Trois mois de sursis après s’être plaint aux policiers : récit d’une comparution immédiate suite à la manif du 28 avril

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Comptes-rendus de justice | Loi travail

Après la répression policière de la manif du jeudi 28 avril, c’est au tour de la justice de réprimer le mouvement social. Lundi, dans la salle d’audience G dédié aux comparutions immédiates, on a eu le droit à un juge qui conseillait de lire Rebellyon, un procureur voulant un tout prix faire un exemple et un jeune pâtissier lanceur de cannettes qui n’entendait pas se taire.

Suite des comparutions immédiates de la manifestation du 28 Avril.

Si vous vouliez avoir la lecture du tract des conseils en manifestation de la caisse de solidarité, c’était au TGI de Lyon qu’il fallait être ce lundi après midi. Ceci pourrait porter à plaisanterie si ce tract, retrouvé dans la poche du camarade qui comparaissait aujourd’hui, n’avait pas servi au tribunal pour l’accabler. Lui était reproché des jets de projectile sur policier n’ayant entraîné aucune ITT ainsi que la participation à un attroupement en étant détenteur d’une arme, en la matière d’une bouteille de verre. Le tract servant d’argument de préméditation pour le parquet.

Il m’apparait donc important de rappeler quelques conseils. S’il est important de ne pas porter de vêtements qui permettent de vous identifier facilement, il peut être aussi intéressant de se changer en fin de manifestation. Second point, si vous êtes victime de violence policière, orientez-vous plutôt vers la caisse de solidarité qui pourra vous informer sur les procédures à réaliser et éventuellement vous aider à mettre en place une action judiciaire. Le 28 avril, ce camarade s’est jeté dans la gueule du loup et s’en sort avec 3 mois de prison avec sursis durant 5 ans et un conseil du juge "d’être prudent pendant les manifestations".

Si vous aviez été présent dans cette salle d’audience cette après midi, vous n’auriez pas eu seulement le plaisir de voir un juge se délecter des paroles de la caisse de solidarité, mais également d’admirer la machine judiciaire déroulant sa stratégie de stigmatisation du mode de vie marginal du camarade, n’hésitant pas à remettre en cause ses garanties de représentation (domicile, travail), alors que la semaine dernière il s’étonnait du niveau d’étude élevé d’un prévenu, issu d’un rang social élevé, qui comparaissait pour des faits presque similaires.

Vous auriez pu également profiter du monologue du procureur sur le droit fondamental de manifester en démocratie et la mise danger de ce droit, légitime et pacifique, par "des casseurs qui portent le discrédit sur la manifestation : "Dans une démocratie, il faut être exemplaire avec ces agissements qui portent atteinte au droit de manifester. "Ce monologue comportait également une éloge à la technologie, le procureur remerciant la HD qui permet à la police de reconnaitre sans aucunes difficultés des individus sur les photos : "On a un luxe de preuve. Regardez ces images, il porte son foulard à la façon western, il est habité par la fierté."
Ce dernier point est important. Le camarade a été interpellé en fin de cortège, sur la place Bellecour, alors qu’il allait de lui-même voir la police pour se plaindre d’avoir reçu une grenade de dispersion dans la jambe. Les photos prises durant le cortège par la police ont parlé assez vite pour qu’il se fasse interpeller au bout de quelques minutes.

Caisse de Solidarité

Récit de la comparution

Tribunal de Grande instance de Lyon
Salle G 18h15
Président : Cerollemand
Procureur : Luchetta
Avocat de la défense : Galvin
Prévenu : M I.B

M. B, pâtissier âgé de 22 ans, comparait pour la première fois devant un tribunal après 48 heures de garde à vue et 2 jours à la maison d’arrêt de Corbas. Les charges retenues contre lui sont « exercice de violences sans itt sur dépositaires de la force publique » et « participation à un attroupement avec armes, le visage dissimulé ».

Le jeune homme reconnait les faits mais n’entend pas se taire. « J’ai des déclarations à faire » ose-t-il.

Le pâtissier est une première fois repéré et filmé près de Garibaldi. Sur les photos prises par la police, il est facilement reconnaissable à son sweet à capuche vert et portant l’inscription « panama city ».
À la fin de la manif, le cortège arrive place Bellecour, B se dirige alors vers des policiers pour se plaindre d’une grenade de dispersion qui lui a explosé dans les jambes. Malheureusement, les flics vérifient les photos et l’embarquent.

« Ce qui m’a fait sourire dit le juge c’est qu vous étiez porteur d’un tract émanant de... Je crois qu’on peut appeler cela un "groupe" : Rebellyon.info qui donne un certain nombre de conseils ». Le juge fait référence au tract de conseil en manif que B avait dans la poche au moment de l’interpellation. Le juge l’a trouvé tellement « amusant » qu’il le lit à voix haute à toute la cour, avant de conclure « Il est dommage que vous n’ayez pas suivis ses conseils ».

Si le prévenu reconnait avoir jeté deux canettes et un pot de confiture qui n’ont pas atteint leurs cibles, il tient à rappeler la violence émanant de la police. « J’ai vu une femme avec un gamin de 6 mois dans les bras se faire gazer par les policiers dans le métro ».

Quant au procureur, apparemment il veut casser B, il va même jusqu’à dire que le prévenu lançait « une bouteille à la manière d’une grenade de la 2de guerre mondiale ». Dans son délire, le proc’ est clair. Il veut faire un exemple et réclame 9 mois de prison dont 3 avec sursis.

Bien défendu par maitre Galvin, B est déclaré coupable et condamné à trois mois de prison avec sursis.

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