Dans la foulée, une pétition soutenant le bijoutier circule, les auteurs réclament l’installation de la vidéo-surveillance place Curial.
Le 19 novembre 2011, Gilbert Lori est placé sous contrôle judiciaire. Depuis cette affaire, sa femme est régulièrement insultée (« Sale pute, on va te faire à la kalachnikov »). Même tarif pour lui (« bâtard, raciste, enculé de Français »). Des gens viennent cracher sur la vitrine de son magasin.
Nouveau braquage à Bron le 25 novembre 2011. Le buraliste gaze les intrus avant de se ramasser une balle. Pris en chasse par la BAC, les deux frères à l’origine du braquo sont interpellés dans un immeuble de Parilly une heure après, en compagnie d’autres membres de la famille.
8 décembre 2011. Manif nocturne pour « faire la lumière sur les morts en détention » devant la taule de Corbas. Quelques heures auparavant, un prisonnier simule des nausées et échappe à son escorte aux portes de la prison. Une cinquantaine de gendarmes, des flics et un hélicoptère sont déployés pour le retrouver. La cavale est de courte durée : l’évadé est dénoncé par des habitants de Corbas alors qu’il se cachait dans une camionnette. 1 an ferme ajouté à sa peine pour ces quelques heures de liberté retrouvée.

Au bal de l’arbitraire

Les comparutions immédiates se suivent et se ressemblent. Il est instructif de noter que les juges, chargés de ramener les prévenus dans le droit chemin à coups de peines de prison, se montrent plus sévères dès que les larcins ont été un minimum pensés et préparés. Ils ressortent alors le spectre de la « bande organisée » et condamnent plus lourdement. C’est dire si la délinquance n’est plus tolérée dès qu’elle prend un tour collectif et qu’elle n’est plus une collection de gestes désespérés.
24 septembre 2011. Une femme de ménage oublie de fermer la porte d’un salon de coiffure du 1er arrondissement. La nuit, un SDF pénètre et s’empare des 350 euros du tiroir-caisse. Manque de bol, un équipage de police passe par hasard. 6 mois ferme avec mandat de dépôt.
1er octobre. Un sans-pap tunisien se prend 4 mois ferme et 2 ans d’« interdiction de séjour sur le territoire national » pour vol de sac à main sur les berges du Rhône et une fausse identité donnée aux policiers.
2 octobre 2011, contrôle de routine à la gare de la Part-Dieu. Les flics trouvent 6 iPhone en fouillant un mec. Ça fait beaucoup. Surtout quand on est Rrom. L’interpelé affirme les avoir acheté rue de Marseille pour 600 euros. Les flics ne veulent rien savoir. Direction le tribunal où le juge le condamne à 3 mois ferme.
7 octobre 2011. Quatre hommes se font arrêtées place Bellecour. Ils déposaient sur les DAB (Distributeur Automatique de Billets) un système qui récupère les billets des gens qui retirent. Seulement 500 euros de gagner dans l’opération. Tous sont écroués.
Mardi 18 octobre 2011, deux Roumains (un oncle et sa nièce) repérés à la caméra se font chopper à Lons pour avoir essayer de voler des colliers en or dans un kiosque à bijoux de l’enseigne Géant. Pendant le procès, la procureur pointe une « organisation certaine » et agite le spectre de « l’existence d’une économie souterraine ». 8 mois ferme avec mandat de dépôt.
21 octobre 2011. Comparution immédiate d’un lycéen exclu de son établissement depuis 2 ans parce qu’il dealait du shit.
Durant le procès, il refuse de balancer le nom de son fournisseur. Ce qui lui vaut 10 mois avec sursis et 5 000 euros d’amende.

La France discrimine ses agriculteurs

Après avoir obtenu des renseignements comme quoi un jeune homme « se livrait à une culture de cannabis dans son jardin » rue de la Poudrette à Vaulx-en-Velin, la police fait survoler la propriété par un hélicoptère qui confirme les dires de la balance. S’en suit une perquisition du domicile, le 5 octobre 2011, où les condés découvrent 340g de résine de cannabis, 50g d’herbe, du matériel pour faire pousser et 21 pieds dans le jardin. Le garçon reconnaît les faits mais refuse de livrer la liste de ses clients. En 2011, 6 500 personnes ont été interpellés pour des histoires de stupéfiants dans le Rhône.

Malheurs de schtroumpfs

23 septembre 2011. Un gendarme de la brigade motorisée de Tarrare est renversé par une voiture dans le Beaujolais. Il est transporté à l’hôpital dans un état critique.
24 septembre 2011, une gendarmette met fin à ses jours dans son logement de fonction de la caserne du 2ème arrondissement.
Mardi 27 septembre 2011, un policier à moto heurte un véhicule et se tue sur la route de Strasbourg, entre Rillieux et Caluire.
Le 20 octobre 2011, un deck nouvellement affecté à Vaulx-en-Velin se fait sauter le caisson.
Le 5 janvier 2011, un motard escortant un convoi de la Banque de France est percuté par un automobiliste et finit sa course par un vol plané dans la vitrine d’un pressing.
20 janvier 2012. Ça insulte les decks devant le commissariat de Saint-Priest. Un CRS s’approche pour contrôler. Le mec prend la tangente puis se ravise : il se retourne et ouvre le feu avant de se barrer.
Les « agressions de policiers » progressent de 15% entre 2010 et 2011 passant de 374 à 410 blessés dans le Rhône.

Quand il ne suffit que d’une trace...

2002. Braquage d’un bar, une bagarre éclate entre un homme cagoulé et le gérant. Dans la mêlée, celui-ci parvient à arracher un bout de pull du braqueur. Ce dernier s’empare de la recette (30 000 euros) et s’enfuit. 9 ans plus tard, un mec tombe à la prison de Bourg-en-Bresse pour une affaire de stups. Pour les flics, son empreinte biologique correspond à celle retrouvée sur le bout de pull. Le gérant reconnaît l’homme mais celui-ci nie les faits.

Presque la même histoire : en avril 2003, à Vaulx-en-Velin, trois hommes braquent le gérant d’un bar-tabac avant l’ouverture. Le femme du gérant arrive à décagouler deux des hommes. Les mecs partent sans butin, mais plus grave, en abandonnant leurs cagoules. Et c’est pour un simple vol, huit ans plus tard, que l’affaire est finalement débloquée et un mec interpellé chez lui le 13 septembre 2011. Morale de l’histoire : ne jamais laisser de traces derrière soi.
En 2011, dans le Rhône, 20 700 traces génétiques et papillaires ont été relevées débouchant sur un millier d’identifications.

Inspecteur Harry

1er arrondissement. Dans la nuit du 2 au 3 septembre 2011, à 4h30 du mat’, un motard et son passager essaient d’échapper à un contrôle de police en prenant des sens interdit. La police actionne son gyrophare et les mecs tracent aussi vite qu’ils peuvent. Plus loin, ils percutent un véhicule en stationnement. Le pilote part en boitant mais est rattrapé par les flics. Le passager, lui, tombe dans le comas.
Le 31 décembre 2011, un policier de la BAC procède à l’interpellation d’un SDF mendiant de manière « agressive » devant les portes d’un Monoprix de la Croix-Rousse en lui tirant une balle dans les jambes.

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Toujours bon à savoir

26 septembre 2011. Les syndicats de policiers municipaux ruent dans le brancard pour être armés comme leurs collègues de la nationale. Ils répètent à qui veut l’entendre que pendant le désormais célèbre braquage de Global Cash, deux de leurs collègues s’étaient cachés derrière des pots de fleurs. Pas très glorieux. Pour l’heure, la municipalité ne cède pas et n’est pas prête à lâcher des guns aux quelques 330 policiers municipaux que compte Lyon. Hormis quelques rares communes de l’agglomération où ils sont armés comme Meyzieu, Villefranche, Feyzin, Décines ou encore Brindas, les autres sont équipés au mieux de tonfas et de gazeuses.
Deux jours avant, bris d’une vitre du fournisseur des administrations en équipement à Saint-Priest, pendant la nuit. Vols de gilets par balles, polos de la gendarmerie et de la police nationale, blousons et casquettes de la municipale. Troisième casse dans ce mago.

Les territoires perdus de la République

Vaulx-en-Velin, 23 septembre 2011. En début de soirée, un équipage de fonctionnaires de police contrôle une mère de famille accompagnée de ses enfants. Il faut dire qu’elle est entièrement voilée. La loi étant la loi, les agents entreprennent de verbaliser la contrevenante. Mais il y a un léger problème d’identité : nos valeureux soldats de la République ne peuvent savoir à qui ils ont affaire eu égard au niquab qu’elle arbore au mépris des lois républicaines. Avec insolence, la maman refuse de se dévêtir dans la rue ou au commissariat, et va même jusqu’à tenir des propos hostiles, affirmant notamment ne rien avoir à foutre de la loi sur le voile adoptée pourtant démocratiquement en avril dernier par un parlement légitime. Le temps joue contre les défenseurs de l’ordre républicain. Des habitants – plusieurs dizaines – commencent à les encercler ; la femme les harangue. La tension monte rapidement et les première pierres commence à voler. Avant l’émeute, les policiers se retirent tout en remettant une convocation au commissariat à la contrevenante pour le lendemain. Convocation à laquelle l’intéressée a eu le culot de ne pas se rendre.

Le criminel portait des culottes courtes

22 septembre 2011. Encore une série de bastons à l’Établissement Pénitentiaire pour Mineurs de Meyzieu. Des surveillants mordus (l’un aux parties génitales), griffés, frappés à coups de pieds et qui essuient des crachats - un maton évacué par les pompiers (5 jours d’ITT). C’est le tarot pour vouloir maîtriser un jeune résidant un peu trop rétif à l’autorité. Le mineur est placé en cellule disciplinaire. Le 2 décembre 2011, le jeune de 18 ans passe en comparution immédiate. « Il est encore dans l’outrance de l’adolescence » diagnostique un psychiatre. Outrance qui pousse le parquet à requérir une peine de 3 ans de prison dont 6 mois avec sursis.
Le 23 septembre 2011, un député annonce la création de nouveaux établissements pilotes de placement des « mineurs délinquants » : les EPPOO (Établissements de Placement Provisoire d’Observation et d’Orientation) qui pourront accueillir pendant une durée de 10 jours des « primo-délinquants ». Objectif : lutter contre le sentiment d’impunité des jeunes qui commettent un délit le jour et rentrent chez eux le soir... C’est bien connu.
10 novembre 2011. La gendarmerie intervient dans une école primaire de l’Ain. Une dizaine de suspects, âgés de sept à dix ans, sont soumis à un test graphologique : on leur fait réaliser une page d’écriture en présence d’un gendarme et de la directrice. Objectif : établir des similitudes avec des inscriptions injurieuses retrouvées dans les toilettes de l’école et retrouver l’auteur. La farce n’a toutefois rien donnée.
Braquage au magasin de jouets Maxitoys de Rilleux-la-Pape le 24 décembre 2011. Des courses de Noël de dernière minute en somme.

La suite, les brèves de septembre à décembre :

En guise d’introduction
C’est une bien curieuse société dans laquelle nous « vivons ». Une société qui se sait absolument détestable et périssable. Une société qui n’a plus rien à proposer si ce n’est de sauver les meubles ou ce qu’il en reste : sauver les emplois, l’économie en crise, la planète. Derrière l’apparente abondance des « projets politiques » et autres « promesses » venant du champ politique traditionnel se cache le chantage à la politique du « moindre mal » : nous gérons comme nous pouvons, disent les dirigeants de tout poil, si nous n’étions pas là, ce serait l’extrémisme, le chaos, la guerre civile.

En lutte
Profs, cheminots, postiers, putes, pompiers, travailleurs sans-papiers. Les luttes se croisent sans jamais trop se rencontrer. Mais sont autant d’occasions d’organisation avec ses semblables.

Lyon Métropole
Des caméras aux derniers changements concernant les Hôpitaux Psychiatriques : dernières avancées des dispositifs de contrôle métropolitains.

Temps de crise
"La Crise". Une aubaine patronale pour reconfigurer l’économie, flexibiliser et licencier sans vergogne ; mais aussi une opportunité pour tous les perdants de la guerre économique d’inventer des combines et de s’organiser avec d’autres pour s’affranchir des patrons.

Guerre sociale
Où l’on voit bien que derrière la tranquillité apparente des centre-villes se jouent des conflits sans merci.

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